là place où l ’on avoit posé ma chaise. Le silène#
dura encore une minute. Je le rompis le premier,
en disant, par l’organe de Kisseleff, que
je me persuadois que j ’étois dans une maison
d’amis. Les deux principaux magistrats, au
lieu de me répondre, se mirent à sourire; et
le plus âgé, qui avoit été à Koun a schir,
commença l ’entretien en se tournant vers
u n Japonois qui vint s’asseoir à sa gauche
la tête baissée; mais il lu i parla si bas, que
K isseleff n’entendit pas un mot. Le Japonois
rep rit sa place ; e t, à ma surprise extrême,
après m’avoir salué respectueusement , il
m’adressa la parole en russe assez intelligiblement.
C’étoit, ainsi que je l ’appris ensuite, l’interprète
M ouracami Te ské ,à qui M.Golovnin
avoit enseigné notre langue. Les Russes, me
d i t - i l , ont il y a long-temps répandu de
grandes alarmes sur les côtes du Japon; à
présent tout est heureusement arrangé. L e
certificat du natschalnik d’Ochotsk donne
pleine et entière satisfaction. Je lu i répondis
directement que, dans l ’h eureux arrangement,
la délivrance de nos prisonniers étoit sans
doute comprise, et que par-là toutes les
traverses que nous avions éprouvées sechan-
geroient pour nous en un jou r d’allégresse.
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Après que nous nous fûmes eneore réeipro**
quement adressé des civilité s , je parlai de la
lettre du gouverneur d’Irkoutsk. E lle me fu t
présentée par M. Savelieff placé près de moi.
E lle étoit dans une boîte recouverte de drap-
écarlate. Je la pris, je lus l ’adresse à haute v o ix ,
et je rendis la lettre à M. Savelieff, q u i laremit
avec la boîte à l ’interprète; ce lu i-c i l ’éleva
au-dessus de sa tête, et la donna au plus
jeune des d eu x principaux magistrats; ce
dernier l ’é leva jusqu’à sa poitrine, et la donna
à son d o y e n , qui annonça qu’i l la mettroit
sans délai dans la main du b oun io ; ajoutant
q u e , v u l ’importance de l ’affaire, i l fa u -
droit deu x jours pour préparer la réponse.
Les présens remis par M. Savelieff à l ’interprète
furent simplement placés devant les
d eu x principaux magistrats, q u i me prièrent
de v o u lo ir bien accepter une petite collation
dans la maison ; ensuite ils se le v è r en t, s’in clinèrent
vers m o i, et s’en allèrent avec le s
présens.
Alors Teské s’approcha familièrement de
n ou s , témoigna beaucoup de plaisir de nous
v o ir , m'appela par mon nom russe, et me
dit : cc Dieu soit loué ! je puis donc vous féli-
« citer sur l ’heureuse issue de votre affaire.