avoit une ressemblance extrême entre notre
prisonnier et l ’officier d’Itouroup, et se souv
in t parfaitement que celui-ci avoit écrit le
nom de M. Moor. « Par conséquent, dirent
« les gens de mon équipage, qui s’étoit ras-
« semblé sur le pont par mon o rd re , il n’est
ce pas surprenant que ce Japonois connoisse
cc M. Moor, et qu’il ne sache rien de notre
« bon capitaine. Certainement tous nos com-
« patriotes sont morts; ainsi nous sommes
cc prêts à répandre notre sang, aussitôt que
cc vous nous ordonnerez de les venger. »
— Quoique ces sentimens me fissent le plus-
grand plaisir, je représentai à ces braves gens-
que, suivant toutes les apparences, nos compatriotes
v ivo ient encore ; que nous n ’en
devions pas encore perdre l ’espérance, et que,
si malheureusement elle n’étoit pas fond
é e , notre gouvernement nous fo u rn ira it,
sans nul doute, l’occasion de déployer notre
zèle. De ce moment j ’abandonnai toute idée
de démonstrations hostiles, et je résol us d’emmener
au Kamtschatka le japonois Tacataï-
Caki, que la providence sembloit m’a vo ir
e n v o y é ; espérant q u e , pendant l ’h jv e r , je
pourrais m’instruire tant du sort de no»
compagnons, que des in ten tion s du gouvernement
japonois. Il me parut que Caki n’ap-
partenoit pas à la classe des Japonois que
nous avions eus précédemment à bord ; qu’il
étoit d’un rang plus élev é , et que par conséquent
il dévoit bien connoître tout ce qui se
passoit dans sa patrie. Nous apprîmes p a r la
suite que c’étoit un négociant riche et très-
considéré ; comme capitaine de son bâtiment,
il jouissoit de quelques prérogatives égales à
celie des personnes attachées au service de
l ’état ; ainsi nous le traitions de natschalnik
( c h e f , commandant).
Lorsque nous lu i annonçâmes qu’il clevoit
se tenir prêt à nous suivre en Russie, en lu i
exposant les motifs qui m’obligeoient à agir
de la sorte, il me comprit parfaitement; mais
lorsque je dis que M. Go lovn in , M. Moor et
nos autres compatriotes avoient été égorgés ,'
ainsi que le commandant de l’île l ’avoit lu i-
même déclaré, il m’interrompit plusieurs fois
en s’écriant : « Ce n’est pas v ra i, le capitaine
« Moor et cinq autres Russes sont vivans à
«: Matsmaï, s’y portent bien, sont bien so i-
« gn é s , et ont la liberté de se promener dans
« la v i l l e , accompagnés seulement de deux
« officiers.»— En entendant que nous Remmènerions
avec n o u s , il répondit avec une