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tement. Il se retira, et nous retournâmes chez
nous avec les interprètes.
Ce même jo u r , une conversation entre
M. Moor et les interprètes que nous entendîmes
à travers la cloison nous causa le plus
grand effroi. M. Moor exigeoit que Teské le
présentât seul au gouverneur. Teské lui en
demanda la raison ; il répondit qu’il vouloit
lu i révéler des choses très-importantes/«Mais,
« répliqua le Japonois, vous ne pouvez être
« présenté qu’après avoir fait connoître, par
« mon entremise ou celle de Koumaddjéro,
« ce que c’est que ces choses si importantes.»
— Alors M. Moor lu i découvrit que le but de
notre voyage avoit été de reconnoître les îles
Kourile s soumises à la souveraineté des Japonois
; qu’il ignoroit d’ailleurs quel avoit été
proprement le m o tif de ce plan; qu’il falloit
nie consulter sur ce point, parce que je pou -
vo is seul le savoir, ne communiquant pas
mes instructions au x officiers. I l ajouta que
nous avions caché au x Japonois plusieurs
circonstances de notre campagne ; enfin q u e ,
dans les traductions, nous avions donné à plusieurs
mots une signification différente de
celle qu’ils a voient, et que nous les avions
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interprétés en conséquence, etc.— «N’a v e z -
« vous pas perdu l ’e sprit, lu i demanda Teské
<c après l ’avoir laissé achever son discours?
« vous me contez là des absurdités sans nom—
cc b re, toutes capables de vous n u ire .» —
« Non , reprit M. Moor, je suis dans mon bon
<( sens, et je dis la vérité.» — Teské, perdant
patience, lu i déclara qu’en supposant même
qu’il dît la vérité , il étoit trop tard pour la
faire connoître ; que notre affaire étoit déjà
décidée ; que notre sort dépendoit uniquement
delà conduite de nos compatriotes; que
s’ils rapportaient une déclaration.satisfaisante,
on nous élargirait sur-le-champ. M. Moor
ayant de nouveau insisté pour être présenté
au gouverneur, Teské se fâcha tout de bon
et le quitta. Ensuite il v in t chez nous, et nous
dit que M. Moor étoit insensé , ou bien avoit
un coeur très-noir. Le lendemain, M. Moor
pari oit effectivement comme un homme qui
a perdu la raison;mais étoit-ce une folie réelle,
ou simplement un jeu? c’est ce que Dieu seul
peut décider.
D eu x jours après, M. Moor demanda qu’on
le mît de nouveau avec nous; les Japonois y
consentirent, et nous l ’amenèrent avec A le x is .
Vers cette époque, le savant que nous ap-
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