i l me pria d’un air calme , et même ga i, de
lu i verser un peu d’eau-de -v ie pour régaler
encore une fois ses matelots avant de se
séparer d’eux. Il but avec eu x , après quoi il
les accompagna sur le p on t, sans les charger
d’aucune autre commission. Nous mîmes les
hommes à terre , et ils allèrent sans obstacle
au fort.
T ou te la conduite de Calci avec ses matelots
avant de se séparer d’e u x , et surtout ces
mots expressifs « Il ne sera pas en ton pouce
vo ir de m’emmener à Ochotsk » , me cau -
soient les plus vives inquiétudes. L e retour
des matelots me paroissoit très-incertain. Je
pouvois retenir leur malheureux maître
comme otage, mais il n’étoit pas en ma puissance
de l ’empêcher de se porter à quelque
action désespérée que son discours me fai-
soit pressentir; le mettre à terre me paroissoit
aussi une mesure hasardée; néanmoins, tôut
bien considéré, jse dernier parti me sembla
le plus avantageux pour nos compatriotes
prisonniers. Dans le cas où Caki ne re v ien -
droit pas, je résolus d’aller directement au
fort. Je savois assez de japonois pour me
faire comprendre sans difficulté; je pensai
que si nos compagnons v iyo ien t encore, cette
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démarche n’ empireroit pas leur s o r t , et
que s’ils étoient morts', toute l ’affaire et mes
anxiétés seroient terminées. Je communiquai
mes idées à mon plus ancien officier; car il
étoit nécessaire, pour le service,que de temps
en temps je le misse au fait de différens points
des instructions qui n’avoient pas été remplis.
Son avis me confirma dans mon opinion.
Alors je dis à Caki : cc T u peux aller, à terre
« quand tu voudras, je m’en repose entière-
cc ment sur la générosité. Si tu ne reviens pas,
cc il m’en coûtera la vie. » — cc Je t’entends,
« r é p liq u a - t- il, tu n’oses pas retourner à
cc Ochotsk sans une attestation par écrit
cc concernant le sort de tes compatriotes,
cc Quant à moi,il est impossible que j’entache
cc mon honneur en r ie n , même au p r ix de
cc ma vie. Je te remercie de ta confiance,
cc J’avois résolu précédemment de ne pas
cc aller à terre le même jo u r que mes mate-
« lots ; d’après nos moeurs, cela ne me con v e -
cc noit pas. Si cela t’arrange, fais-moi mettre
cc à terre demain matin. » — «Je t’y conduirai
cc moi-même, répondis-je. » — « A présent,
cc s’écria-t-il d’un air ravi de satisfaction,
« nous voici redevenus amis. Eh b ie n , je
« yais t’expliquer ce que signifiait l ’envoi de