M; Moor étoit un officier d’un rare mérite.
Indépendamment des connoissances propres
à son état, il savoit plusieurs langues et des-
sinoit très-bien. Il aimoit la profession qu’il
avoit embrassée, étoit actif et infatigable dans
son service. En société, il étoit aimable et
causoit agréablement. J’ai servi avec lu i cinq
ans sur la même corvette jusqu’à notre catastrophe
de Kounaschir; par conséquent, je
l ’ai bien connu. Si le sort ne m’eût pas rendu
témoin de ses égaremens, je n’eusse jamais
cru qu’un homme comme lu i eût pu tomber
aussi bas.
L e 2 décembre, je partis de S t.-P ie r r e
et St.-Paul avec M. Ricord, dans un traîneau
attelé d e ‘ chiens. Le premier-'jo u r de
l ’an i 8i 4 nous trouva aumiliep d’une steppe
déserte qui occupe un espace de trois cents
verstes carrées et qui est connue dans ce pays
sous le nom de vallée de Parapalsk ; les vo y a geurs
y périssent assez souvent victimes de
tourmentes et de tourbillons de neige. Après
bien des dangers, nous arrivâmes, vers le milie u
de fév rie r, à Inschiginsk. M. Ricord, appel épar
son se rv ic e , me quitta dans cette v ille et retourna
au Kamtschatka. Le 11 mars, j’entrai
dans Ochotsk, après avoir parcouru plus de
trois mille verstes en traîneaux attelés de
chiens. Je partis d’Ochotsk avec la meme espèce
de voiture, puis je continuai mon voyage,
d’abord avec des ren n e s , ensuite à cheval ; et
enfin, deux cents verstes avant Irktíutsk, je
trouvai des kibitks de poste. J atteignis I i -
koutsk par la route d’h iv e r a la fin d a vril.
J’en sortis au milieu de mai, et j’arrivai à St.-
Pétersbourg le 22 ju ille t; j’en étois parti le
même joûr de l ’année 1807, e t , ce qui est
assez remarquable, précisément à la meme
heure. J’avois donc étû, sept ans complets,
absent de cette ville. J’appris que l ’empereur
in’avoit élevé au rang de capitaine de seconde
classe. Cette faveur inespérée me surprit d’autant
plus que, trois ans auparavant, j’avois
reçu l’ordre de S t.-V lad im ir , en récompense
du succès de mon voyage de Kronstadt au
Kamtschatka et des soins que j’avois donnés
à* la santé de l ’équipage qui m’étoit confié.
Notre auguste monarque fixa ensuite son
attention sur les services des officiers de la
Diane , et tous obtinrent des récompenses. Je
me bornerai à citer ceu x qui ont figure dans
le récit de mes aventures. M, Ricord, qui avoit
été promu en même temps que moi au rang
de capitaine de seconde classe, fu t gratifié,