nois reste a Ochotsk par maladie. Il a voit déjà
vo u lu le mettre à terre âÉdomo, mais les fonctionnaires
publics de ce lieu et ceux de Cha-
lcodade avoient refuse de le recevoir ; ce ne
fut qu aujourd’h ui que ces derniers y con-
sejntirent. Ce Japonois étoit un de ceux qui
avoient fait naufrage en 1811 sur la côte de
Kamtschatka. Il avoit eu la jambe gelée; de
sorte q u e , malgré tous les soins de nos médecins
pour la conserver, ils avoient enfin été
obligés de la lu i couper. Il marchoit avec une
jambe de bois, ce qui surprit beaucoup ses
compatriotes, car il y a parmi eux bien peu
de gens de l ’art qui aient appris des Hollan-
dois la manière de faire les amputations t et
qui soient assez hardis pour les tenter.
L ’après-midi, plusieurs magistrats japon
o is , de deux à quatre grades inférieurs à
ce lu i du gouverneur, nos interprètes et ¡ ’académicien
vinrent nous rendre visite. Teské
et Koumaddjéro nous firent cadeau, à M. R i-
cord et à moi, d’étoffes de so ie , de thé du Japon
, de très-bon saki et de confitures. Nous
régalâmes nos hôtes de thé, d’eau-de-vie de
France et dé liqueur. Les deux dernières boissons
leur semblèrent très-bonnes, si bien que
quelques-uns d’entre eu x se mirent en gàîtê,
et jasèrent à qui m ieu x mieux. M. Ricord déliv
ra aux interprètes la lettre de remercîment
du gouverneur d’Irkoutsk ; e t , comme il en
avoit une co p ie , ils la traduisirent aussitôt
en japonois, conjointement avec nous. Les
Japonois nous témoignèrent à cette occasion
le désir de vo ir la signature de notre souverain.
A y a n t , parmi mes papiers restés à bord,
mon diplôme de chevalier de l’ordre de Saint-
Vlad im ir , je ¡’allai prendre. Quand j’eus posé
ce papier sur la table, et que je leu r eus montré
le nom de l ’empereur, ils baissèrent tous
la tête presque jusque sur la table , et restèrent
un instant dans cette posture. Ils regardèrent
ensuite la signature avec les marques
du plus profond respect; et, après l ’avoir
suffisamment considérée, ils firent les mêmes
démonstrations de soumission.
En nous séparant de nos amis les Japonois,
nous leur fîmes des présens proportionnés
aux services quë chacun nous avoit rendus.
Ils n’acceptèrent nos dons qu’en cachette, de
manière qu’un autre de leurs compatriotes ne
pût pas les aperce voir; encore ne vinmes-nous
à bout de faire accepter quelque chose qu’à
ceux qui purent tout cacher dans les larges
manches qui leu r tiennent lieu de poches.