flots de l ’océan, mais elle peut encore se rvir
de magasin, et restera dans ce port comme
tin monument des temps passés. Il est possible
que ces côtes , devenues fameuses par
les relations de Cook et de la Pérouse, soient
par la suite mieux connues des nations asiatiques
voisines à cause de leur situation si
favorable au commerce, et plus fréquentées
par les navigateurs des pays les plus reculés.
Alors peut-être la Diane attirera les regards
des hommes qui prennent plaisir à réfléchir
à la marche miraculeuse des destinées h u maines.
Ce petit liv r e n’étant destiné qu’à se rvir
de supplément à la relation de M. G o lo vn in ,
je finirai ic i la mienne en rappelant dans
3’ame du lecteur les sentimens de compassion
qu’il a déjà éprouvés, lorsqu’il aura vu quel
fu t le sort déplorable du malheureux M.Moor.
Le jou r de notre arrivée au Port St.-Pierre
et St.-Paul, nous étions tous dans la jo ie ;
mais lu i qui se sentoit coupable n’y prenoit
aucune part. C’étoit, non par les suggestions
d’un coeur dépravé, ni dans l’intention de
trahir sa patrie, mais par erreur, privé de tout
espoir de jamais recouvrer sa liberté, et se
berçant de l’idée de l’obtenir des inexorables
Japonois, qu’il avoit dévié du chemin de
l ’honneur. Les circonstances ayant tout-à-
coup changé entièrement, il s’égara de plus
en p lu s , et finit par se liv re r au désespoir.
Un homme ordinaire eut aisément oublie ses
fautes; mais un coeur , dans lequel la loyauté
a jeté de profondes racines, est brisé a jamais
par le remords d’une seule action blarnabîe,
commise sans préméditation. O n en a la preuve
par la fin tragique de l’infortune Moor, a qui
je ne puis penser sans frémir. L e jou r où,
mis en liberté à Chakodade, il v in t à bord,
je voulus l’embrasser amicalement : il recula
d’un air effaré, me tendit son sabre, et me
dit d’une v o ix lamentable : .«J’ensuis indigne,
« j’en suis indigne ! faites-moi enfermer dans
« l’endroit où sont les criminels. »— Comme
à ces mots mon coeur qui s’ouvrpit a la joie
se resserra douloureusement ! Afin que l’équipage
ne s’aperçût de r ien , je me remis
promptement, et je pris le sabre en lu i
disant: « Je le reçois en mémoire de cet
« h eureux jour.» En même temps j’entraînai
MM. Moor dans la chambre où M. Golovnin
et M. Chlebnikoff exprimoient leur recon-
noissance aux officiers réunis. Ce fu t là que
mon capitaine me fit présent de son sabre,