« pas les prémices ? » Nous le mîmes à terre
près du ruisseau, d’où il lu i restoit encore
plus de deux verstes à parcourir jusqu’au
lbrt.
Le mauvais temps nous empêcha de le rev
o ir le lendemain. Le 16 , il re v in t, de si
bonne heure que la sentinelle ne l ’aperçut
que lorsqu’il étoit déjà sur le bprd du ruisseau
a attendre; notre can o t, ce qui me contraria
beaucoup. Quand il arriva, je lui en
fis des excuses, et j ’ajoutai que nous ne nous
attendions pas à ce qu’il nous sacrifiât ainsi son
sommeil. Il m’avoua franchement qu’il avoit
été sensible au retard qu’il avoit éprouvé.
<c Du moment où je suis sorti du fo r t , conte
tin u a - t- il, je n’ai pas cessé d’agiter le mou-
« choir blanc; si le canot eût différé un
cc moment de plus a paroître, je m’en serois
cc retourné. » Pour calmer ce vieillard si
bon et si susceptible, je fus obligé de réprimander
la sentinelle devant lui. cc T u es
cc étonné, rep rit-il, de ce que je viens de si
te bonne heure ; eh bien , le commandant me
cc dissuadoit de partir sitôt, mais il faut tenir
cc sa parole. Hier fut pour moi un jour désa-
<c gréable. Il étoit trop tard pour ven ir vous
K tro u v e r , quand les pêcheurs arrivèrent.
« J e n’ai pas pu dormir tranquillement,
et parce que je n’avois pas rempli ma pro-
<c messe. Dès qu’il a fait jo u r , je me suis
cc levé ; j’ai pris à la hâte une tasse de th é ,
cc et je suis allé au fort avec tout le produit
cc de la pêche d’hier; comme tu le v o is , i l
cc ne consiste qu’en quatorze poissons. A u -
cc jourd’h ui j’aurai le plaisir de manger avec
cc toi les premiers poissons frais ; je n’en ai
cc pas encore goûté à terre. » Quelle bonté
dame ! Je ne pus pas trouve r d’expression
assez forte pour le remercier convenablement
: je me contentai de lu i dire: cc T u es
« mon am i, et les amis s’entendent. »
L e dîner fu t prêt de meilleure heure qu’à
l ’ordinaire, parce que Caki parloit souvent de
son grand appétit. Il se mit à table avec nous.
Le poisson , apprêté avec du gruau commun
du Japon, fu t notre seul plat. Caki mangea
prodigieusement. Depuis long-temps je n ’avois
pas goûté d’un poisson qui me parût d’aussi
bon goût; c’étoit un mets assaisonné par
l ’amitié. A la fin du rep a s, nous bûmes à la
santé de Caki, et, le soir, nous le ramenâmes
à terre.
Le 18, il re v in t; e t , en causant familièrement
avec nous, il nous dit qu’il s’en n u yo it