Teslté v in t à ma rencontre et me parla de
M. Moor, m’annonçant que ce dernier étoit
très-aigri contre nous et disoit beaucoup de
mal de nous. Il me conseilla cependant de ne ''
pas-m’en chagriner, parce que les Japonois
n’étoient pas enclins àajouter foi aux discours
de M. Moor, et m’apprit aussi que cet officier
avoil offert ses services aux Japonois. Je priai
donc les magistrats assemblés de vouloir bien
me permettre, avant de m’interroger,de leur
exposer franchement ma pensée, et de m’é-*
coûter attentivement; je recommandai en
même temps au x interprètes de traduire mes
paroles aussi fidèlement qu’il leur seroit possible.
Les magistrats me répondirent qu’ils
éeouteroient volontiers tout ce que j’avois a
leu r communiquer. Alors je leur posai cette
question : cc Que diriez-vous, si trois officiers
« jàponois se trouvant prisonniers, n’importe
« en quel, lie u , deux eussent agi cotrïme
oc M. Chlebnikoff et moi, et le troisième
oc comme M. Moor? » Ils se mirent à r ire , et
ne répondirent pas. A la fin , le plus âgé me
dit : cc Vous n’avez rien à craindre ; c a r , pour
oc les Japonois, tous les Russes sont égaux:
« nous voulons seulement vous parler de la
a marche de votre affaire. ï) ’après nos lo is ,
oc rien ne peut se décider promptement, voilà
oc pourquoi vous êtes encore en prison; mais,
ce à l’arrivée du nouveau gouv erneur, on
« vous donnera un meilleur logement; vôus
cc aurez même une maison, et tout donne liéii
<c d’espérer que vous serez renvoy és en
cc Russie. » Ensuite commença l ’interrogatoire
, et l’on me demanda premièrement s’il
étoit v r a i, ainsi que les KourilesTâvOiént
assuré, que Resanoff eût eu part à l’attaque
commise par les vaisseaux de la compagnie,
comme ayant d’abord donné à Chvostoff
l ’ordre d’agir ainsi ; ordre qu’il avoit ensuite
révoqu é , et que Chvostoff avoit néanmoins
suivi. Je n’eus pas de peine à deviner que!
cette révélation venoit, non pas des Kourile s,
mais de M. Moor; et je répondis que je ne sa-
vois pas précisément si Resanoff avoit eu
quelque part à cette affaire; qu’au reste, su ivant
le bruit qui avoit cou ru, il avoit formé
le plan d’attaquer les Japonois.
Les magistrats japonois m’adressèrent ensuite
un grand riombre de questions qu’ils avoient
l’air de prendre dans un cahier placé devant'
e u x , et quiétoient relatives à notre navigation,
au but dé notre expédition, à l ’état de là Russie
ét dé ses relations politiques avec les autres