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Mais le récit des périls que nous courûmes,
et des moyens que nous employâmes pour
sauver la corvette , me semble absolument
superflu; que l ’çm ouvre une bonne
relation de voyage par m e r , et l’on y trouv
era une excellente description de tout ce
que j ’omets.
L e 5 n ovembre , nous mouillâmes dans la
baie d’Avatcha. Le Kamtschatka,pays presque
inhabitable dans cette saison, avec ses montagnes
couvertes de neige, ses volcans et ses
forêts impénétrables, nous parut un paradis,
car c’étoit une portion de notre patrie. Les
premières personnes qui vinrent au-devant
de la D ia n e , furent M. Iakoutschkin, lieutenant
de vaisseau, qui avoit servi avec moi
sur cette corvette, et M. V o lk o ff, lieutenant
d’artillerie de la garnison. En m’apercevant,
ils furent aussi surpris, notamment le premier
, que s’ils eussent revu un homme ressuscité.
Ensuite arrivèrent à bord MM. Nar-
manskoï et Podouscbkin , tous deux lieu te -
n an s , dont je fis la connoissance. Le soir, à
d ix h eu re s , j’allai à terre avec ces officiers, à
Saint-Pierre et Saint-Paul.
Il faut à présent que je.revienne à mon malh
eu reu x compagnon M* Moor. Quoique son
terrible repentir doive effacer le souvenir de ses
déplorables e r reu r s , néanmoins le triste sort
de cet officier étant bien fait pour exciter la
compassion de tout homme sensible, et
montrer en même temps les suites affreuses
de fautes semblables à celle qu’il avoit commise
, je vais achever de raconter ce qui le
concerne.
Lorsqu’arrivés à bord de la D ia n e , sur la
rade de Chakodade, tous les officiers, transportes
de jo ie , s’empressèrent à v en ir au -d e vant
de n o u s , M. Moor resta debout sans faire
unmouvementj comme privé de sentiment et
étranger à tout ce qui se passoit autour de
lu i. Nous convînmes à Pinstant, entre n o u s ,
de ne pas parler en sa présence de ce qui s’é -
toit passé au Japon, ni de faire mention de
choses qui pouvoient lu i rappeler sa conduite
précédente.Nous essayâmes, par des conversations
qui pouvoient lu i être agréables, par
exemple sur la Russie, de le distraire de
toutes les manières possibles; ce fu t en vain.
I l s’habilloit d’une manière peu convenable à
son rang, se tenoit généralement avec les
matelots, mais ne leu r parloit pas. Lorsque
nous cherchions a le ramener dans une meilleure
v o ie , et que nous lu i représentions
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