1 7 6 TERRAIN TERTIAIRE SUPÉRIEUR.
Le sentier qui, sur une ligne d'environ 3 lieues, conduit
de Giaour Koï à Tchanak Kalessi, franchit d'abord une
hauteur élevée qui côtoie la mer; on en descend ensuite
par une longue gorge débouchant dans une plaine accidentée
qui, du côté du nord-est-nord, se déploie jusqu'à
ï c h a n a k Kalessi et se trouve bordée du côté de l'est par des
collines lacustres souvent peu élevées. Tant la hauteur que
la gorge sont composées de marne crayeuse et de grès
pétris (ÏAnodonta heUespontica, malheureusement toujours
à l'état de moule.
A mesure qu'on s'avance de Giaour Koï vers Tchanak
Kalessi, le littoral européen du détroit se présente de plus
neure, où Giaour Koï est le seul endroit qui ait jamais fourni des restes de
mammifères, car leur absence dans les dépôts tertiaires et quaternaires de
la péninsule contraste singulièrement avec l'abondance de semblables débris
dans les dépôts analogues de l'Europe. On conçoit donc de quelle
importance doivent être les collections de 51. Calvert pour la paléontologie
en général et pour la connaissance géologique de l'Asie Mineure en particulier,
et dès lors on ne peut que s'étonner et regretter vivement qu'elles
n'aient pas encore été en Angleterre l'objet d'une étude spéciale, livrée à la
publicité. Malheureusement tel paraît être le cas, du moins malgré toutes
mes recherches, je n'ai pu découvrir que deu.ij publications où il soit fait
mention de ces collections : l'une est un travail de M. Spratt {Quarl. Journ.
of the Geol. Soc., vol. XIV, p. 216) qui parle des ossemenis fossiles recueillis
par M. Calvert dans les parages d'Éren Ko'i, mais sans donner aucun
renseignement précis à cet égard, puisqu'il se borne à signaler des dents
fossiles et une portion de mâchoire d'éléphant contenant deux dents en
place; l'autre travail est de E. Raj Lankester [loc. cit., vol. XXI, p. 22!)
où, en disculant l'origine des mammifères fossiles durée/ cra^, le savant
paléontologiste anglais signale dans le crag rouge de Suftolk des défenses
d'un grand mammifère en faveur duquel il crée le nouveau genre Trichecodon
(T. Huxleyi)-, or M. Lankester fait observer à cette occasion qu'il
avait déjà vu des défenses semblables dans plusieurs collections et enire
autres dans celles de M. Calvert.
CHAPITRE II. 177
en plus distinctement, en laissant voir la plus parfaite analogie
de composition avec le littoral opposé ; seulement les
deux côtes n'oiTreat pas toujours la même concordance sous
le rapport des dimensions et des formes des dépôts qui les
constituent, car souvent des hauteurs aplaties s'élèvent
sur l'une des deux côtes en plongeant à pic dans la mer,
tandis que la portion du littoral opposé à laquelle ces hauteurs
correspondent, n'offre que des surfaces planes, très-peu
supérieures au niveau de la mer.
Dans les parages de Tchanak Kalessi se trouve une carrière
d'argile plastique employée à la fabrication de vaisselle
en terre (pots, cruches, plats, etc.), genre d'industrie
qui a valu à la ville le nom qu'elle porte \ Cette carrière,
exploitée à ciel ouvert, est creusée dans les flancs d'une
hauteur qui présente un très-beau profil naturel dont j'ai
donné un croquis dans mon Bosphore ei Conslanlinople\
Dans ce profil qui fait voir cinq assises de marnes, grès et
argiles plastiques, ayant une puissance totale de 7 mètres
5 centimètres, aucune des assises ne paraît contenir des
fossiles, tandis que ceux-ci sont très-abondants (particulièrement
VAnadonta heUespontica) dans les collines calcaires
limitrophes, situées tout le long de la côte ainsi que dans
l'intérieur de la ville, sans que cependant on puisse dégager
ces coquilles de la roche dans laquelle elles sont très-
\. Tchanak, vaisselle, kalé, château. C'est ainsi que le peuple désigne
la localité connue par les Européens sous le nom de Dardanelles, où résident
les consuls des puissances étrangères. Dans les actes ofQciels turcs, on
ne se sert que de la dénomination de Kalé suUanié ou château du sultan.
Voyez la vue de cette ville dans \Allas piUoresque joint à ma Géoçjraphie
physique comparée de l'Asie Mineure.
2 . Pl. VIII.
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