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410 T E H R A I N S POST-ÏERTIAIRES.
n'est plus représenté aiijoard luii que par le lac d'AkizTchaï,
situé à 16 kilomètres de la .mer.
En un mot, lorsqu'on compare attentivement l'état
actuel du littoral compris entre le cap Samsoun {Tragiliumpromonlorium
ou Mycalc, oppose à l'Ile de Samos) et
les bouches du Méandre, avec la configuration qu'il avait à
l'époque de Strabon, d'après la description détaillée qu'en
donne le célèbre géographe, on est conduit à ce résultat,
que, dans le courant de dix-huit siècles, l'embouchure du
Bléandre a avancé de plus de 3 lieues métriques, c'est-àdire
d'environ 600 mètres par siècle, et que le littoral y a été
augmenté d'une plage nouvelle, ayant, du nord au sud, une
longueur d'environ /; lieues, et une surface approximative de
12 lieues carrées métriques, ce qui équivaudrait presque à
l'étendue de l'île de Wight ou de l'île d'Elbe^
Cette plage alluviale, bordée par un cordon littoral trèssinueux
et diversement frangé, est composée de sables et
'I. Cet énorme accroissement de terre ferme est trop considérable
peut-être pour qu'on le considère comme l'oeuvre exclusive du Méandre,
bien que Sirabon semble vouloir attribuer à cette rivière tous les atterrissements
que cette partie de la côte offrait déjà de son temps; sans parler de
rhypotbèse de Pline {i\al. Ilist.. 1. IL, 87), d'après laquelle presque
toutes les régions littorales de l'Fonie, de la Mysie et même de la Troade,
ne seraient que la création du Méandre. L'explication que l'amiral Beaufort
a proposée pour rendre compte de ce curieux phénomène est sans
doute plus satisfaisante. Le savant hydrographe anglais a émis [Karamania,
p. 39 et 86) l'opinion d'après laquelle les masses tout à fait exceptionnelles
de matières détritiques qui se déposent le long de la côte occidentale
de l'Asie Mineure seraient dues à la rencontre de deux courants
opposés, dont l'un se dirige de l'ouest à l'est, en venant par le détroit de
Gibraltar et en tournant d'abord au nord, pour longer le littoral de la Syrie,
et ensuite à l'ouest, pour côtoyer celui de l'Asie Mineure jusqu'à l'archipel
grec, où il rencontre le courant opposé venant de la mer Noire et dé-
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d'argiles, étendus le plus souvent en une nappe horizontale,
tout autour des bouches du Méandre, mais qui (les sables
surtout) s'amoncellent en ma'sses de formes diverses à mesure
que l'on s'éloigne de la plage, soit pour remonter la
rivière, soit pour se rapprocher du Samsoun Dagh [Möns
Mycale) qui borde au nord et au nord-ouest le vaste delta
du Méandre. Ainsi, le lac d'Akiz Tchaï est encadré d'une
lisière sablonneuse plus ou moins large, qui tantôt constitue
une plage unie, comme entre autres à l'extrémité sud-est du
lac dans les parages de Bafi, tantôt s'élève en collines plus
ou moins considérables, séparées les unes des autres par des
ravins profonds, ainsi que cela a lieu à l'extrémité nord-est
du lac, dans les parages de Sakizbournou. De même, entre
Samsoun, Uzbaschi, Seuké et Aîné Kalessi [Magnesia ad
Meandrum) aussi bien que dans l'intérieur de la vallée
latérale où se trouve ce dernier village, on voit plusieurs
rangées de hauteurs composées de sable micacé, souvent
bouchant par les Dardanelles. Ces deux courants, en se neutralisant, détermineraient,
selon l'amiral Beaufort, la précipitation des matières détritiques
tenues en suspension pendant ce long trajet, et empruntées successivement
au littoral africain de la Méditerranée, à la côte méridionale de l'Asie Mineure
et enfin aux côtes de la mer Noire. Si cette hypothèse est fondée (et
rien jusqu' à présent n'est venu la contredire), il en résulterait que l'accroissement
du littoral occidental de l'Asie Mineure doit continuer de nos
j o u r s , en sorte que l'époque n'est pas éloignée, peut-être, à laquelle l'île
de Samos se trouvera réunie à la terre ferme, notamment au cap Mycale.
Cet événement ne serait au reste que la reproduction de faits analogues
qui se sont déjà opérés sur plusieurs points des côtes de l'Asie Mineure,
puisque, du temps de Strabon, le cap Triopium (cap Cavo d'aujourd'hui )
ainsi que le promontoire élevé situé au sud de l'ile de Marmara, et sur lequel
se trouvait jadis la célèbre ville do Cyzicus, étaient des îles qui actuellement
sont soudées au littoral.