28 T E R R A I N TERTIAIRlî .MOYEN.
C H A P I T R E II. 29
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partant de la ville de Karaman et aboutissant au village de
Selefké, situé près de l'embouchure du Gueuk Sou, le célèbre
Cahjcadnus des anciens. L'une de ces coupes se dirigera au
sud-ouest-sud, de Karaman, vers le petit village de Boyalar,
et traversera ensuite le massif du Topguedik Dagh, afin de
descendre dans la ville d'Ermenek, et de Icà dans la vallée
du Gueuk Sou que notre coupe longera jusqu'à Selefké.
L'autre coupe s'éloignera de Karaman dans la direction
sud-est pour rejoindre Selefké, en franchissant le plateau de
Karatasch. Nous commencerons parla première coupe.
I I .
Lorsque, après avoir traversé les puissants dépôts lacustres
échelonnés entre Karaman et Boyalar, le géologue a
atteint ce dernier village, il est tout d'abord frappé par le
changement inattendu qui s'opère dans le caractère paléontologique
des dépôts au milieu desquels il se trouve. En effet,
la colline sur laquelle est située Boyalar, à une altitude de
1,318 mètres, colline qui se rattache au pied nord-ouest de
la chaîne d'Alibeï Dagh (provisoirement rangée par moi
dans le terrain tertiaire inférieur,) est composée exactement
des mêmes calcaires et conglomérats qui, depuis Karaman
jusqu'à Boyalar, sont caractérisés par des fossiles lacustres,
et cependant, ceux-ci s'évanouissent complètement aussitôt
qu'on pose le pied en ces lieux, car on y voit apparaître
comme par enchantement une foule de fossiles marins.
Aussi, ce n'est que grâce à ces guides fidèles que le géologue
acquiert la conviction qu'il ne se trouve plus daas le
domaine lacustre, fait qu'il eût été dans l'impossibilité de
découvrir si ses conclusions n'avaient eu d'autre base que des
considérations puisées dans les caractères pétrographiques
ou straligraphiques des roches respectives \
Parmi la prodigieuse quantité de fragments et d'empreintes
de coquilles marines dont est pour ainsi dire pétrie
la colline de Boyalar, et qui se rapportent particulièrement
aux genres NerUina, Turritella, Coniis, Turbo, Nucula,
Venus et Alveolina, j'ai recueilli une nouvelle espèce de telline
: Tellina Tchihalcheffi, Fisch., ainsi que quelques
Cytherea leonina. Bast. ; cependant je ne les ai observées
que dans un calcaire marneux grisâtre ou jaunâtre, mais
non dans le conglomérat auquel passe le premier, car ce
conglomérat, composé de fragments assez menus et constituant
à lui seul des couches puissantes, est précisément le
siège de cette masse énorme de coquilles mutilées ou triturées
dont il m'a été impossible d'obtenir un seul exemplaire
déterminable.
Au sud-ouest de Boyalar se déploie une profonde vallée
presque parallèlement à l'Alibeï Dagh, laquelle est littéra-
1. Si, sous le rapport ds la composition et du faciès extérieur de la
roche, les parages de Boyalar offrent la plus parfaite identité avec la contrée
lacustre comprise entre cet endroit et la ville de Karaman, il n'en est
pas de même sous le rapport de la physionomi e végétale, car, à mesure que
l'on s'éloigne de Karaman, la nudité désolante si caractéristique pour les
grands plateaux lacustres de la Lycaonie (ainsi que pour la major i t é d'autres
régions lacustres de l'Asie JUneure) disparaît de plus en plus, en sorte
qu'à Boyalar le voyageur a déjà le plaisir de voir préparer ses aliments à
la flamme petillante du bois, tandis qu' à Karaman il est encore obligé d'employer
comme unique combustible la fiente desséchée de chameau ou de
chèvre, combustible qui par ses exhalaisons est passablement incommode,
sinon aux consommateurs affamés, du moins aux témoins de ces champêtres
repas.