nation teherkesse et la constance qu’elle a mise h
suivre les coutumes antiques.
La partie de la chaîne du Caucasie qui longe la
Mer-Noire, présente une série de cimes élevées
de douze à treize mille pieds, dont l’angle vers
la Colchide est le Djoumantau, la cime la plus
voisine de l’Elbrous de ce côté-là. C’est ici qu’on
peut 'le mieux embrasser d’un seul coup d’oeil
1 ensemble de ces cimes granitiques et porphyri-
ques, flanquées de masses informes de schiste
noir, sur lequel s’appuie une muraille de calcaire
jurassique, haute de sept à huit mille pieds, fendue
de distance en distance par de profondes
écluses pour donner passage aux eaux. Au débouche
de la Colchide (i), cette muraille est encore
séparée de la mer par une plaine uniforme,
large de sept à huit lieues, qui borde la haute
chaîne sur une longueur de trente lieues, se
rétrécissant toujours davantage jusqu’à la hauteur
de Gagra, ou la muraille jurassique vient
heurter contre la mer de toute sa hauteur : elle
ne laisse ici qu’un passage aussi étroit que les
Thermopyles grecques ; une plage sablonneuse,
qui n’a quelquefois que huit toises de large, est
le seul chemin possible qui mène de cette longue
plaine au prolongement de la ehaîne, qui change
( i ) J’emploie le terme de Colchide pour désigner le bassin
qui renferme le Gouriel, la Mingrélie et l’Iméreth.
complètement de nature. Les hautes cimes s’a-
baissent, les schistes noirs et les calcaires jurassiques
se cachent petit à petit sous les flots ou
sous les vastes lits d’une formation crayeuse qui
termine ici le Caucase. Vous ne voyez plus ces
cimes blanchies par la neige ; un long dos de
montagnes basses, arrondies, boisées, longe à
courte distance la côte profonde ; ce dos est
coupé d’une multitude de vallées latérales, étroitement
encaissées, arrosées de ruisseaux dont
aucun ne devient rivière navigable. La mer elle-
même est bordée d’une longue suite de hautes
falaises blanches ou grises, battues par les flots.
Tel est le sol qui tomba en partage aux Tcher-
kesses et aux Abkhases ; ceux-ci se concentrèrent
sur les hautes parties de la chaîne ; les
Tcherkesses se contentèrent toujours de l’extrê-
mité crayeuse, et jamais aucune de leurs tribus
ne parait avoir occupé les hautes vallées. La singulière
conformation de leur pays le défendit
toujours contre toute invasion étrangère par
terre. La mer seule le rendait tant soit peu accessible.
Si nous voulons en croire les historiens grecs,
déjà dans les temps les plus antiques, à cette
époque où l’esprit aventureux des Grecs les faisait
courir à travers les mers, à Troie, en Chypre,
en Colchide, ces peuples seraient venus fonder
deux associations coloniales grecques sur cette