«les. Ce sont des barques longues de cinquante
pieds, droites, avec line quille. Du temps de
Strabon, elles portaient vingt-cinq à trente hommes;
aujourd’hui elles sont montées de quarante
à soixante hommes dont les deux tiers rament;
N’ayant pas de mâts, et étant très basses, elles
échappent facilement à tous les regards, se glissant
le long des côtes, et dès qu’on les poursuit
de trop près , elles sont si légères que l’équipage
peut les tirer sur le rivage et même les cacher
dans les bois. On dit qu’en cas de nécessité , les
Chapsoughés, les Oubikhes, les Saches ou Sa—
khi (1) peuvent en mettre quarante sur pied, ce
qui pourrait bien être exagéré.
Les Russes cherchent à réprimer de toutes
leurs forces leurs brigandages ; ils font la chasse
à ces galères dès qu’elles se présentent ; la piraterie
a donc presque cessé sur cette côte ; mais
il suffirait d’un peu de relâche dans les mesures
des Russes pour qu’elle recommençât de plus
belle, et qu’on courût le risque, comme le capitaine
Gautier relevant sa belle carte, d’être attaqué
et fait esclave.
Par un heureux hasard, lés Russes, au
commencement de l’été i 834, se sont emparés
d’Ali-bey, Prince des Chapsoughés de
Djouhoubou, qui seu’endait monté sur un vais-
( i) Guldenstâdt, p. i33.
seau turc avec quarante des siens à Trébizonde.
Le but de toutes les pirateries et de toutes les
expéditions des Tcherkesses est de faire des prisonniers
esclaves, qu’ils vendent aux Turcs,
quand les Russes ne leur paient pas une forte
rançon. On rachetait principalement les soldats.
Mais l’expérience prouva que cette méthode
était le plus sûr encouragement du brigandage,
et l’on eut l’idée d’user de représailles. L’ordre
fut donné de faire autant de prisonniers que possible,
et ce fut le colonel aujourd’hui général
Sass, le démon des Tcherkesses, comme ceux-ci
rappellent, qui fut chargé spécialement de cette
branche d’économie militaire, et l’on peut dire
que l’on ne pouvait choisir quelqu’un de plus
brave, de plus habile, de plus actif. Déjà au
commencement de l’été de 18 34, il avait fait
plus de soixante prisonniers tcherkesses** qu’on
avait menés à Ekatérinodar, pour des échanges ;
le prince Alibey et ses compagnons allèrent les
rejoindre, et l’on fixa à dix hommes la rançon
du chef.
Il n’y aura certainement pas de meilleur
moyen de corriger les Tcherkesses de leur mauvaise
habitude que celui-là; on ne fait rien pour
rien, et il est singulier qu’on n’ait pas visé plus
spécialement à cela depuis long-temps.
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