elle était remplie de richesses auxquelles ni les
Abkhases, ni les Alanes, ni les Zikhes, n’osaient
toucher, tant était grande, au milieu de leurs
biigandages, leur vénération pour cette église et
son saint. Les portes de l’eglise étaient couvertes
de plaques d’argent, sur lesquelles étaient représentes
en bosse les images du saint et ses miracles...
J’ignore si Ilori a encore ses portes d’argent
; mais je sais que cette eglise n’a encore rien
perdu de sa vogue pour les ex voto. Celui qui
apporte une offrande, l’expose dans l’église, si
elle est acceptée, il la voit le lendemain dans
1 autel; sinon l’offrande reste là jusqu’à ce que
la patience du saint soit lassee, ou que le donateur
vienne la reprendre. Il n’y a pas de choses
que l’on n’apporte ainsi. Dernièrement quelqu’un
s’avisa d’offrir quatre fourches en fer; elles
sont dans l’expectative, et il faudra bien un jour
que saint Georges se laisse fléchir et prenne les
fourches sous sa gracieuse protection.
Les ruines de l’ancienne ville d’Jlori sont à six
verst à l’ouest de l’église, sur la rive gauche de
l’embouchure de la Markoula, au bord de la
mer. Les Turcs ont bâti entre la Markoula et la
Galazga une ville qu’ils ont nommée léni-Chéri
(nouvelle ville), par opposition à l’ancienne.
En passant devant les bouches de l’Engour, je
vis aussi Anakria, l’Héraclée des Grecs, avec
ses vieilles murailles ruinées, bordant la rive
gauche du rapide Engour. Dadian a établi ici
une colonie de Turcs qui prospère, dit-on.
Enfin le i 833, je débarquai à Redoute-
Kalé après avoir erré deux mois entiers sur ces
rivages inhospitaliers de la Circassie et de l’Ab-
khasie, Néanmoins ce ne fut qu’avec un grand
serrement de coeur que je quittai mon bon capitaine
Voulf et son équipage. Abandonné maintenant
à moi-même, tout seul, j ’étais comme un
naufragé sur Ja plage; trouverai-je plus loin
cette bonté, cette hospitalité de coeur, cette
complaisance? Nous nous quittâmes les larmes
aux yeux; c’est sur mer qu’on sent le prix de
l’amitié.