voir s’il était de bonne foi quand il nous tenait
ces diseours-là.
Pri nce Hassan.
Un jour notre capitaine nous amena à bord le
jeune prince Hassan, fils du prince Salomon qui
demeure dans les environs de Sououksou. Il
avait trouvé cette petite altesse abkhase au bazar
de Soukoum ; ce petit bonhomme qui pouvait
avoir quatorze à quinze ans, attira son attention,
et il lui proposa de lui montrer son vaisseau ;
cela le mit au comble de la joie, et il monta sans
crainte dans la chaloupe avec son serviteur qui
savait un peu le russe. Il fallait voir la mine de
ce demi-sauvage à la vue de l’intérieur d’un vaisseau,
des canons, des boulets ; il fut en admiration
des cahutes qui sont jolies sur le Vestnik et
il avoua que cela valait bien mieux que leur sa-
cle. La première chose qui fixa son attention, ce
furent des pistolets et quelques fusils que le capitaine
avait appendus à la paroi de sa cahute,
et on voyoit que notre petit Abkhase était connaisseur.
Les pistolets surtout lui donnaient dans
1 oeil, et il aurait bien voulu en avoir de pareils.
On lui offrit de l’eau-de-vie, du vin; il en but
comme un homme, se mit à table sans quitter
son plet (1) ; un Abkhase ne va pas sans cela. Il
(t) Fouet de cavalier
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s’amusa beaucoup de sa fourchette, mais mangea
avec ses doigts. Il ne refusa aucun mets, n en
prit que peu cependant. Il se déclara notre ami
et promit de venir nous revoir. Il n’était pas du
tout emprunté et riait lui—même qnand il manquait
à nos usages. Il était vêtu à la tcherkesse
avec le capuchon sur la tête ; ses cartouches, sa
poudrière, ses chaînettes étaient d’argent, avec
des dessins travaillés en bleu.
Chasse de deux galères.
Le 26 juin, l’on apperçut de Soukoum, un peu
avant le coucher du soleil, deux galères abkha-
siennes chargées de monde qui, traversant par
le large de la baie de Soukoum, faisaient force
de rames vers le cap Kodor. Nous reçûmes à
l’instant l’ordre de leur faire la chasse : nous levâmes
l’ancre à minuit après le lever de la lune ;
mais le vent était si faible que nous fûmes toute
la nuit avant de pouvoir doubler le cap Kodor.
(On compte douze milles de Soukoum au cap.)
En doublant le cap le lendemain matin, nous
apperçûmes un petit bâtiment marchand dont
ceux qui le montaient vinrent à nous, en nous
exprimant follement leur joie de notre arrivée.
Car les deux galères les avaient arrêtés derrière
le cap ; les brigands s’étaient jetés sur la cargaison,
avaient blessé plusieurs personnes; déjà ils