Peut-être la Russie parviendra-t-elle à mettre
un frein à ce commerce d’esclaves par le traité
qu’elle a fait avec la Turquie. Tout soldat russe
fugitif qui s’est sauvé en Turquie, tout sujet
russe qui a été amené ou vendu comme esclave
doit lui être rendu. Si les Pachas turcs exécutent
ce traité qui est valable pour eux en sens
inverse, les marchands qui vont acheter des esclaves
en Abkhasie courront de trop grands risques
pour se livrer à ce commerce.
L’Abkhasie actuelle comprend cinq tribus ab-
khases principales :
i° La tribu des Bsoubbes qui de Gagra s’étend
jusqu’à Anakopia ; elle est forte de 18,700ames.
2° Celle des Abkhases proprement dits, de
Anacopi à la Kélassour, forte de 8,100 ames.
3° Celle des Tsébeldiens, renfermée dans
les hautes vallées de la Kodor et forte de
1 5,ooo ames.
4° Celle des Abchaves qui s’étendent de la Ga-
lazga à la Kodor; ils comptent io ,5oo ames.
En tout 52,3oo habitants pour l’Abkhasie.
Je ne compte pas la cinquième tribu, le Za-
mourzakhano qui est sous la dépendance du
prince de Mingrélie.
Tels sont les restes d’ime population qui a dû
être jadis infiniment plus considérable ; mais que
cette vente d’esclaves a diminuée chaque année.
D’ailleurs cette vie de brigandage qui est en
honneur chez les Abkhases entraîne après elle
une complète fainéantise. Rien de plus chétif
donc que leurs misérables huttes de clayonnage
enduites de torchis, dans lesquelles ils vivent
pêle-mêle avec leurs bestiaux. Ils ne soignent ni
prairies, ni pâturages ; ils ne font pas de provisions
de foin, et quand l’hiver est rigoureux, le
bétail, forcé de se retirer dans les forêts, y périt
de misère. Une ou deux vaches sont une grande
richesse pour un Abkhase ; les princes seulement
ont des troupeaux. Les boeufs et les vaches sont
d’assez bonne race, quoique de petite taille.
Leur économie ressemble assez, quoiqu’en laid,
à celle des Tcherkesses ; comme eux ils ont beaucoup
de moutons et de chèvres. La chair des
moutons est bonne, mais la laine est commune.
Le maïs, le millet et une espèce de haricots font
la base de leur nourriture. Aucune industrie.
Ainsi les Abkhases, quoiqu’au sein d’un des
pays les plus fertiles de la terre et avec une belle
position pour le commerce maritime, languissent
dans la plus profonde misère. « Cette misère,
disait M. Paul Guibal dans le n. io 3 du Courier
de la Nouvelle Russie, i 83i , leur a avili le caractère
; ils aiment mieux mendier bassement
que de travailler; ils souffrent de la faim dans le
sens le plus étendu, et dès qu’ils sentent quelque
part le feu d’une cuisine, dès qu’ils voient tuer
un boeuf ou un mouton, ils viennent rendre