même, est tout étonné de les voir assez calmes,
tranquilles, et se distinguant fort peu du reste
des marchands.
Ils ont été attirés, il y a plus d’une centaine
d’années, en Iméreth, où il n’y avait pas de Juifs
auparavant, par les rois ou tzars qui les protégeaient
; ils sont venus d’Ahkaltsikhé. L ’église de
Koutaïs leur a donné un terrain où ils se sont établis
près de la maison du gouverneur moyennant
une rente qu’ils paient à l’exarque. Ils ont
une synagogue fort misérable, où il n’y a que
quelques bancs autour d’une tribune : l’intérieur
est sombre et non plâtré ; du reste, elle ressemble
assez aux synagogues lithuaniennes.
Je parlerai plus bas de leur nom qui, en géorgien,
est un phénomène historique.
Les Géorgiens imérétiens composent la moindre
partie de la population du bazar de Koutaïs.
Pour la plupart, ils sont cantiniers, ou doukhani,
comme on les appelle en terme du pays ; c’est-
à-dire qu’ils vendent du v in , quelques fruits,
des gâteaux, du fromage. Leur boutique ou ven-
dage consiste en deux ou trois grandes jarres de
plusieurs setiers de contenance, murées ou plutôt
enterrées dans de la terre glaise pour les tenir
au frais. Ils puisent dedans avec de grandes cuillers
profondes pour verser le vin dans des gobelets.
Tout le vin se transporte dans des outres
de peau de chèvre, enduites de naphte de bakou
en dedans, ce qui donne au vin un goût particulier
d’amertume, auquel on s’habitue très promptement,
On vend souvent d’assez bon vin à Koutaïs,
et à bon marché; il est rouge et vient de
Bagdad, du Gouriel ou des contrées basses de
l’Iméreth.
Les artisans sont en partie imérétiens.
Outre la cathédrale, desservie par l’exarque,
ils ont encore trois autres églises.
Leur costume est géorgien, excepté qu’au lieu
de bonnet, ils portent un morceau de gros drap
brun, presque circulaire, qui s’attache sous le
menton, et qu’ils appellent koudi : c’est exactement
la forme d’une fronde. Ils repoussent leurs
cheveux derrière la tête, les arrangent bien pour
que leur bonnet soit bien assis. Ils l’ôtenten le tirant
par devant quand ils veulent saluer quelqu’un.
Tous portent des chemises de soie d’une étoffe
jaune écrue, que les femmes fabriquent à la maison
, après avoir soigné elles-mêmes les vers à
soie. On vend au marché de ces petites pièces de
soie, contenant juste ce qu’il faut pour une chemise,
pour 4 à 5 abazes (4 francs de France).
Les plus belles sont un peu plus chères et vont
jusqu’à 6 francs. Les femmes savent teindre cette
étoffe d’ un beau rouge pour leur usage.
La coutume ordinaire de ces peuples est que
quand ils ont une fois endossé une chemise neuve,