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Nous eûmes beau retirer notre capitaine de
son.erreur, il eût beau se frotter les yeux et
croire comme le pilote d’Adoam qu’une image
mensongère les lui avait fascinés, il était trop
tard; nous avions manqué le vent qui nous aurait
menés en quelques heures à Ghélindjik. Nous
lûmes forcés de louvoyer pendant toute la journée,
et cela une veille de Pentecôte, en face de
cette cote inhospitalière. Toute la journée de
la Pentecôte même (*,* - ) se passa à ramer et à
profiter d’un léger souffle du vent qui nous
poussa enfin vers le port.
Mais peu s’en fallut que nous ne fissions une
seconde bévue. ]Nous ne prîmes pas, il est vrai,
le faux Ghélindjik, dont j ’ai parlé, pour le vrai •
nous fumes assez sages pour cela : mais nous
tombâmes à peu près de Scylla en Carybde ; car
nous nous imaginâmes voir le vrai Ghélindjik
dans cette autre anse assez bien marquée et assez
profonde, qui est à l’embouchure de la Mézippé
à 6 ou 7 verst au sud de Ghélindjik. Des navigateurs
trompés comme nous, lui ont aussi donné
le nom de faux Ghélindjik ; il est à droite de l’entrée,
et l’autre à gauche.
Dans le fait, l’entrée de la baie de Ghélindjik
est assez difficile à reconnaître, parce que les
promontoires qui l’embrassent comme deux
bras sont très bas : il n’y avait dans ce temps-là
ni phare ni signaux.
Cependant il y aurait un moyen bien sûr et
bien facile de s’orienter. Dès qu’on a reconnu le
Tatchagus, et qu’on est à sa hauteur, on n’a qu’à
compter sur le rivage, en commençant du pied
du Tatchagus vers le S. E. une bande de neuf
festons pointus, au bout desquels on trouve la
fausse baie. On peut alors se diriger en toute sécurité
vers l’extrémité de la longue bande blanche
qui termine les neuf festons, et qui marque la
gauche de l’entrée de la baie.
Au sud, ou à droite de l’entrée, il y a encore
d’autres festons, mais ils sont arrondis.
Tandis que nous cinglions donc tout droit vers
le deuxième faux Ghélindjik, nous apperçumes
des mâts, dont les corps de vaisseaux nous
étaient cachés : nous crûmes d’abord que c’étaient
quelques bâtimens turcs faisant la contrebande,
et le capitaine jurait deja qu’il en ferait
bonne prise; mais le pavillon russe que nous reconnûmes
nous retira bientôt de notre double
erreur. Nous sûmes où était Ghélindjik.
Nous entrâmes dans la baie à 4 heures du soir
faisant toujours force rames; carie vent nous
avait complètement quittés. Nous laissâmes à
l’entrée à gauche quelques maisons du village
tcherkesse d Atsesboho. Pour notre bienvenue
sur cette côte, nous eûmesle spectacle des six petits
vaisseaux de guerre à l’ancre au fond de la
baie, pavoises en l’honneur de la fête, de pavil