paysage ou la main de Dieu est encore empreinte
comme au jour de la création. Et voir ce paysage
au moment ou le soleil se pion ge dans les bras
de Télhys après une journée brûlante, quand un
zéphyr frais et léger vient ranimer les sens et
réveiller une imagination engourdie, qu’une lumière
colorée vient teindre le paysage et y dessiner
ces longues ombres qui sont comme autant
de mystères où l’homme cherche à pénétrer ; le
voir quand la lune, montant à l’autre extrémité
de 1 horizon, ramene le silence et l’heure des songes
dans ce demi-sombre qui tranche sur sa pâle
lumière ; voir tout cela penché sur le bord d’un
navire qui se balance mollement comme les vagues
qui fuient et étincellent, quel rêve ! . . . O!
pauvre exilé qui peut voir ainsi Gagra et ses murailles
grises fuir devant toi et se perdre comme
un point, au pied du Caucase, quel est ton bonheur
! Puisse ta course ne s’arrêter qu’auprès
des tiens.
Kotoche et vallée de Bsoubbé.
Au S. E. de Gagra, quatre ou cinq faux ravins
dessinent les flancs de la montagne, et à 4 verst
dû fort, l’embouchure remplie de roseaux d’une
petite rivière qui tourne au pied des montagnes,
haut les forêts du pin sylvestre en couronnant les sommités.
marque la limite où commencent les plaines
d’Abkhasie.
Nous longeâmes une côte basse de 18 verst de
long qui se détache toujours davantage du pied
de la chaîne et qui se ter mine par le cap Pit-'
zounda (i). Nous avions devant nous les plaines
à travers lesquelles se promène la Kotoche ou
Bsibba, dont la large nappe brillait à travers les
arbres avant d’entrer dans la mer à 7 verst au
N. O. du cap Pitzounda. Elle colore d’un vert
blanchâtre les eaux de la côte à plusieurs verst
de distance jusqu’à la hauteur de Gagra, et occasione
un courant considérable vers le cap Ard-
ler, tandis que la Kintchouli agit en sens contraire
le long de la côte vers Gagra, où elle
rencontre le courant de la Kotoche qui la fait
virer et l’entraîne. C’est dans ce phénomène qu’il
faut trouver l’origine du nom génois de la baie
de la Kintchouli, Cavo di Giro, baie du tournoiement.
La Kintchouli n’est pas la seule à se porter
vers le N. ; toutes les autres rivières qui se jettent
dans la mer le long de la côte d’Abkhasie
et de Mingrélie, en commençant par le Rior ou
Phase, déterminent, vers le nord-ouest, un Courant
semblable qui agit encore à 15 ou 20 verst
(1) Ce cap s’appelle aussi, sur quelques cartes, cap
Kotoche.