gnages de MM. d’A zza ra et de Humboldt, qui, ayant vu cent fois
le jaguar d’Amérique, l’ont affirmativement reconnu ici, ainsi que
par la comparaison scrupuleuse des individus observés vivans, et
envoyés d’Amérique à notre ménagerie, de ceux que l’on a reçus
empaillés du même pays pour le cabinet, et d’une énorme quantité
de peaux vues chez les fourreurs; j’ai été convaincu, dis-je, que le
jaguar es\, le plus grand des chats après le tigre, et le plus beau de
tous sans comparaison; que c’est précisément l’espèce à taches en
forme d’oeil que les fourreurs nomment généralement panthère et
que Buffon a désignée sous le même nom, la croyant d’Afrique; que
ce n’est point cependant le par dus des anciens, ni la panthère des
voyageurs modernes en Afrique, et qu’en,général il n’y a point en
Afrique de chat à taches vraiment oeillées, ni même aucun chat qui
approche de la grandeur et de la beauté du jaguar.
Fermant remarque déjà qu’il a vu chez les fourreurs de Londres
des peaux venues des établissemens Espagnols en Amérique, et
toutes semblables à la panthère de Buffon ; c’est qu’elles (étaient
effectivement de l’ animal que Buffon a nommé panthère,• mais que
cette panthère de Buffon n’est point la véritable.
Pennant remarque encore que les descriptions de L'aber, de L a
Condamine et d’ U lloa , ne conviennent qua cette panthère, et cela
est très-vrai.
Il ajoute que l’opinion générale des commerçans anglais est que
ces sortes de peaux viennent d’Amérique, et c’est une confirmation
de ce que nous avons reconnu. Les marchands de pelleterie de Paris
l’attestent également.
Mais Pennant conclut de là que l’ espèce est commune aux deux
continens, et en ce point il se trompe; il n’y a pas de ces panthères
oeillées dans l’ancien continent, quoique Buffon l’ait cru et l’ait dit ,
et que Pennant, Schreber, et tous les autres f aient suivi Buffon en
cela, sans autre examen.
Nous-mêmes, à l’arrivée du premier jaguar qui ait .vécu à la
ménagerie , toujours trompés par l’autorité de Buffon et des autres
grands naturalistes, avions cru que c’était .un .animal d’Afrique,
amené pair un batiment qui avait touche aux Antilles, ou bien une
variété de la panthère ordinaire d’Afrique.
Mais on observa dès les premiers jours dans la ménagerie, que la
voix de ces deux animaux différoit essentiellement, celle de la panthère
ressemblant au bruit d’une scie, et celle du jaguar à un aboiement
un peu aigu.
Bientôt après M. Geoffroy reconnut et détermina pour les deux
espèces des caractères distinctifs susceptibles d’une expression précisé
, et les publia dans le Bulletin des Sciences de pluviôse an 12,
et dans les Annales du Muséum, tom. IV , pag. 94-
M. d’Azzara, venu quelque temps après à Paris, y reconnut l’espèce
pour celle qu’il avoit décrite au Paraguay; enfin plusieurs autres
individus ayant successivement été envoyés d’Amérique, soit morts
soit vivans, aucun doute n’a pu nous rester.
Il est juste de faire sentir par cet exemple à quel point les ménageries
ioù l’on peut ainsi rapprocher et comparer des animaux
d’une origine bien déterminée, peuvent être utiles à la science de
la nature.
Le caractère le plus essentiel du jaguar est de n avoir que quatre,
ou tout au plus cinq taches par lignes transversales de chaque flanc :
du reste, ces taches, le plus souvent oeillées, c’est-à-dire en anneau
presque continu, avec un point noir au milieu, sont aussi quelquefois
en simple rose sur certaines parties du corps; elles n’ont presque
jamais une régularité parfaite, et varient pour la largeur etla teinte
plus ou moins foncée du noir, comme le fond pour 1 éclat de sa
couleur fauve; celles qui régnent le long de l’épine sont généralement
pleines et allongées, sur deux rangs en quelques parties, sur
un seul en d’autres; la tête, les côtes, les cuisses et les jambes les ont
pleines, rondes et petites.
Le dessous du corps est d’un beau blanc, à grandes taches noires
pleines, irrégulières; le dessous du cou a des bandes, transversales
noires de différentes largeurs.-
La queue descend jusqu’à terre, mais n’y trame point comme
celles des espèces suivantes. Les taches de l’épine s’y continuent, et
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