
« répondrais-je aux Anglais venant me demander le
«prix de ton sang? Crois-moi donc, n’insiste pas
« davantage pour avoir plus de liberté.
« — Mais, lui dis-je, il n’y a pas le même inconvé-
« nient à permettre à quelques personnes de venir me
« visiter.
« — C’est vrai, répondit-il en souriant, mais reste
« seul, c’est plus prudent. »
Voyant que malgré mes dénégations il me croyait
toujours Anglais et se méfiait de moi, je n’insistai pas
davantage et me retirai assez désappointé ; il s’en
aperçut et me dit d’avoir bon espoir, que l’Émir Dost-
Moliammed connaissait les Anglais, les appréciait ce
qu’ils valent, et lui prescrirait peut-être d’entrer en relations
avec eux : « Et alors, ajouta-t-il, mon concours
pourrait devenir utile et profitable à tous les deux. »
CHAPITRE XXI I I .
Les Siks et les Afghans. —Ligue résolue contre les Anglais.—
Ses ré s u l ta t s .—Politique de l ’Angleter re dans le nord de
l'Inde.’— Envahissements de la Russie et de la Grande-Bretag
n e .—Morale politique des Asiatiques. — Imprudence des
Anglais à Kaboul. — Manière de p ense r des Afghans sur les
Anglais après leur occupation. — Ambition mo s co v ite .—
Conduite des Russes en Pologne. — Leur rêve de domination
universelle. — Pie r re le Grand. — Intervention des
Russes, à Hérat. — Tentatives pour rendre les Turks vassaux
de la Russie. — Administration des Russes dans leurs possessions.
— Malheureux sort des populations chrétiennes
dans la province d’Érivan. — Contraste entre l’Angleter re
et la Russie. —Réflexions sur la conduite de ces gouvernements;
— Dangers que p ré s entent leurs envahis sements
pour les autres gouvernements de l'Europe. — Opinion de
l’auteur sur l ’administration des Anglais dans l ’Inde. —
Tableau statistique des possessions anglaises dans ces pays.
— Les conquêtes de la Russie. — Celles des Anglais dans le
Scinde et le Pindj-âb.—Quelques détails sur les événements
qui ont amené l ’annexion de ces deux Etats. — Article de la
R e v u e des D e u x -M o n d e s sur la mor t du Khan de Khyrpour.
Je rentrai au logis à peu près rassuré sur ma vie,
mais très-inquiet de savoir combien de temps encore
se prolongerait ma captivité. Ce que m’avait ditKou-
hendel-Kban, sur l’alliance des Siks et des Afghans,
me semblait incompréhensible, car de tout temps ces
deux nations, quoique ayant souvent formé un seul
royaume, ont toujours été ennemies irréconciliables;
il fallait donc qu’un grand revirement politique
se fût opéré à Lahor depuis mon départ de Bagdad.