
midi, et à partir avec Méhémed-Réza-Khan pour sa
résidence de Sékoukèh, d’où il devait nous procurer
les moyens de contourner le lac et l’escorte nécessaire
pour nous protéger. Ali-Khan, Ser-Bendi, est,
après Méhémed-Réza-Khan, le chef béloutche le plus
puissant du Sislan. Le district qu’il gouverne est
borné : au Nord par le torrent de Khouspas, qui coule
au N.-E. du lac, et se prolonge presque jusqu’à l’Hir-
mend, dans la direction du Sud ; à l’Ouest, par le pre-
mier canal qui se détache du fleuve pour aller tomber
dans le lac. Cheïkh-Nassour, capitale de ce petit État,
est une vieille forteresse enceinte de murailles en
terre, et contenant environ quinze à dix-huit cents
maisons, un bazar, cinq bains publics, deux caravansérails
et une mosquée. Quelques géographes l’ont
indiquée sur leurs cartes sous le nom de Kedde,
qu’elle a eu ¡autrefois, à deux farsangs au Nord du
Khacli-Roud et de Pir-Kisri. C’est la première ville du
Sistan, du côté du Nord. Les possessions de Méhémed-
Réza-Khan sont comprises dans le triangle que dessinent
le lac du Sistan, à l’Ouest et au Nord, et 1 Hir-
mend, dans le coude qu’il décrit depuis Trakou jusqu à
la jonction de son premier canal, vers le Noi’d, à la
pointe orientale du lac. Djiàne-Abad, où nous nous
trouvions, fait partie de ses possessions. C est une petite
forteresse qui renferme près de cent cinquante
maisons, habitées par des gens reconnus dans la
contrée comme Pehlevànes (héros, guerriers, athlètes)
et descendants du fameux Roustem. Soit que cette
tradition exalte leur bravoure, ou bien que leur vaillance
soit effectivement excessive et impose à leurs
voisins, ils ont la réputation de ne reculer devant
aucun danger, et d’attaquer leurs adversaires sans
en calculer le nombre, fussent-ils cent contre un. Ils
comprennent la langue béloutche, mais ne la parlent
point. J’ai reconnu beaucoup de mots persans dans
leur idiome, qu’ils prétendent être le pehlevi des anciens
Perses. Un vieillard me montra un livre écrit
en caractères usités avant l’ère musulmane. C’est
peut-être là qu’on pourrait trouver la clef de tant de
dialectes perdus ’.
Djellal-Abad.—30 octobre.—A midi, les deux chefs
béloutches se ' séparèrent : Ali-Khan retournait à
Cheïkh-Nassour, après avoir obtenu de son voisin une
promesse de neutralité dans la guerre qu’il soutenait
contre le chef de Lâch-Djouï-waine. Méhémed-Réza-
Khan se dirigea, accompagné par nous, vers Djellal-
Abad, qui porte aussi le nom de Behrami, de son fondateur
Behram-Khan, Kayani ; c’est encore une petite
forteresse en terre, renfermant cent maisons de roseaux,
où commandait, au nom de Méhémed-Réza,
Abdullah Khan, Norvui. Cette place forte est située
au Sud-Ouest de Djiàne-Abad, à quatre farsangs et
demie du lac. Les ruines dont elle est environnée indiquent,
il est vrai, qu’elle eut autrefois un dévelop-
» Si le manuscrit dont il est ici question est vraiment pehlevi,
on peut le considérer comme un véritable trésor. On assure que
certains Ghèbres, qui résident dans une île située au milieu
du lac du Sistan, possèdent aussi des manuscrits très-anciens;
mais, après certaines recherches, on a été porté à croire que
c’était là une fable. Sir Edward Conolly alla lui-même visiter
cette île et n’y trouva absolument rien de semblable.—Ed.