n’avait pas grand chose à craindre de la conjuration,
même générale de tous lés États situés au Nord et
à l’Ouest de ce grand fleuve : la tactique européenne
devait toujours finir par l’emporter, comme cela
arriva en définitive, L’Angleterre prit alors possession
des contrées que la révolte du Moultan avait
fait envahir à son armée, et les convertit en provinces
anglaises , dont après trois années de sage
administration, elle doublera les 40 millions de re venu
qu’elles avaient rapportés jusque-là.
Ce n’est pas seulement sous le point de vue financier
que cette conquête profitera à la Compagnie des
Indes; elle en retirera dorénavant les plus grands
avantages au point de vue politique, militaire, commercial
et géographique.
Si cet aperçu simple et sommaire des événements
qui ont mis fin à l’indépendance du Pindj-âb,peut
amener le lecteur à consulter les documents plus
complets à cet égard publiés par la presse britannique,
il se convaincra bien vite que l’Angleterre
préparait l’annexion de ce pays à ses possessions de
l’Inde depuis bon nombre d’années. Ce fut d’abord
sous des apparences très-amicales que sa diplomatie
s’installa près du vieux Rindjit ; elle le caressa, le
soutint dans ses différends avec les Afghans, et, à
titre d’alliée, prit racine dans ses États pour en préparer,
par d’habiles et secrètes menées, l’envahissement
futur, qui devait entraîner aussi celui des provinces
spoliées par lui avec leur assentiment (Pe-
chaver, Moultan, etc.). Si les armées de la Compagnie
n’en prirent pas possession à la mort du Maharadjah,
c’est qu’elles avaient alors de la besogne outre mesure
en Chine et en Afghanistan ; mais la patience rie
manque pas aux Anglais, et iis savent en user pour
mieux assurer leurs couquêtes.
En attendant l’accomplissement de celle qu’ils projetaient
sur Lahor, le résident britannique sut habilement
répartir et faire peser son influence occulte
sur tous les partis, et exciter d’un côté ce qu’il empêchait
de l’autre. Il divisa les chefs et les amena à ses
vues sans paraître se mêler en rien de leurs affaires ;
enfin,il n'y eut pas même jusqu’à cette furibonde haine
des Siks contre les Anglais qu’il n’eût essayé de raviver
quand elle paraissait faiblir, en la faisant tourner
contre les divers Maharadjahs qui se succédèrent, par
l’intérêt et l’appui qu’il sembla toujours vouloir leur
donner. En agissant ainsi, par l’intermédiaire de son
ag en t, la Compagnie savait très-bien être dans la
meilleure voie pour amener une scission entre elle
et les Siks, et de cette lutte devait surgir, comme elle
le savait d’avance, en premier lieu, sa médiation et sa
protection dans le Pindj-âb, entraînant avec elle la faculté
de disposer d’une nombreuse et vaillante armée,
déjà façonnée à la tactique européenne ; de contrôler
en souveraine tous les actes du gouvernement et
d’exiler la reine Chauda à Bénarès lorsqu’elle s’y
opposerait. Quand l’irritation du peuple augmenta
et amena les conspirations, la Compagnie laissa faire,
car elle avait eu le temps de terminer ses préparatifs
pour transformer la protection en envahissement permanent.
Enfin la révolte eut lieu et les bataillons
anglais arrivèrent pour la réprimer; ils se firent