
seulement quelques guenilles, ces gens-là sont capables
de courir tous les dangers lorsqu’il s’agit de'
s’emparer de plus grandes valeurs, et, dès lors, ils
ne s’arrêteraient devant aucun crime pour atteindre
ce but.
Mahmoud-Abad.— 1er août. - 12 farsangs de distance.
La première moitié du chemin se fait dans les
montagnes et le reste en plaine.
Je partis au point du jour, conduit par un piéton de
Wachiiysuccesseur de Djabbar-Khan; mais au lieu
de prendre la route directe de Biabanak *, ce nouveau
guide la laissa sur la gauche et nous engagea dans
celle de droite à travers des montagnes rocailleuses,
accidentées et très-difficiles, en m’objectant, pour justifier
ce changement de direction, que le bruit de mon
arrivée s’étant répandu, des voleurs pouvaient s’être
embusqués sur la route de gauche pour me dévaliser.
J’eus la bonhomie de le croire, et je n’aurais pas dû le
faire en voyant une caravane s’engager dans le chemin
ordinaire au moment où nous nous en éloignions.
En marchant avec elle, nous n’eussions certainement
rien eu à craindre ; mais je ne fis pas dans le moment
la moindre réflexion à ce sujet; je m’en avisai seulement
deux heures après. Nous étions alors dans un
lieu encaisse dont le sol était hache et très-tour-
menté; mon guide paraissait inquiet et regardait
de tous côtés comme un homme désorienté, ou cherchant
quelque chose; tout à coup il s’éloigna rapide*
Ce mol veut dire le petit désert. Les Anglais avaient établi
un poste dans cet endroit, ainsi qu’à Wachir, pendant leur
guerre contre ies Afghans.—Ed.
ment en franchissant les rochers et les ravins avec
l’agilité d’une gazelle, tandis que sur notre gauche
accouraient, en poussant des cris féroces, dix coquins
armés de piques, de sabres et de boucliers. Je jetai
aussitôt les yeux sur Ahmed et sur Ali, cherchant
à scruter leur pensée, mais, à la peur empreinte sur
leur physionomie, je demeurai convaincu de leur
ignorance de ce guet-apens; ils craignaient autant
pour leur vie que moi pour la mienne. Ce point une
fois éclairci, j ’embrassai vivement de l’oeil la localité;
à cinquante pas en avant se trouvait une petite éminence
rocheuse où je me portai au galop, suivi de
mes deux domestiques et déterminé à faire une défense
désespérée. Le hasard nous servit à souhait, car
cette position ne pouvait pas être tournée et l’on n’y
parvenait que par le seul chemin qui nous y avait
conduits. Un moment après, nos adversaires s’étaient
assez rapprochés pour nous permettre d’apprécier leur
nombre et leurs moyens d’agression ; ils n’avaient heureusement
que des armes blanches et pas d’armes à
feu; nous, au contraire, nous étions bien pourvus de
ces dernières. Ali avait son fusil de munition, je donnai
mon fusil à deux coups à Ahmed et réservai pour moi
une paire de pistolets à six coups. Nous-avions donc
quinze balles à envoyer à nos assaillants, mais ils ne
s’arrêtèrent point devant ce danger, et s’avancèrent
résolûment sur nous, quand ils eurent vu un premier
coup tiré par Ali n’atteindre aucun d’eux. Mais les
deux décharges d’Ahmed ayant été plus heureuses et
se voyant menacés par moi, ils s’arrêtèrent un instant,
pendant lequel nos armes furent rapidement rechar