
battre d’abord, mais ils finirent par remporter une
victoire ; ce fut la meilleure, celle qui leur assura la
possession du pays. En pareille matière, la chose
n’est pas plus difficile que cela, car tout vient à
point à qui sait attendre, et l’Anglelerre a prouvé
qu’elle le savait admirablement '. C’est surtout à cette
vertu et à son système renouvelé des Romains, diviser
pour régner, qu’elle doit d’avoir asservi tour à
tour Mongols, Mahrattes, Béloutches, et tant d’autres
i Les idées de M. Ferrier sont très-naturelles tout en étant
fort peu exactes. 11 y a des Anglais dans l’Inde qui agissent par
des motifs tout autres que ceux que leur attribue M. Ferrier. Le
résident de Lahor n'était pas un homme à user de son influence
dans le but supposé par M. Ferrier. 11 agissait avec toute loyauté
dans l’intérêt des deux gouvernements et était loin de désirer
l’annexion du pays, tout en trouvant qu’on ne pouvait éviter une
pareille mesure et qu'il était impossible de conserver sans c la le
gouvernement indigène. Sir H. Lawrence fut prié par ses
amis de ne pas résigner ses pouvoirs pour rentrer dans son régiment
comme capitaine d’artillerie. 11 resta donc à Lahor presque
dans le seul but d’employer son influence à amener les
chefs du Pindj-âb et le peuple à accepter notre domination. Nos
soldats du Moultan, de Ramnagguer et de Tchilliàn-Walla, donnèrent
aussi leur vie pour soutenir l’autorité anglaise et cela avec
la meilleure foi du monde, bien que par la volonté de la Providence
ils n’aient pas obtenu d’abord les succès ordinaires à nos
armes. Ce fut seulement lorsque tous les hommes influents du
Pindj-âb à l’exception de deux, comme le disait Chir-Sing, lui
eurent fait des ouvertures, que lord Dalhousie s’étant assuré qu’il
était de toute impossibilité de maintenir le gouvernement indigène
par les moyens jusque-là employés, livra la bataille de
Goudjerate et força l’annexion du Pindj-âb. Qui pourrait douter
que ce résultat a été salutaire à cette province et à l’Inde, et
qu’d le deviendra bien plus encore avec l’aide de Dieu ?—L.
nations indiennes dont les richesses sont passées chez
elle.
La conquête du Pindj-âb a admirablement complété
la succession de ses envahissements et lui
assure la domination du plus bel empire du monde;
il serait peut-ê tre sage à elle de s’en contenter
tel qu’il est aujourd’hu i, mais le pourra-t-elle? Un
torrent fougeux s’arrête-t-il au milieu de son cours,
s’il ne trouve pas d’obstacle ? Tel est le torrent
britannique : descendant du haut de l’Hymalaya
il submergera encore le Népaul, les Birmans, la
Chine et ses annexes; tournant ensuite à l’Orient, il
viendra de nouveau inonder l’Afghanistan et planter
ses jalons dans la citadelle de Hérat. Peu importe aux
autres États européens cette vaste extension territoriale
prise par l’Empire britannique : on a tant répété
qu’il croulerait sur lui-même, soit par l’effet de la
révolte, soit par celui de la banqueroute, que tout le
monde a fini par y croire. Aveugles que vous êtes,
vous voulez voiler votre insouciance par des espérances
chimériques. Eh bien! je vous le prédis, cette
insouciance vous coûtera sinon la liberté, car 1 Angleterre
l’aime et la pratique, du moins votre puissance,
votre indépendance politique, et vous subirez
la loi que vous n’avez osé imposer à ce colosse envahisseur.
11 se partagera le monde avec cet autre
colosse1.
1 Le général Ferrier semble avoir oublié l’Amérique en
écrivant celte prophétie de l’histoire à venir.
(Note de l'Editeur anglais.) ,