
tentes étaient dressées autour de ce jardin. L'on nie
conduisit »à celle du Serdar Habib:UUah-Khan, désigné
par le Yézir Salieb pour me recevoir. Ce chef était
frère du Mollah Mahmoud, gouverneur de Ferrah, et
je l’avais rencontré dans le district de Gour, faisant
la guerre aux Téhimounis. Son accueil fut très-amical.
Au moment où j ’arrivai il était en compagnie du
Serdar Hadji-Fethi-Klian, cousin de Yar-Méhémed-
Khan, que je n’avais point vu à Hérat lors de mes
deux premiers passages par celte ville, parce qu’il
était alors en pèlerinage à la Mecque. C’était d’abord
chez lui qu’avait voulu me loger le Vézir-Saheb, mais
il s’était ravisé dans la crainte que son cousin, qu’il
soupçonnait d’être dévoué aux Anglais, ne machinât
quelque chose avec moi contre ses intérêts.
Ce Serdar était un beau jeune homme d’un abord
poli et de manières très-distinguées, qui n’avait rien
de l’aspect farouche et brutal de ses compatriotes.
Ce contraste avec eux tenait à ses fréquentes relations
avec les Européens. En 1836-37, il avait été chargé
par Châh-Kamràne de remplir uqe mission diplomatique
à Téhéran, et avait passé presque tout son
temps, dans cette vil'e, au milieu de la diplomatie
européenne. Récemment encore, en allant et revenant
de la Mecque, il avait traversé l’Inde anglaise,
où les principales autorités lui avaient fait l’accueil
le plus honorable. Des navires français se trouvaient
dans le port de Bombay à l’époque où il
y résida, et les relations qu’il entretint avec leuis
ofticiers lui donnèrent la plus haute idée du caractère
et de la puissance de notre ijation. Il avait
même acheté nos produits de préférence à ceux des
manufactures anglaises, notamment des fusils, des
montres et des étoffes de soie, parce qu’ils les trouvaient
aussi bons et à meilleur marché. Napoléon et
ses illustres lieutenants, qu’il connaissait pour la plupart
par leurs noms, fournissaient un texte inépuisable
à ses discours. 11 savait les ariimer par des appréciations
très-justes et les colorait de toutes les images
saisissantes et originales que renferme la langue persane.
Ayant appris par Assad-Khan la détresse et la
pénurie où m’avait plongé l’avidité du Serdar
Méhémed-Sédik-Khan, il me fit les offres de service
les plus obligeantes. Gomme les Asiatiques sont très-
prodigues de ces sortes de propositions, sans les tenir
jamais, je pris d’abord les siennes pour une simple formule
de politesse. Mais'j’avais tort, car, joignant l’exécution
aux promesses, il m’envoya, aussitôt après
m’avoir quitté, trois dent cinquante francs en or, un
habit afghan complet, trois chevaux, un fusil et une
montre. Outre ces présents, il me rendit mille petits
services pendant tout le temps de mon séjour à Hérat.
« C’est, me disait-il, un devoir pour moi d’agir ainsi
« après les politesses que j ’ai reçues des Anglais dans
« l’Inde; ils sont Européens, les Français le sont
« aussi, et c’est tout un. »
Du 16 au 26 novembre. — Le lendemain de mon
arrivée, j ’allai voir Yar-Méhémed-Khan, et son accueil
fut poli et bienveillant, comme par le passé. Après
avoir écouté avec attention le récit de mes vicissitudes
dans le Kandaliar et le Sistan, il laissa éclater son
indignation contre la conduite des Serdars de Kan-
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