
l'exhaussement du sol, il sc répand dans le vaste
entonnoir qui forme à son extrême limite, au Sud, le
Méchilèh-Sistan1 ou lac du Sistan. Plusieurs îles habitées
et possédant des forteresses, comme Kaléhi-Bist,
se trouvent au milieu du cours de l’Hirmend, dont l’aspect
d’un bout à l’autre est pittoresque et majestueux;
il est aussi contenu dans divers endroits par des
digues d’une très-ancienne construction, dont le manque
de soins et de réparations ont hâté la ruine. La
végétation sur ses bords est aussi luxuriante que sous
les tropiques; malheureusement ils sont habités par
les plus grands pillards et les gens les plus cruels de
toute l’Asie. Les eaux de ce fleuve sont claires, froides,
de très-bon goût, et, bien qu’on en tire une grande
partie pour les irrigations, il en reste en tout temps
suffisamment dans son lit pour la navigation, si on
voulait la pratiquer, même en grand, depuis Girishk
jusqu’à son embouchure. Afin d’obtenir ce résultat,
il en coûterait fort peu pour réparer et élever de
nouvelles digues. En hiver et au printemps, son
volume d’eau se décuple, il sort alors de son lit et
inonde la campagne qu’il vivifie.
Si l’Hirmend appartenait à des Européens, des bateaux
à vapeur y seraient établis, e t, à défaut de
houille, ils pourraient se servir, comme combustible,
des bois de tamariscs, de saghès et de tag qui l’avoisi-
nent. Telle est l’étendue de ces forêts, qu’en en ré glant
sagement les coupes, elles deviendraient inépuisables.
Son courant est très-rapide, surtout en hiver,
i Méchilèh veut dire en langue arabe, mardis fangeux. Le
nom ordinaire du lac est Slamun.—Ed. 1
après la crue des eaux. Sa largeur d’une berge à l’autre
varie beaucoup dans la partie supérieure de son
cours, au dire des Hézarèhs; à Girishk elle est de
soixante à quatre-vingts mètres; mais à partir de sa
jonction avec l’Urghend-âb, elle se développe jusqu’à
trois cents, et même trois cent cinquante mètres.
Sa profondeur est en moyenne d’une brasse et demie
à deux brasses et les gués sont peu nombreux pour
le traverser; cependant les bateaux y sont rares et
grossièrement travaillés. Les radeaux faits avec des
roseaux et des branchages, soutenus par des outres1
gonflées de vent, y sont plus communs. Les historiens
d’Alexandre ont peut-être fait erreur en disant que
les radeaux sur lesquels ce héros traversa les fleuves
de l’Asie étaient supportés par des outres remplies de
paille. Elles étaient sans doute alors, comme aujourd’hui,
gonflées de vent, et c’est ainsi qu’on navigue
encore sur l’Euphrate, le Tigre, le Karoun, l’Oxus et
autres fleuves de l’Asie centrale. Les probabilités
sont aussi que Craterus, en quittant Alexandre, suivit
le cours de l’Hirmend pour rentrer en Perse avec
les gros bagages et les invalides.
L’Aria-Palus des anciens, lac formé par l’accumulation
des eaux de l’Hirmend, à l’extrémité méridionale
de son cours, est appelé lac Zerrèh2 par les Euro-
1 Sur la rivière de Kaboul et sur le liaul du lleuve Indus, il
est d’usage de remplir ces outres de roseaux et de paille. II
est fort ordinaire de descendre de Djellal-Abad à Attock sur des
radeaux construits de cette façon.—L.
2 Zerrèh qui est le nom sous lequel est mainletnent connu le
lac,est une contraction de Zarangæ, l’ancienne capitale, et ce nom
se rappoite aux Zarangéens ou aux Dranghes des Grecs. — Ed.