
entre ce souverain et les Béloutches nomades qui
viennent s’y établir pendant les huit mois de l’année
où la sécheresse les exposerait à manquer d’eau dans
les oasis du désert, car les puits n’y sont alimentés que
pendant quatre mois par les pluies de l’hiver et celles
du printemps. Deux chefs béloutches indépendants et
un chef afghan se partagent le reste du Sistan. Ce
sont : au Sud, Méhémed-Réza-Khan de Sékoukèh ; au
centre, Ali-Khan de Cheïkh-Nassour, et au Nord
Châh-Peçend-Khan de Lâch-Djouï-waine. On ne voit
de maisons en terre et de huttes en roseaux que sur
les bords de l’Hirmend; partout ailleurs les habitants
campent sous des tentes de feutre, ou tissées en poil
de chèvre et de chameau. Les chaleurs sont toujours
excessives dans le Sistan. Le Simoun y souffle fréquemment
et soulève des nuées de sable impalpable
qui fatigue beaucoup les yeux; c’est là, avec les
énormes moustiques dont j’ai parlé plus haut, le plus
grand inconvénient de cette contrée.
L’histoire de cette province est très-intimement
liée à celle de la Perse, et ses habitants sont fiers
d’appartenir à la contrée qui a vu naître le roi
Djemchid et les héros Zal et Roustem, sur lesquels les
auteurs orientaux ont écrit les fictions les plus extravagantes.
Le nom de Sistan, sous lequel cette province est
aujourd’hui connue, vient originairement du mot
Saghès, dénomination d’une qualité de bois à brûler
bien connue actuellement en Perse comme étant supérieure
à toute les autres espèces, et qui y est fort recherchée.
Elle se trouve fréquemment dans les steppes
de l’Asie centrale, mais plus abondamment encore
dans les environs de l’Hirmend ; c’est ce qui a fait
donner au pays que traverse cette rivière le nom de
Saghès-Tan (lieu du saghès), dont, par corruption, on
a fait un peu plus tard Sedjeslan, puis Seïstan et enfin
Sistan, dont on se sert presque généralement aujourd’hui.
Cette étymologie m’a été donnée comme étant
la seule véritable par le savant Kazi de Hérat, Mohammed
Hassan *.
L’Etymander des anciens est un beau fleuve (le
seul auquel on puisse donner ce nom en allant directement
du Tigre à l’Indus), connu aujourd’hui par les
Afghans sous le nom d’Hirmend. Après s’être formé
de divers petits ruisseaux venant du Kouhi-Baba,
situé à peu de distance et à l’Ouest de Kaboul, il coule
du Nord-Est au Sud-Ouest sur une longueur de près
de deux cents farsangs. D’abord dans un lit profond,
encaissé et obstrué par d’énormes blocs de rochers>
il traverse la monlueuse contrée de la Paropamisade,
habitée par les Hézarèhs-Poueht-Kouhs; mais à dix ou
douze farsangs au-dessus de Girishk il commence à
rouler sur un lit de sable et de gravier, dans des limites
moins resserrées, sur un terrain plat, et alors il est
utilisé peur arroser les cultures et les prairies dont ses
bords sont couverts, jusqu’au moment où, arrêté par
1 Celte érudition peut servir d’exemple de celle des kadis
de l’Orient. Ce brave homme n’avait jamais sans doute entendu
parler des Sakes et de leurs migrations. Toutefois, il est prouvé
que le Seghistan des Arabes (d’où vient le nom de Sistan) est
le môme pays que le Sakestao, autrement dit la contrée des
Sakes ou des Grecs. - Ed.