
dont le résultat devait être une trame hostile à la dynastie
des Méhémedzéhis. En conséquence, il prescrivait
de me renvoyer à Hérat. Il recommandait toutefois
d’avoir des égards pour moi, tout en observant mes
démarches; de réprimer toute tentative d’agitation de
ma part, sans pourtant s’écarter des devoirs de l’hospitalité.
Kouhendel-Khan, contrarié d’une décision
qui dérangeait ses projets d’alliance avec les Anglais,
n’en avait d’abord tenu aucun compte, et, s’autorisant
des tendances particulières exprimées par Dost-Mo-
hammed, il avait résolu de me diriger sur Chikar-
pour avec ses propositions écrites pour la Compagnie
indo-britannique. Mais suivant l’incroyable coutume
des Afghans de ne rien tenir secret, il avait montré la
lettre de son frère à plusieurs personnes, et les avait
initiées à ses vues. Les Serdars et les Mollahs, secrètement
prévenus, lui firent d’abord des représentations
tendant à le détourner de ses desseins. N’ayant
pu le faire fléchir, ils excitèrent alors le peuple contre
moi et j’ai déjà dit ce qui en était résulté.
Kouhendel-Khan et plusieurs chefs influents, tenant
son parti, avaient vainement représenté aux Mollahs
insurgés qu’en restant en état d'hostilité contre les
Anglais, ou en m’égorgeant comme ils le voulaient,
c’était exposer le Kandahar à une nouvelle invasion
britannique. Mais ces gens ne voulurent rien écouter
et se retranchèrent derrière le passage du Koran qui
défend aux musulmans de s’allier aux infidèles. Ils
ajoutèrent ensuite : « Donner passage sur notre ler-
« ritoire à celui-ci, c’est encourager d’autres voya-
« geurs, dont les menées peuvent nous devenir fatales,
« à venir chez nous; nos intentions sont donc irrévô-
« cables : il mourra! » La crainte de perdre leurs
privilèges rendait ces Mollahs audacieux. Ils se les
étaient vu retirer, sous la domination anglaise, qui
avait ainsi annihilé leur influence, et ils voulaient
à tout prix empêcher le retour d’un pareil préjudice.
En outre, depuis quelques jours, le bruit était généralement
accrédité parmi eux, que les Anglais venaient
d’êlre complètement battus par les Siks et les
Béioutches; l’Inde, disait-on, était insurgée d ’un
bout à l’autre, et ils ajoutaient foi à mille autres
bruits qui concordaient avec leurs secrets désirs : tout
cela les stimulait à la résistance. Kouhendel-Khan,
mieux informé qu’eux, savait très-bien à quoi s’en
tenir sur cette défaite et sur la révolte, et il défendit
ma vie, bien plus pour s’en faire un mérite aux yeux
de ceux dont il me croyait le concitoyen, que par
intérêt pour ma personne, qui lui était sans doute
très-indifférente. Cependant il n’osa point m’envoyer
à Chikarpour, dans la crainte de s’attirer la colère
de Méhémed-Akbar-Khan, parfaitement sûr que si Ce
neveu, passablement brutal, n’avait été retenu par
son père, à diverses reprises, il aurait depuis longtemps
envahi le Kandahar pour le réunir au Kaboul ;
il était donc prudent de sa part de ne rien faire qui
pût servir de prétexte pour le déposséder, et sa rupture
avec les Mollahs était un fait qui l’accusait déjà
assez sans qu’il fût besoin de persévérer dans son
projet primitif de m’envoyer dans l’Inde, projet dont
il aurait eu probablement à regretter les suites. Ce