
Nader est une des plus fortes positions de la Perse.
Le camp du Salar était alors établi un peu au delà de
Koutchan, et, le 9 décembre, je m’acheminai dans
cette direction accompagné de mon domestique et
d’Islam-Beg, serviteur du gouverneur général. En
vertu d’un ordre dont ce dernier était pourvu, nous
changions nos chevaux fatigués dans les villages situés
sur notre passage et nous avancions rapidement, au
galop, traversant tour à tour des vallées et des montagnes,
çà et là cultivées, mais la plupart en friche,
De nombreuses ruines se dressaient de distance en
distance dans toutes les directions ; des villages fortifiés
s’échelonnaient de loin en loin, entourés de vergers
et arrosés par de forts courants d’eau. Nous rencontrâmes
les places de Tchinaràne et d’Émir-Abad *.
La rapidité de notre course, faite en partie la nuit,
m’empêcha de recueillir des renseignements sur le
pays. Au bout de vingt-quatre heures nous étions à
Koutchan, et l’on nous y informa du départ du Salar,
Il avait levé son camp l’avant-veille pour se rendre
à Dereguez. Nous étions alors séparés de lui par un
pays au pouvoir des insurgés, et il était impossible à
trois hommes isolés de s’y aventurer sans danger.
Ayant en outre appris que le fils d’Assaf se porterait
t Le siège de cette place en 1832, pendant la campagne
d’Abbas-Mirza dans le Khorassan est resté fameux dans le pays.
Un sergent anglais , nommé Hayward , aux ordres du colonel
Shee , y fut tué. Les troupes persanes avaient pour chef le
colonel Sheè et le général Burowski. Ce dernier périt au siège
de Hérat, sur les remparts, et l’on échangea sou cadavre avec
Fethi-Jihan pour quelques moulops. — Ed.
directement sur Kélat, sans revenir sur ses pas* je
retournai à Meched après un séjour de vingt-quatre
heures à Koutchan. Dé Meched je pouvais me diriger
plus facilement et avec plus de sécurité sur Kélat;
mais Assaf était tellement malade de la goutte qu’il
me fut impossible de le voir. Prévoyant la longueur
du blocus et désirant me rendre à Téhéran avant le
retour des rigueurs dé l’hiver, pour me reposer de
mes fatigues, je lui écrivis aim de lui demander la
permission de partir, ce qu’il m’accorda avec la plus
grande bienveillance.
Le 18 décembre, un certain Mirza-Ibrabim m’ayant
fait appeler, de la part du gouverneur général, me lut
un billet de ce dernier où il s’excusait, vu son état
maladif, de ne pouvoir recevoir ma visite d’adieu :
il me prévenait qu’il avait ordonné de me faire
accompagner par deux cavaliers jusqu’à la frontière
du Khorassan. Un taliguèh (ordre), pour me faire
délivrer, dans tous les gîtes, jusqu’à Téhéran, des
viyres pour cinq hommes et dix chevaux, devait aussi
m’être remis. Ce fut tout ce que me communiqua le
Mirza; il avait pourtant reçu l’ordre de me faire payer
cinquante tomans (six cents francs) de gratification
à titre dp récompense pour mon voyage à Koutchan;
mais cela ne faisait point son compte : il avait espéré
garder pour lui la plus grande partie de cette somme.
Cependant, à son air embarrassé, à ses maladroites
insinuations, j’avais soupçonné ce généreux procédé
d’Assaf - Dooulet. Mirzà-Ibrahim m’engageait à lui
éçrjrç poyr lui demander d’accompagner l’allocation
de vivres d’un don en argent. Une pareille démarche