
drait alors appuyer plus à droite, gagner Sebzavar,
suivre les cours du Herroud-Roud, de l’Hirmend et
de l’Urghend-âb, pour arriver jusqu’à Kandahar.
Dans le cas où l’armée prendrait cette route, il serait
facile d’assurer sa subsistance dans les districts
mêmes traversés par elle. De cette dernière ville à
Chikarpour, il lui faudrait franchir des steppes déserts
et la passe de Bolâne ; mais il y aurait beaucoup
plus à descendre qu’à monter dans ce trajet, et
ses difficultés, que je n’ai pu apprécier moi-même, ne
doivent pas, dans tous les cas, être très-sérieuses.
C’est là ce que prouve suffisamment la marche victorieuse
de l’armée anglaise sur Kandahar, en 4839 :
elle avait à monter la passe et les Russes n’auraient
qu’à la descendre.
Les Anglais considèrent avec raison l’Indus comme
la meilleure ligne de défense de leurs possessions de
l’Inde; mais serait-il u n obstacle suffisant pour arrêter
l’ennemi? Il est presque permis de se prononcer
pour la négative. Quand les Russes seraient arrivés
jusque-là, il deviendrait sinon impossible, du moins
très-difficile de les empêcher de franchir ce fleuve.
Deux points sont aujourd’hui signalés à l’attention des
militaires comme offrant seuls les facilités nécessaires
pour opérer ce passage : Attock au Nord, et Sakkar-
Bakkar au Sud. Il suffirait donc d’élever sur ces
deux points des fortifications importantes, pour
arrêter l’ennemi ; mais les Russes connaissent aussi
hien que les Anglais la possibilité de traverser l’In-
dus dans d’autres endroits, malgré sa largeur, la
rapidité de ses eaux et l’escarpement de ses berges.
11 n’est nullement besoin d’équipage de pont pour
cela, il suffit d’avoir quelques charges de mulet
de peaux à outres (mechk), propres à la navigation,
avec lesquelles on peut construire, en une heure, une
quantité de radeaux suffisante pour transporter l’armée
russe sur la rive gauche du fleuve. Ces endroits
ne sont pas rares, on peut les choisir sur une longueur
de 360 kilomètres, et pour n’en citer que
deux, j ’indiquerai d’abord celui au Sud d Attock, sur
le prolongement des roules de Ghaznèh et de Kanda har;
et ensuite la passe de Dèrrè-Ismaël-Khan, doù
l’on peut gagner à volonté Trimo ou Moultan. Mais ce
qui empêcherait sans doute les Russes de choisir cette
dernière, c’est qu’après avoir franchi 1 Indus, il leur
resterait encore à passer les rivières du Pindj-âb (les
cinq rivières). Mieux vaudrait donc pour eux tra verser
le fleuve au-dessous de leur confluent, à la
passe de Dèrrè Ghazi-Khan 1 ; ils descendraient de là
dans le Scinde et le Goudjerate, et entameraient
l’Empire britannique des Indes de ce côté, en donnant
la main aux populations mécontentes qui saisiraient
avec empressement cette occasion de se révolter,
quitte à exterminer plus tard leurs nouveaux
alliés.
Il serait très-avantageux à la Russie de posséder
Khiva, Bokliara et Balkh, avant de se lancer dans
t Les seuls endroits par lesquels l'artillerie puisse s’avancer
soni les passes de. llolâne, siluées au Sud, et de Bunnou et
Khvber, vers le Nord. Celles de Dèrrè Ismaël-Khun et Dèrrè-
Ghaai-Khan, quoique suivies par les caravanes, ne sont point
praticables pour une armée.—Ed.