
ruine est déserte et son aspect seul indique une haute
antiquité. Les habitants du pays croient qu’elle est
antérieure à la conquête d’Alexandre. Ne pouvant
préciser son origine, ils ont fabriqué sur elle une légende
ridicule^ la voici : cette ville a été construite
par des femmes d’une taille gigantesque, protégées
par des génies. Après avoir tiré race de leurs époux,
elles les sacrifiaient sur l’autel d’un dieu sanguinaire,
dont 1 appétit était très-exigeant. Le grand Roustem,
voyant avec peine la population mâle de son pays décimée
par elles, mit un terme à leurs cruautés ; il les
attaqua seul, mit les génies en fuite, les fit captives et
les transporta dans son île du Sistan, où elles ne
purent désormais faire de mal à personne. Depuis
cette époque, Sabah n’a jamais été habitée. II est toujours
arrivé malheur à ceux qui s’y sont établis.
Pour arriver à la nouvelle ville de Sebzavar, il faut
traverser de nouveau la rivière, à l’endroit où elle
forme un coude, en suivant le pied des montagnes
qui bornent au Sud la plaine où elle est située. C'est
une très-petite forteresse, la moitié moins grande que
Ferrah, et construite sur le même plan que celle-ci.
On peut en faire le tour à pied en dix-huit ou vingt
minutes. Elle renferme une centaine de maisons et un
petit bazar. Ce doit être la citadelle d’une ville assez
considérable, aujourd’hui détruite, et représentée par
des faubourgs d’une grande étendue envahis par lés
décombres ; des jardins, de vastes cultures entourant
des villages et campements de nomades, se trouvent
tout autour dans diverses directions. Les eaux y sont
amenées du Sebzavar-Roud par de nombreux eanaux,
défendant eux-mêmes les approches de cette
forteresse, qui est un des anneaux de la ligne stratégique
qu’une armée russe ou persane, voulant s’avancer
dans l’Afghanistan, devrait prendre comme
base d’opérations pour se donner des chances de succès.
On confond souvent dans l’histoire, la ville de
Sebzavar dont il est ici question, avec celle de Sebz-
Var, située près de Nichapour en Khorassan. C’est dans
la citadelle de Sebzavar que mourut Cliâh-Thamasp,
dernier roi de la dynastie des Séféviyès. Il fut enfermé
là par Nader-Châh, et mis à mort par son ordre.
Je n’entrai point dans cette forteresse, parce que le
choléra y sévissait; ensuite, parce qu’il fallait pour
cela un ordre exprès du Serdar commandant le district.
Cette mesure de précaution est prise contre tous
les étrangers à la localité, afin d’éviter une trahison
ou une surprise, chose fréquente parmi les peuples
de cette contrée.
Adreskiân.—13 novembre.—Gîte déjà décrit.
Chabith.—14 novembre.—Gîte déjà décrit.
Roouz-Bagh.— 15 novembre.— Habitation prin-
cière des souverains de Hérat, aujourd’hui en ruines
et de chétive apparence. Nous nous y arrêtâmes et envoyâmes
de là un des hommes de l’escorte porter une
lettre à Yar-Méhémed-Khan, pour le prévenir de mon
retour; le froid fut très-vif toute la nuit et la pluie
fine et pénétrante. Le choléra faisait à cette époque
de grands ravages à Hérat et dans les environs.