
le 29, malgré cet avertissement, fut dépouillée à deux
heures de cette localité, et ceux qui la composaient
emmenés captifs.
Kariz.—30 novembre.—Gîte déjà décrit. Les cavaliers
attendus n’étant pas arrivés, je me mis en route
avec deux hommes d’escorte et mon domestique
Méhémed que j ’avais laissé à Hérat en partant pour
Kandahar et que je repris en revenant de cette ville.
Nous avions préparé nos armes, mais heureusement
nous ne fîmes pas de mauvaises rencontres.
Teurbet-Cheikh-Djam.—1er décembre.—Gîte déjà
décrit. Il pleuvait à flots au lever du soleil quand nous
montâmes à cheval. Dervich-Ali et Rehmet-Agha, les
Sipahis de mon escorte, refusèrent d’abord de partir,
prétextant que la pluie était impure; ils m’engageaient
en conséquence à les régaler d’un bon pilau et à rester
en repos dans le caravansérail où nous nous trouvions,
jusqu’au retour du beau temps. Je ne tins aucun
compte de leur résistance et partis sans eux ; à la fin
pourtant ils me rejoignirent désespérés, tempêtant
contre les Européens et leurs manières excentriques.
Le fait est qu’il fallait un certain courage pour se
mettre en route par un pareil bouleversement ; mais
c’est justement parce que je savais que les Turko-
mans seraient à l’abri quelque part et ne battraient
pas la route dans un pareil moment, que je le choisissais
pour franchir les deux ou trois farsangs réputées
les plus dangereuses. Mes prévisions étaient
justes; car après une heure de marche nous trouvâmes
un emplacement couvert de crottin de cheval
tout récent, indiquant que les pillards étaient campés
là un moment auparavant et que cette pluie torrentielle
les avait probablement décidés à la retraite.
Mes Sipahis me louèrent alors autant qu’ils m’avaient
d’abord blâmé ; mais ce changement dans
leur langage avait aussi son côté intéressé : ils ne
voulaient pas perdre, par trop de ténacité, le petit
présent que je leur iis en arrivant à Teurbèt, où, suivant
leurs ordres, ils devaient me quitter et retourner
sur leurs pas. Nous arrivâmes dans cette localité
mouillés absolument comme si nous sortions d’une
rivière. Ce fut une de mes journées de grande détresse.
Mahmond-Abad.—2 décembre.—Gîte déjà décrit.
Nous trouvâmes fermées les portes de celte petite
place forte, l'une des meilleures de la Perse. Les Turkomans
avaient fait plusieurs tentatives, depuis huit
jours, pour s’en emparer par surprise. On nous crut
sans doute d’accord avec eux, car on refusa de nous
ouvrir; on nous menaça même de coups de fusil, si
nous ne décampions au plus vite. Nous allâmes chercher
un refuge dans le tombeau du neveu de l’iman
Réza, situé sur le bord de la route : nous n’avions de
vivres ni pour nous ni pour nos chevaux, et craignions
à chaque instant de voir arriver les Turkomans
qui heureusement ne parurent point.
Hèdirèh.—3 décembre.—Caravansérail déjà décrit.
Je n’ai jamais vu de ma vie une abondance de daims
(djéràne, haou) aussi considérable qu’en sortant de
Mahmoud-Abad ; la plaine en était couverte, et leurs
innombrables troupeaux se composaient chacun de
plusieurs milliers d’individus. Sans un berger que