
deux, et l’un et l’autre se sauvent ensuite à toutes
jambes.
Wachir. — 30 juillet. — Parcours de 13 farsangs, à
travers champs. La route qui longe le pied des montagnes,
à gauche, décrivant un trop long circuit, nous
l’abandonnâmes pour marcher en ligne directe sur le
Kouhi-Duzd (montagne des voleurs), qui se trouve jeté
comme une sentinelle perdue en avant de la rivière
Khachek-Roud, et est isolé au milieu de la plaine. La
facilité qu’il y a à gagner à travers champs la plupart
des localités fait de la stratégie une science inutile en
Afghanistan; les armées s’y inquiètent peu d’assurer
leurs communications, certaines qu’elles sont de trouver
un passage ouvert pour'opérer leur retraite; la
même raison fait qu’elles marchent toujours droit devant
elles, sans s’inquiéter des partis ennemis qui pullulent
sur leurs flancs ou sur leurs derrières. Je n’ai
jamais vu de gens aussi habiles à juger par instinct
d’une direction, quelque éloignée qu’elle soit ; ils a rrivent
presque toujours au but en ligne directe sans
se tromper, et cela en cheminant à travers des steppes.
De Hadji-Hibrahimi au Khachek-Roud on ne trouve
pas une goutte d’eau, ce qui fait éprouver des souffrances
incroyables à celui qui voyage dans ces steppes
arides et brûlants. La bouche et le gosier se dessèchent
et s’enflamment, et l’air que l’on respire passe par
ces organes comme une flamme dévorante absorbant
toute la force physique et ôtant jusqu’au sentiment de
l’existence. Je n’ai trouvé, ainsi que je l’ai dit déjà,
qu’une seule ressource contre la privation d’eau, c’est
la mastication, qui rappelle la salive dans la bouche
et calme la soif au point de la rendre supportable.
L’espace qui sépare Hadji-Hibrahimi de Wachir est
recouvert de broussailles sur les points où nous le parcourûmes
: parmi ces halliers dominent de maigres
taillis de tamariscs servant de retraite à des myriades
d’onagres (goura-khar) et à toutes les variétés d’antilopes
; nous y rencontrâmes aussi grand nombre de
perdrix et d’outardes1.
1 Le chemin qu’a suivi M. Ferrier n’est pas le plus direct pour
se rendre de Ëakoua à Girishk. Celui qui passe par Dilaram,
au sud de Kouhi-Duzd, est considérablement plus court que la'
route par Wachir; mais la distance entre les lieux de halte vu la
sécheresse du terrain, et la crainte des voleurs Béloutches l’ont
fait à peu près abandonner.
Le récit d’un des incidents de notre voyage de Hérat jusqu’à
l’Hirmend servira à faire comprendre les faits racontés par
M. Ferrier.
Notre caravane, commandée par le major d'Arcy-Todd, et
composée, y compris l’escorte placée sous les ordres du Ser-
dar Falteh-Khan, de trois cents personnes environ, s’était
avancée sur le territoire du Hérat, sans subir la moindre insulte.
Bien plus, à différents endroits où nous avions fait halte on
nous fit le meilleur accueil. Mais lorsque nous arrivâmes à
la frontière du Kandahar, nous hésitâmes, car Akhter-Khan, chef
des Douranis, déjà mentionné dans la note précédente, était, à ce
que l’on nous dit, posté sur notre route, prêt à nous attaquer
avec une force considérable à peu de distance, sur la gauche
du chemin de Wachir. Nous décidâmes donc de ne rien dire de
nos intentions et que l’on irait droit à Bakoua. Nous passâmes
en conséquence, par un chemin de traverse jusqu’à Dilaram.
A la première halte, dans l’après-midi, après avoirquitté Hadji-
Hibrahimi, nos gens préparèrent le camp pour la nuit, comme
à l’ordinaire , et pour éviter tout soupçon, on les laissa faire.
Mais, dès que leur repas fut achevé et qu’ils eurent pris un
peu de repos, on les prévint qu’il fallait se remettre en marche.