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il Jic sera d o n c pa s n é c essa ire d ’a jo u le r à la larg eu i' d u bâtimenL la lo n g
u e u r d e d e u x r a n g s d e rames.
On ne m’accusera point sans doute de vouloir atténuer le mérite de
Xcrxcs, si je chcrclie quelques rapports entre son ouvrage et lo monument
ù jamais célèbre du siècle dc Louis X IV , si je consulte les proportions
dc cc canal dù au génie de Kiquct, qui joint l’Océan à la Méditerranée,
se fait réellement jour à travers des moulagucs, ct porte scs eaux ct de
grandes barques sur leurs sommets : il n’a que soixante pieds dc largeur
à la superficie de l’eau; nous donnerons ces mêmes soixante j)ieds au
fond du canal de Xerxès, ce qui, cn supposant les talus praticjucs sur
un angle de quarante-cinq dcgi’cs, pour qu’ils aient la [»lus grande solidité,
et cn accordant douze pieds d’eau, portera la largeur supérieure
à quatre-vingt-dix pieds. Aux douze pieds d’eau, il faut ajouter les trois
pieds dont le terrain est élevé au-dessus du niveau de la mer, cc qui
lera quinze pieds de profondeur totale. Ces mesures paroilrout bien
fortes, si l’on observe que les galères dc France ct de Malte n’avoient
que dix-buit à vingt pieds de largeur; que les galéasscs dc Venise,
certainement bien plus grandes que les ü'ircmcs des anciens, n’en avoient
que trente, ct ne tlroient que sept à huit pieds d’eau : cependant, malgré
fcvideiite exagération des données que nous consentons à adopter, il cn
résulte qu'un pareil canal clc mille toises dc longueur n’offre , d’après un
calcul exact, que 3 i , 25o toises cubes dc terres à enlever. Deux hommes'
peuvent, dans un jour, enlever une loisc cube de terre, ct même ia
transporter, s’il est m'ccssairc, à quelque disla/icc des bords dc l’exca-
valion. Il n’a donc fallu que 62,5oo journées d’ouvriers pour terminer
le canal dc l’Alhos, cn le supposant même plus large qu’il n’étoit probablement.
Uhistoricii nous a[»prcnd que l’on s’étoit préparé long-temps
pour l’exécution de cc grand [»rojet. Il sera permis dc croire qu’il n’y iiit
employé <[uc peu de travailleurs, pujsc[uc deux raille hommes auroient
pu l'exécuter en trente, ou quarante jours.
Celte entreprise n’cxigcoit donc pas des forces aussi prodigieuses que
celles dont dis[)Osoil le grand roi. Sans traîjicr lanl dc nations à sa suite,
cl sans traiter ses troupes avec autant de rigueur que le {»rélciid Iléro-
clolc, il auroit pu ét(»nn('r la (irècc par cc spcelaclc nouveau pour clic,
ol qui fit sur les cs[»rils une impression si vive el si durable.
E n e ff e t, l'A lh o s c u L r o u \e r t, l ’A th o s d o n n a n t à travers scs flancs
passage à u.ic mer nouvelle, montrant tout-à-eoup des milliers dc voiles
dans son sein, ct tant d’aulrcs exagérations non moins fortes, devinrent
des métaphores usuelles, des objets de comparaison familiers aux poètes,
et meme aux orateurs : prest,„e point de discours où cet événement ne
lut rappelé, présente comme lo dernier terme dc l’industrie humaine
et le [»lus grand effort du pouvoir.
Ce sont Lysias, Eschine, Aristide, Maxime de T y r , qui exaltent les
prodiges opérés par Xerxès, et nous présentent l’Athos comme l’éternel
monument qui cn consacre le souvenir à la postérité ( i) .
Les Grecs , fiers d’étre échappes aux fers dont les avoit menacés lo
souverain d’un empire immense, entendoient volontiers exagérer des
oiicrations infructueusement dirigées contre leurs ancêtres, et se plai-
soiciil a voir rappeler des revers fiimcux qui faisoicnt la gloire de leur
patrie. Les souvenirs de l’HclIespont et du mont Athos étoient des
trophées qu’on leur présentoit toujours avec succès; ct Lucien fut le
seul qui, devenu agréable au peuple d’Athènes par la lieeiice niéiiie
de scs plaisanteries, osa lo faire rire de ces lieux communs fastidicu-
semeiit répétés.
Dans le traite où il donne des conseils si piquans ct d’une critique si
spirituelle aux rhéteurs de son temps, en feignant de leur indiquer des
moyens certains jiour charmer la multitude. « N’allez pas, leur dit-il
» imiter le bavardage d’fsocrate, ou le style do cc Démoslhèiics, auquel’
» la nature a dénié toute espèce do grâce, encore moins les froides con-
» ceiitions de Platon; mais pimclroz-vous dc nos auteurs modernes......
» Gardez-vous dc rien écrire, de rien préparer; co seroit nue preuve de
” foiblessc; dites sans hésiter tout cc qui s’offre à vous : i|u'importc l’ordre
» dans les idées? ce n’est pas là co qni fait l’orateur; il s’agit de parler;
» entassez, précipitez vos paroles; tout vaut mieux que de sc taire... Nul
» meuagcmculpour les autres, nulle pudeur pour vous-même; elle vous
» perdrait.... Enrichissez votre mémoire de quinze, tout au ¡ilus de vingt
“ mots bien inconnus, ou au moins bien inusités : qu’ils soient bizarres
» ct incohércns, ne vous en inquiétez pas; parscmcz-cn abondamment
» vos périodes. Cc n’est pas assez : jetez cn avant quelques barbarismes;
» ct c’est alors que la foule émerveillée vous ajiplaudira... N’oubliez pas
i
m
s. Oral. XXXI, J). 5o2. Æsoliiii. eie con
ilax. Tyr.üisserl. X X .T .I , p. 3gu.
t. græc. Tom. 111, p. 5î2. Aristid. de die )
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