Feu, d’artifice
tiré
devant le
Grand Seigneur.
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aufli faut-il dire pour leur excule * qu’ils pré«.'
vo yoien t bien que.fi nous en fuflions venus
aux mains, nôtre vie n ’auroit pas été en fû*.
r e té , à caufe de quantité d’antres Turcs qui
y feroient accourus. Cette avamure me fit
prendre la réfolution de n’allér plus rien voir
a l ’ avenir en fi grande compagnie.
J ’aflîftay a ve c bietf moins de danger * quoy
que dans une occafion aflez hazardeufe , au
Ipedtacle d’un feu d’artifice préparé pour le
.divertilTeraenr du Grand Seigneur, par deux
de mes amis q u ’on avoir fait yenir exprès de
Smyrne. Il étoit arrivé qu’à l ’occafion de la
P a ix , entre les .François 82 les Hollandois, ces
deux perfo-nnes ,.qui demeuroient à Smy rn e,
y avoient fait quelque réjoüitfançe, R entre
autres chofes avoient tiré quelque feu d'artifice
, qui plût tellement aux T u r c s , que le,
bruit en alla jusqu'aux oreilles du Grand Seigneur.
Ce Prince, qui eft naturellement'cu-r
r ie u x , les fit aufii- tot mander ,, pour exécuter
en fa p refie ne e quelque chofe de femb.lable^
fie feu d’artifice ayant pté préparé, & le jour
pris pour le tirer , je n>e mis .en état .de pouvo
ir aufti avoir part au plaifir, d’autant plus
q u ’il fe prefente rarement des occafion s d’approcher
des Maifons de Plaifance du .Grand
Seigneur , lors qu’il y eft avec quelques unes
4 e fies .Sultanes. Un de ceux q.ui avoient pré»-
l ï 1 E 6 Y P TE Ç *S Y RIE , '&C. 489
pare le' fieu ••d’artifice 'étant C h an e e 1 i et de la
Nation Hollandoife à Smyrne, .y ctoit a llé , de
avoir laiflé tout le foin du feu d’artifice à fou
Aiflociè Roger ruanCleef.Nous nous mîmes donc
dans une Barque fur le fo ir , de nous ramâmes
jufque devant le Serrait dès Mifoiÿs, qui eft une
Maifon de Plaifance des Femmes du Grand
Seigneur. Dès que ce Prince eut fait figue ,
on fe difpofa à: tirer le feu , §2 cependan t il fe
mit avec la Sultane ou l ’Impératrice fur le So-
p h a , afin de regarder l’artifiçe par lesfienê*
très. La curiofité me fit tourner les yeux de ce
côté-là , comme fi j ’eulfe pu y voir quelque
-chofe. Nous en étions allez près, deforte que
nous pouvions entendre les voix allez, diftin-
dfcement, qui étoient toutes des voix de femmes
, à la réferve de celle du Grand Seigneur,
•d’où je tiray cette conclufion, que,route cette
troupe de .Dames, qui étoient aififes autour
du Sopha , dévoient être la fuite de la Sultane..
Mais comme la lumière n’étoit pas
aflez grande , je ne'.puis pas dire que j ’aye
vu autre chofe que le remuement & le brillant
de quelques riches habits. Pour ce qui
eft: du feu d’artifice, Il étoit fort beau, de le-
lon\ les apparences il plût beaucoup aux Dames
du Serrail i. car à tous les coups de grenades
de Camphre,, qui ne font point en
ufage chez les T u r c s , il fe faifoit de grands
Y. Tkto.I. Q q q éclats
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