aussi, d’après Camper, Mém. de Pétersb.pour 1777, pi. II, p. 21 x,
qu’une tête très-jeune d'unicome lui a montré dans l’os incisif, de
chaque côté, deux alvéoles bien prononcés; et pour faire voir la
chose clairement, nous avons fait copier, pl. IV, fig. 4, la figure donnée
par Camper de cet os incisif, et, fig. 5, celle du bout de la mâchoire
inférieure qui lui correspondoit. Nous donnons même de nouveau
ces parties, que nous avons fait dessiner d’après nature, à Fra-
neker, pl. V, fig. 2 et 3.
Or, cet unicome de Java, d’âge intermédiaire (pl. IV, fig. 2, et
pl. V, fig. 1 ), n’a point d’incisives externes, et ne montre aucune trace
d’alvéoles qui aient pu les contenir.
Comment, me disois-je, cela se pourroit-il, si ce crâne étoit de la
même espèce que ce très-jeune et ce très-vieux, qui ont offert chacun
des traces de cette dent ?
Pierre Camper paroît avoir déjà reconnu cette différence entre
les rhinocéros d’Asie : « J ’a i eu occasion (dit-il dans une lettre à
» P a lla s, insérée dans les N eu e nordische B eytroege ,W \ , 249) de
» distinguer deux espèces de rhinocéros asiatiques qui ont l ’une
» et Vautre quatre grandes incisives. J ’ enverrai, à ce su je t, à Voit
cadénne de Pétersbourg la continuation de mon Mémoire sur
» ces animaux. » La mort de ce grand homme, arrivée peu, après
cette lettre, l’empêcha sans doute d’exécuter son dessein; mais
comme c’est l’une des têtes de son cabinet qui a servi de base à mes
observations précédentes, il est probable que les siennes avoient eu
la même source, et l’avoient conduit au même résultat.
Les conjectures que ces caractères avoient fait naître en moi, sur
l’existence à Java d’une deuxième espèce £ unicom e, ont été pleinement
confirmées, par les observations de deux de mes élèves,
MM. Diard et Duvaucel, consignées dans un mémoire qu’ils ont présenté
à la Société des sciences de Batavia , et par l’envoi qu’ils nous
ont fait d’un squelette adulte, et d’une peau de cette espèce.
D’une taille un peu moindre que le rhinocéros de l’Inde, celui de
Java en a toute la physionomie; son cuir est également partagé, par de
grands plis, en çompartimens semblables à des pièces de cuirasse ; ses
dents sont pareilles, et c’est par les détails de son ostéologie, comme
nous le verrons plus loin, qu’il se distingue le mieux. La femelle
diffère sensiblement du mâle, par sa corne, qui, est réduite à une
tubérosité demi-ovoïde. Le foetus a,'dès le ventre de sa mère, les
mêmes plis à la peau que l’adulte. Cet animal porte en langue malaise
le nom de Badak (1).
Les mêmes jeunes naturalistes se sont assurés que ce rhinocéros
particulier jusqu’à présent à l’île de Ja va, n’est point une simple variété
du bicorne de Sumatra. Outre les différences que j’ai déjà fait
remarquer, ils en ont observé dans la peau et dans toute la structure.
Quant au rhinocéros bicorne du Cap, depuis long-temps il ne
reste point de doute qu’il ne soit d’une espèce qui ne se laisse confondre
avec aucune autre.
Non-seulement sa peau n’a point de plis; non-seulement la forme
générale de sa tête est différente ; non-seulement il a constamment
deux cornes, mais il n’a jamais que vingt-huit dents, toutes molaires;
il manque toujours d’incisives, et n’a même point de place pour
elles à l’extrémité antérieure deses mâchoires. Son os incisif est beaucoup
trop petit pour en contenir, et même, à sa mâchoire inférieure,:
les-molaires bien loin de laisser, comme dans les autres rhinocéros,
un grand espace vide entre elles et le bord incisif, se rapprochent
tellement, que des incisives auroient peine à tenir entre elles.
Tous ces points résultent de la description donnée par Camper,
de cette espèce de rhinocéros, et l’on peut s’en faire une idée nette,
en consultant notre pl. I I, où les dents de Yumcome et du bicomp
sont représentées, et les figures 6 et 7 de notre pl. IV.
La fig. 6 est une copie de celle que Camper a donnée trois, fois
d’un crâne de rhinocéros bicorne adulte du Cap. La fig. 7 est celle
d’un jeune crâne de la même espèce , de notre Muséum, qui n’a que
cinq molaires de venues. Elle se trouve parfaitement semblable à
celle que donne Sparmann, T^oyage, trad. f r ., tome I I, pl. 3.
On voit que ces deux crânes ne diffèrent sensiblement l’un de
(ï ) Ces détails sont extraits d’un Mémoire manuscrit de MM. Diard et Duvaucel. Le nom
A’Abada, donné au rhinocéros par beaucoup d’auteurs, est une corruption de Badac.