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104 II. D I S S E R T A T I O N SUR LA
„ gardent ftlon le vieux ftyle, les Chrétiens Orientaux n'ayant pas reçu la re-
„ formation du Calandrier. Ils appellent leur troifième jeune, le Jeme des
„ Saints Apôtres, Se l'obfervent dans la penfée que les Apôtres fe préparèrent
„ alors par la priere & par le jeune à annoncer l'Evangile. Ce jeune commen-
„ ce la iemaine d'après la Pentecôte Se dure jufqu'à la fête de Saint Pierre &
„ Saint Paul. Ainfi le nombre des jours de ce jeune n'efl: point limité, & il
„ y en a plus ou moins, felon que la Pentecôte efl: plus ou moins avancée.
„ Leur quatrième Carême commence le premier Août, & ne dure que juf-
„ qu'au I 5 . C e l l par ce jeune qu'ils fe difpofent à célebrer la Fête de l'Aflbmp.
„ tien (d) d e l à Sainte 'Vierge. . . . Ce jeune eft obfervé fi rigidement, que
„ . . . . les Religieux Grecs n'blènt pas même manger de l'huile. . . . Tout
„ k monde fe croit obhgé de s'acquitter de ce devoir. Seulement l'abftinence
„ eft interrompue le 6. Août, qui eft le jour de la Transfiguration. . . . Alors
„ il eit permis de manger de l'huile & du poifïbn. . . . Après cela chacun
3, retourne aux abftinences prelcrites. . . . A ces quatre jeunes il faut ajouter
„ ceux-ci, le 1 8 . Août en memoire du Martyre de S . J e an Baptifte. . . . Ils
„ fe préparent par un jeune de quatorze jours, (h) à la Fête de l'Exalt-ition de
„ la Croix. Dans tout ce tems-l.à, on preche, ou l'on reprélènte au peuple
„ l'hiftoire de la paflion : mais il n'y a guercs que les Religieux qui oblervent
„ ce dernier jeune. . . . comme plus particulièrement eng.igés aux exercices
j , Ipirituels, & à la mortification du corps. Aufli ils s'abftiennent non feu-
„ lement de viande, de beurre, de fi-omage & de laitage, mais auffi de tout
„ poilTou qui a des écailles, des nageoires Si du fang Il leur efl: per-
5, mis de manger de toute forte de poiflôn dans le Carême, qui commence le
„ I j . Novembre, aufli bien que dans les jeunes ordinaires des Mercredis & des
„ •Vendredis, leur Eglifc n'exigeant alors que l'abftinence de la viande & des
„ choies qui en viennent. Les Mercredis & les Vendredis font jours de jeu-
„ ne, fi l'on en excepte quelques-uns, entr'autres ceux de l'onfième fcmaine
„ avant Pâques qu'ils appellent (c) Artzehmjl. . . . Le Lundi de Pentecôte
„ eft encore parmi les Grecs un jour de jeune, auquel on ne mange point de
„ viande. Alors le peuple lê rend dés le matin à l'Eglife , pour demander â
, , Dieu la communication du Saint Efprit, comme autrefois à les Apôtres...
J, En memoire de cette communication les Grecs mangent de la viande le
„ M é t -
ier le Carême des Grecs depuis qu'il commence, il dure fept femaines. C'eft ainfi que le dit ChriJJophle
yingtlHs Grec de nation. Outre que le Carême des Grecs eft beaucoup plus long que le notre, il efl auffi
plus rigoureux. Ou jeune cinq jours de chaque femaine. Le Samedi & le Dimanche on fait deux repas,
on boit du vin, on mange à l'huile: elle eft défendue les autres jouis. V . Chrifi. ^ngclits. Ch. I V . le P.
Coitr Sec.
(a) Les Grecs ont une dévotion extraordinaire pour la Sainte Vierge. Les expi-eflions qu'ils employent
dans les prieres qu'ils lui adreffent font extrêmement outrées. Les plus dévots ont k coutume de
lui confacrer après le repas un petit morceau de pain coupé en triangle, & de l'élever à fon honneur, après
l'avoir encenfé &c.
(é) Cette fête eft du i.^ Septembre. ChipphU ytngeki, dit, que ce jour-là les Grecs doivm falutr U
Croix de J . C. a jeun.
(c) Ricauc & Chrifiophte ^ngelns rapportent la raifon de cette exception. Voici ce que dit l'Auteur
Grec: U n chien, qui fervoit de Meffager à certains Hérétiques, étant mort, ils accuferent les Orthodoxes
de l'avoù tué. Les premiers, pour témoigner le regret qu'ils avoient de la mort du chien, jennerent
deux jours de cette onzième femaine^ & les Orthodoxes, pour éviter d'-ivoir de la conformité avec
eux, furent difpenfés par l'Eglife Grecque de jeûner ces deux jours, qui font le Mercredi & le Vendredi.
Ces Hérétiques étoient Arméniens,& l'on .ajoute qu'^f/«.ei«r/? en langue Armeniene fignifie Meffager.
Ou dit auflî que ce jeune fut inftitué par un certain Sergius Hérétique. Quelques Auteurs rapportent
que \'Art^htirli eli une imitation du jeune des Ninivites, & d'autres que c'eft la commémoration
du banniffement d'Adam chafTé du Paradis après fa chiite. On peut aufli voir touchant l'-^r/x-ckurjî
ce que rapporte le P.Monitr dans (i RtUmn dt l'Jrm!me,Tomt VI. diiSfCHtil dt ro^^^ei mNertL
R E L I G I O N DES G R E C S . LOY
„ Mercredi Se le Vendredi qui fuivent immédiatement la Pentecôte. Le 2, j .
J, Mars, qui eft la Fête de l'Annonciation, ils ont pcrmilfion do manger de
„ toute forte de poillbn, quoique cette Fête arrive en Carême. Ils peuvent
„ aulli manger de la viande depuis Noël jufqu'au jour des Rois, fans ex-
„ ceptcr les Mercredis Se les Vendredis , (a) qui chez les Grecs font
„ des jours deftinés à 6ire maigre toute l'année, au lieu que l'Eglife Latine
a delKné le Vendredi Se le Samedi à cette abftinence. Ils ont le mê-
„ me privilege d.ans la premiere femaine qui vient après la Pentecôte, & dans
„ la premiere femaine de trois avant le grand Carême. . . Le Dimanche de
J, cette femaine répond à la Septu.igefime des Latins. . . dans la femaine
„ qui la fuit, ils ne mangent point de viande, les Mercredis ni les Ven-
„ dredis. Pour celle qui précédé immédiatement le Carême. . . . ils peu-
„ vent manger du lait. . . des oeufs & de toute forte de poilTon. . .
„ Chez les Grecs le Carême commence le Lundi, au lieu que le notre
„ commence le Mercredi. . . . Ils obfervent tous ces jeunes avec autant de
„ fuperftition que de patience Se de retenue. Même ils eftiment que ceux qui
„ violent fans neceffité les loix de l'abftinence, & par confequenc les confti-
„ tutions de l'Eglife, fe rendent aufli criminels que ceux qui commettent un
„ adultéré ou un vol. . . heureufe difpofition A l'ohétfmce credule ^ timide I Ils
„ ont une fi haute idée de ces jeunes, qu'ils croyent impoffible que le C h r it
, , tianifme fubfifte, ou que la profellion en foit fincere, fi l'on n'a pas foin
„ de les g a r d e r . . . . Cette prévenîiott pour les jeunes empêche les Orientaux, de rej
, connoître les Eglifes Proteftantes pour des Eglifes Orthotioxes, à caufe qu'on
„ n'y jeune point. Si parce qu'on n'y a pas une profonde veneration pour le
„ figne de la Croix ". Il eft vrai que fous pretexte de n'admettre que la Spiritualité
dans le Culte, les Proteftans n'aiment point du tout les aufterités du
corps, ni ce qui captive les fens: pour le figne de la Croix> ils s'imaginent
qu'il tient à la fuperftition, Se cela leur eft un fcandale.
„ L'aufterité des jeunes eft adoucie par l'elperance des divertilTemens durant
„ les Fêtes qui fuivent elles, ne font pas plutôt venues, qu'ils s'aban-
„ donnent entièrement à la joye aux plaifm.. Les Prêtres, bien loin de
„ de les réprendre, femblcnr approuver ces excès. . . " M.iis il £mt dire fans
détour, que dans tous les Cultes les Fêtes Rellgieufes finiffent p t le plaifir.
J e n'en connois point qui finifle par la ttiftefle Se l'afflidion, après avoir commence
par la joye. Les Peuples Proteftans, tout fpirituels qui s font, ne peuvent
pas reprimer leurs fens en cette occafion.
„ Les Grecs font fi fuperftitieux Se fi outrés dans l'obfervation de leurs
„ jeunes, qu'ils n'admettent point de cas nécellité, où l'on puiffè prétendre
„ des difpenfes, & felon eux un P.itri.irche lui même ne làuroit autorifer
„ l'ufage de la viande lorfoue l'Eglife le défend. . . On croit qu'il vaut mieux
„ lailTer mourir un malade, que de le rétablir, quand on le peut par le fe-
„ cours d'un bouillon de viande. . . Il eft vrai que quelquefois un Direfteur,
„ qui (è fent de la tendreffe pour le malade, lui conleillera de manger de la
„ viande, Se lui promettra l'abfolution de ce péché, moyennant qu'il fe coii-
„ feffe... Il fe peut aufli que des Prêtresignorans ayant regarde ce nouveau tour,
„ comme un ingénieux temperament entre les néceflités de la vie. Se la ri-
„ gueur des Conftitutions de l'Eglife. Mais quoiqu'il en foit, ceux qui ont c-
„ tudic
(h) Les Grecs ont choifi le Mercredi, parce que, felon eux, Judas prit c: jom-li de l'argent pour
trahir J . C. & le Vendredi comme nous, à caufe de la paflion.
Tme III. Part. 1. Dd
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