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286 D I S S E R T A T I O N S SUR LA
cjuiletifoit, il commença par (ê déchaîner fur l'abus de ces Indulgences, à
hmitacion du Religieux Auguftin. Des Indulgences il palTa (îicceflîvement
à lautoritc du Pape , à l'effet des bonnes oeuvres & au mérite de la foi
dans le Cilut. Depuis l'année 1515). il s'éleva contre la Meflè, l'Invocation
des SS. les loix de l'Eglifc, les ablHnences, les voeux monaftiques & le Célibat
des Prêtres. Dans ce même tems Luther entreprit de défendre la Communion
fous les deux efpèces ^ avouant pourtant que J. Chrift efl tout entier
fous chaque efpèce. En i 5 20. il renouvella dans une lettre qu'il écrivit à l'Empereur
Charles V. à peu près les mêmes ptoteftations qu'il avoit faites auparavant
à Leon X.
Cependant la Cour de Rome fat fortement follicitée d'arrêter les progrès
du nouveau Dodeur, & fur les inftances de cette Cour le chapitre des Auguftins
interpola fon autorité pour le retenir, il feignit d'abord de fc relâcher,
& à la confideration de fes Supérieurs il promit d'écrire au Pape pour l'apaifèr.
Dans cette lettre Luther fe repndoic en inventives, non contre le Chef de
l'Eglife, mais contrelâ Cour, & finiflbit pourtant par des menaces indirectes contre
le Pape, qu'il ne reconnoiffoit plus dès-lors (a) que comme un Prince temporel.
Cependant il lui dédia prefquc en même tems {h) un Traité Je la liberté
Chrétievne y cjui fiit fuivi bientôt d'un autre contre les voeux monaftiques.
Enfin après bien des follicitations reïterées inutilement auprès de l'Empereur
Cliarles V. pour foire arrêter Luther, le Pape donna fa Bulle contre lui le 1 5.
ou le 1 8 . Juin 1 5 1 0 . Cette Bulle contenoit en quarante & un articles les
fentimens de Luther contraires à la doctrine établie. On a écrit qu'avant la
publication de la Bulle, Luther avoit cherché à fê ménager une reconciliation
honorable avec le Pape fous la protection de l'Empereur : mais quoi qu'il en
foit, la Bulle ayant été publiée Luther ne garda plus de mefures, & publia
peu de tems après fon livre fur la Capiniitê de Bal^ïtme : nouveau fruit des {nmicres,
qu'il acqueroit,difoit-il, de jour en jour. Il eft remarquable que les
Reformateurs du fèifième fiecle n'ont reçu leurs lumières que par une infpiration
(ùccellîve, ce qui montre leur dépendance des moyens humains, & peut
être aufli des caufès phyfiques, comme (t) le temperament &c. au lieu que
les lumières des fondateurs du Chriftianifme étoient infiniment fuperieures à
ces caufes & à ces moyens. Les Proteftans conviennent du moins d'une
partie de ma reflexion. Mais pour revenir au dernier ouvrage de Luther , il
n'y garda plus de ménagement fur les Indulgences 5 fur la (d) fouveraineté
du Pape, qu'il qualifia de Royau7ne de Bahyhne-, fur la Communion fous les
' ' deux
(rf) Eoifi. ad Leon X. Oper. Tom. II.
(h) Plein de nouveaux paradoxes, dit Bojfuct Hift. des Variât. L . I.
(c) On peut voir à l'article de Luther dans le DiSionnaire Critique de BAJU, une note curieufe fur !a
prétendue inBuçnce des Aftres dans les Revolutions de Religion. Il femble à la vérité qu'en certain
tems les difputes de Religion font Une efpèce de maladie épidemique. Mais ce mal après tout , eft ce
autre chofe qu'une contagion qui dérivé de trois ou quatre hommes ? Parlons naturellement. Les influences
de la Cour de Rome fervirent utilement le Reformateur Saxon. Il vivoit dans un tems & dans
un païs, ou l'on n"avoit pas oublié les prétentions excefllves de cette Cour. La liauteur avec laquelle
on condamna les propolîtions à la mode & la défenfe imperieufe que l'on fit, même aux Souverains, de
les toierer 5 voilides influences qui operercnt puiiTamment fur l'efpricdes Grans & du peuple. J e vais donner
ici un exemple du ftile Romain» „ nous défendons (aux Princesjdit Lçon X.dans fa; Bulle contre Luther,
„ de tenir aucune de ces oropofitions, ou de les favorifer en quelque maniéré que ce f o i t , fous peine
„ d'excommunication & d'être privés de leurs domaines & de leurs terres, & d'être traités comme infa-
„ mes, heretiques , fauteurs d'hereciques & criminels de Itze Majefté " . On ne peut défendre ce
% l e que par l'infaillibilité du Pape.
(d) Cependant environ un an auparavant, il avoit écrit à Lcon X. m'tl ne ' trt'itudeit tmker ni k
ii à ctlle de l-Eilifi Romaine.
RELIGION DES PROTESTANS. 287
deux elpcces ; fur le nombre des Sactemens, qu'il reduifit à deux j (ùt la
Ttanfubllanriation, qu'il ne rejetta pas d'abord fans aucune rcftriftion j fur la
Meflè C]u"il rejetta comme inutile, ou comme ne pouvant fervir qu'à l'avarice
des Prêtres ; (ùr les voeux qu'il condamna abfoiument ; fur la Confeffion, Sc
«nfin fur le Célibat des Prêtres- De cet Ouvrage il paffa à un autre, qu'il publia
en langue Allemande, pour agir plus efficacement fur l'efprit des peuples,
qu'il y excitoit à un foulevement general contre le Pape & tes Miniftres.
Jerôçiie Aleander, que le Pape Leon X. envoya cette même année à l'Eleäeur,
ne put rien gagner fur l'efprit du Prince. Le crédit du Réformateur
augmentoit de jour en jour : l'Univerfité de Wittemberg s'etoic aulll déclarée
en (à faveur. Tous ces fucccs déterminèrent Luther à faire un fécond
appel au Concile : après cet appel il publia la défenfe des articles condamnés
par la Bulle de Leon X. & déclara fierement au Pape , qu'il approuvoit
tout ce que lui Pape avoit condamné dans Jean Hus, comme au contraire il
condamnoit tout ce qu'il avoit approuvé; ajoutant à cette reponfe altiere, 'voiîQuti
ma vetraBatim. Ce fut alors qu'il prit le titre à'EccUfiafie èc Prédicateur
de Wittemberg, qu'il commença de foutenir que (a) fa Miflion étoit extraordinaire
& divine , qu'il déclara que les Excommunications , les Bulles
& les Anathemes avoient effacé en lui k caraBere de la hcte, ôc que fè prévalant
de l'augmentation de fes force-, il menaça de ne comparoitre aux citations
qu'avec cinq mille Cavaliers & vingt mille hommes de pied. Enfin il
brûla publiquement à 'Wittemberg la Bulle du Pape & les Décretales au mois
de Décembre de la même année : ce qui fut bientôt imité en d'autres endroits
de l'Allemagne.
Cette a£tion de Luther fut fîiivie d'une prédication très-vive, ou il exhortoit
les Saxons avec beaucoup de vehemence à fecouer le joug du Pape , Se
d'un manifefle dans lequel,après avoir jullifié fon aûion, il appelloit le Pape
tyrm de l'Eglife, ufarpateitr de la ptiiffance legtîme des Magißvats ^ corrupteur de
let DoBrîtie Chrétienne. L'Univerfité de Wittemberg condamna aufîi les Décretales.
Luther fè rendit à la Diette à Wörmes au mois d'Avril de l'année 1 5 2. r. par
ordre de l'Empereur Se avec un faufconduit de fa part. Il foutinr hardiment fi
dodrine devant la Diette, proteflant néanmoins, que fi l'on pouvoir le convaincre
par l'Ecriture, il fè rerraéleroit au(li-tôt : mais, ajouta t'il , „ je ne me
„ crois obligé de croire ni au Pape, ni aux Conciles , ni de reconnoitre leur
autorité, puis qu'il efl certain qu'ils fè font trompés ". On a objeâié plus
d'une fois à Lutlier, qu'en ne vcul.lnt être jugé que p,ir l'Ecriture, qui efl une
juge muet, dont chaque parti interprète les décifions à fon avantage, il fè déclaroit
fèul juge des matières controverfées. Luther fè félicitoit aufïi de ce que
fà dodrine caufôit des troubles : „ c'eft, dit-il, le propre de l'Evangile , où
„ J. C. a dit, qu'il n'efl: pas venu aporter la paix , mais la guerre".- Il efl
vrai que ces paroles de J . C. caraderifoient parfaitement la nature de l'Evangile,
fi oppofé par fes Dogmes aux fentimens établis, & par la pureté de fi
Morale à la corruption du fiecle. Luther au contraire,par cette application,
ne s'clevoit pas au delTus des Arriens &: de plufieurs autres fèdes, qui en fàifànt
une femblable application, pouvoient à jufle titre parler comme lui.
Luther défendit fbn Apoßolat avec la même préfbmption dans les conférences
(t!) /» Ep'fioU a4 fiilig nominms Ord, Eplßop,
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