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40 D I S S E R T A T I O N SUR LA
, , phyficiens qu'eux ; en quoi ils ne font pas blâmables, ne mêlant point de Lo-
3, gique, ni ae Metaphyfîque dans leurs livres de Morale, fi vous exceptez
„ quelques Grecs qui ont étudié dans les Ecoles d'Italie, ou qui ont lii les li-
„ vres des Latins.
, , Il (è peut faire néanmoins, que les Grecs & les autres Orientaux ne gar-
„ dent pas toujours à la rigueur les regies de la Morale, à caufe du pitoyable
j, état, (a) où ils lë trouvent maintenant réduits. On accufe leurs Ecclefiafti-
„ ques de hmonie, parce que les Evoques vendent les Ordres 5 & les Prêtres
„ Tadminiftration des Sacremens. Mais fi l'on examine les chofès à fond,
„ peut-être ne font-ils pas (1 coupables qu'on les ertime. Il eft néceflàire qu'ils
„ vivent de leur emploi j & comme ils n'ont pas de Bénéfices de la maniéré
„ qu'ils font préfèntement établis dans l'Eglife Romaine, pourquoi ne veut-on
, , pas qu'ils exigent de l'argent de l'ad mini lira tion des Sacremens ? On ne
, , trouve rien à redire dans l'ulàge qui s'efl introduit dans l'Occident, de pren-
„ dre de l'argent pour des Meflès, pour des ConfefTions, & pour une infini-
, , te d'autres chofos; &c l'on condamnera de fimonie un miiêrable Papas, pour
„ s'être fait payer d'une abfolution qu'il donne , & pour l'avoir taxée , ielon
„ la nature du péché î nous ne trouvons pas étrange que de certains
j , péchés foient taxés à Rome, parce que nous nous fommes accoutumés à cet
„ ulàge. Eft ce que la nouvelle diftindion de Droit divin & de Droit ec-
„ cléliaftique inventé par quelques Théologiens & Canoniftes dans les derniers
„ fiecles, mettra le Pape à couvert de fimonie , & que la derniere néceflité
„ où fe voient réduits les Patriarches & les Evêques Grecs, ne les rendra pas
, , excuûbles devant Dieu & devant les hommes de ce qu'ils prennent de l'argent
pour les Ordinations î Ce n'eft pas que je veuille excufèr en toutes cho-
„ fcs les Grecs: car il eft certain qu'ils s'émancipent fouvent & qu'ils n'ont
„ pas afles de foin de regler leur con(cience felon la morale Clirétienne : mais
„ l'ignorance ou ils vivent maintenant & leur pauvreté font la caufo de leurs
„ defordres , auxquels néanmoins les perfonnes vertueyfes donnent ordre le
„ plus qu'il eîl polTible, comme le témoigne ouvertement le Patriarche Jere-
„ mie, qui reprend les .Confefleurs qui font un trafiq des chofes fâintes & qui
„ exigent des prcfens. Il dit que ces gens-là méritent d'être punis de Dieu,
„ & que s'il s'en trouve parmi eux ils les chatienc & leur ôtent leur em-
„ ploi. "
Quelque effort aue les Catholiques & les Proteftans ayent fiit jufqu'à préfent
pour eclaircir ta véritable croyance des Grecs fur l'Euchariftie , ils one
augmente les tenebres au lieu de les diminuer. Je raj^porterai en abrégé cc
qu'on a dit là-deffus de parc & d'autre. Le ledeur dccidera de la force des
raifons. Voici comment le {h) P. Simon s'explique fur cette matière.
» Quoi
(a) A la fervitude il faut joindre l'extrême ignoi-ance des peuples. Elle eft confitmée par un p-and
nombre de voyageurs dignes de foi. Je ne citerai qu'un feul exemple, lequel ne regarde que l'ignorance
des Grecs de Conftantinopîe. „ Ces Grecs, dit le P. Barbereau dans une Relation de Conftantino-
„ pie imprimée en 166%. pour marquer leur Religion, font quelque torn- de main fin- leur vifagc qu'ils
„ prétendent être le figne de la croix. Il ne faut pas leur en demander beaucoup davantage : car de
„ prieres, de croyances, d'aftes de vertu,c'eft dequoi ils n'ont prefque pas ouï parler. Il m'eft arrivé
„ plufieurs fois d'avoir demandé à des perfonnes que je croyois les plus intelligences, s'il y avoit plulieurs
„ Dieux, & fi Jefus Cluift, qui les faifoir Chrétiens , étoit Dieu & homme ils m'ont prclj,
que tous répondu, qu'iU n'étoient pas alTés fubtils pour fatisfaire à ces grandes qucftions de Thco-
„ logie &c. " Wheler plus moderne die auiïî que ces Grecs font ft ignorant ejiia peint favent ils les premiers
principes de leur foi. Il eft impoffible que la Morale refte long-tems pure dans des lieux où régnent
la fervitude & l'ignorance.
{l>) Chnp. Il, de Yll'floire Critiqite de la Créanee &c.
R E L I G I O N DES GRECS. 41
î) Qlioi que cette qUcftion ait ctc trai'tce fort au long par Mr. Arnaud dans
„ Tes livres contre Mr. Claude, elle ne laille pas de iouffrir encore de grandes
„ difiîcultcsi & il y a même bien des ^ens, principalement parmi les ProteC'
„ tans, qui ne s'en rapportent pas tout-a-fait à ce grand nombre d'Atteflations
„ produites par ce Dodleur dans fon Otivrage de la Perpétuité, parce qu'il
„ n'a rapporté, difent-ils, qu'une Traduaion Françoife de toutes ces Attef-
„ tarions, {ans en publier les Originaux; & qu'il fe peut faire, qu'elles ayent
„ été mal-traduites: outre qu'on trouve, difent les mêmes Protefians, dans
„ CCS témoignages quelques («) feits qui ne font nullement de la créance des
„ Grecs, qui donnent par conféquent occafion de douter de la finccri-
„ té de ces Adej. Auffi quelques Jefuites ont ils eu delfein do publier des
„ Atteftations plus autentiques , & dans les Langues mêmes où elles ont
„ été compofées: ce qui fera aflïirément d'une très-grande utilité. Mais ea
„ attendant cela, je produirai ici quelques preuves de la créance des Grecs
„ touchant la Tranfubftantiation, qui doivent être, ce me femble, préférées
„ à toutes les Atteftations qu'on pourroit faire venir du Levant; parce que
„ non feulement les Jefuites feront fufpefts aux Proteftans, mais même ils
„ ne manqueront pas de dire, que ces Atteftations auront été mendiées, &
„ qu'il n'y a rien qu'on ne falTe faire aux Grecs d'aujourd'hui pour de l'ar-
„ gent : au lieu que les témoignages tirés des livres qui ont été compofés
„ par les mêmes Grecs avant toutes ces difputes , font autant de preuves
„ qu'on ne peut contredire. Mr. Arnaud qui voyoit la force de ces fortes
de
. '(rf) Voye's entr'autres les longs détails qu'a donné de cette difpute le Sieur Aimon dans le livré
intitulé Monumens autentiques de la Religion des Grecs. S'il faut l'en croire, on doit s'infcrlre tou-
•^burs en faux contre tout ce qu'a dit le célébré Arnaud , que c?c Ecrivain confond mal-à-propoa
Jans la table de fon Ouvrage avec Arnaud d'Andilly, le frère aîné du Doélcur. Selon le Sieur Ai-,
mon toutes les atteftations produites par le Doâeur de Sorbonne furent mendiées & achetées à for-'
ce d'argent. Ceux qui les donnèrent étoient dévoués à l'Ambalfadeur de France M. de Nointel,'
aux Jefuites, l la Corn- de Rome; ils étoient recufables par ce dévouement, ils l'étoient encore pat
les contradiétions & par la mauvaife foi que cet auteur alors nouvellement converti à la Refome, &'
emporte jufqu'à méprifer les plus communes bienféances, voulut remarquer à quelque prix que ce fiiC
dans toute la conduite des Grecs, & dans telle du parti CachoLc|ue. Enfin les témoignages de ces
Grecs lui font fufpeéh par l'ignorance qui s'y découvre Se par l'affedation avec laquelle ils tâchent
de faire la Cour à la Communion Romaine, qu'ils traitent dans ces témoignages de Sainte Eglife de
Rome. Rien ne marque mieux, dit-il, que ces Grecs font des ^poftats , d^ss fourbes ijui mentent inf
fKnermnt; & que leur langage ne vient pas des Grecs non Latinije's , qui anaihemaiifintcondamnent
aux peines de l'enfer tous les Chrétiens du Papifme ^ tout le Clergé Romain, Mais il n'eft pas difficile
de croire q\ie l'argent ait pû tenter un Clergé qui fe trouve depuis fi long-tems dans l'indigence
& la mifere. Il en a bien tenté d'autres, qui auroient du être à l'épreuve de fa puiiTance: &
n'eft ce pas lui qui de nos jours fait encore fi fouvent renier & la patrie, & la Religion ? N'eft-ce pas
lui qui aiae à de'cerrer les manufcrits dans les Cabinets les plus facrés,qui metamorphofe les M oines en gens du
monde & leur fait toiferen H . . . à tant par femaine les traduélions qu'ils ofent donner des Ouvrages les plus
difficiles ? je crois donc qu'on peut avoir gagné des Prélats , des Prêtres, & des Moines Grecs
à force d'argent & qu'à ce prix il s'en eft trouvé beaucoup qui ont pû diflimuler leur foi ou l'accommoder
aux Dogmes des Latins: mais cela ne met pas en droit de conclurre que tout le corps
du Clergé ait confpiré en faveur de Rome & qu'il fe foit fait une conjuration unanime des Grecs
d'Europe & d'Afie I l'honneur de certaines opinions & pour faire plaifir aux Latins. 2. A l'égard
de l'ignorance, elle peut avoir donné lieu à de fauffes interprétations des myfteres & des Dogmes
conteftés, il eft pofiible auflî que les Grecs n'ayent pas entendu ces Dogmes, qu'ils ayent eu recours
à de fauffes autorités &c. Tout cela ne doit pas furprendre dans des gens grofliers & fuperftitieux
j & fi peu en état de raifonner fur la Religion, que des Abbés & des Caloyen déclarèrent
eux-même à Mr. de Nointel, qu'ils n'étoient pas capables d'en parler : mais cette ignorance mêms
n'auroit vû être uniforme , & je crois qu'à tout prendre, l'ignoi-ance forceroit plutôt à tordre, pour
ainfi dire fa Religion, de peur de fe rencontrer avec les gens d'une Communion que l'on détefte,
qu'à concerter fa croyance d'une façon qui parut favorifer cette Communion. 5. Que parmi les
Grecs il y en ait beauconp de Latinifés à prix d'argent & même d'aifés mercenaires pour flatter la
Cour de Rome, fans la connoître ni l'aimer, & don: par conféquent les témoignages & la croyance
doivent être fufpefts aux Communions féparées de celle de Rome , c'eft ce qu'on ne conteftcr»
pas : mais en voilà peut être uop fur une matière qui ne doit être traitée ici qu'Iiiftoriquement.
Tome m. Part. l. L
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