
m
i f j l f
, iî
I
64 D I S S E R T A T I O N SUR LA
te diftinftioti le Port-Royal n'a pas répondu avec affés de prccifion au Ëimeux
Claude qui de fon côté, ne l'ayant pas connue non plus a confondu tous
les Grecs lous le nom de Grecs Latinifés. C'eft aux deux partis à examiner la
j u f l i c e d e ces reproches. Mais cette diftuiaion à part, on doit convenir que
les deux combattans avoient beaucoup de favoir & de fineffe. l e Miniftre a
peut-être encore plus de fubtilité que le D o f t e u r , à caufe d'une certaine dek
i n c e fort naturelle aux Proteftans, & qui n'abandonne jamais le premier.
Auffi a t'on dit du Miniftre, j«'// mimà les gens en Procureur du Palais, demandant
toujours les pieces originales, & •»"«'""f ?»'»«
revenir à la d i i t i n d i on du P. Simon, un Proteftant pourra peut-etre o b j e f t e r,
que les fréquens voyages des Latins Se leurs établiffemens dans l'Onent la
rendent aujourd'hui peu fure 8c peut-être même abfolument inpraticable ) que
depuis long tems les Miffionnaires fe gliffent par-tout & corrompent les idees
des Ecclefiaftiques G r e c s , d'autant plus corruptibles que dans leur ignorance,
ils n'entendent ni les Catholiques, m les Proteftans, «nfi que je l'ai déjà
dit. Il y a même des Proteftans affés Hbres de préjugés à l'égard des Grecs,
pour convenir {a) que s'il sen trouve quelques-uns qui fe raffrochent de la Re-
VmonProtejlante, ce neft pas dans le fein de leur Eglife Nationale qu'Us mt pris ces
ùtimens, & qu'ils les tiennent des livres de cette Communion qu'ils ont li, ou des
Protelians qu'ils mt fréquentés. Il vaut donc encore mieux avoir recours à ces
écrits originaux & non falfifies, connus fous le nom de Liturgies, qui renferment
la croyance primitive & generale d'une Eglife entiere, au heu que les
membres de cette Eghle, tant les Ecclefiaftiques que les Laïques, ne font que
trop fujets aux variations & à des déguifemens fuggerés par quelque paffion.
Pour cet effet le P. Simon & quelques autres ont crû devoir recourir aux
originaux rhêmes des Liturgies. Le Port-Royal n'en avoit cité que des vetfioSs;
mais Claude ne fe tint pas pour vaincu, & les autres Proteftans qui,'
à l'imitation de cet habile Miniftre, traitent affés lés Catholiques comme un
Procureur ià partie, n'auroient pas eu plus d'indulgence que ce controveififte
aguerri. Le P. Simon leur a produit dans fes notes fur les opufcules de Gabriiil
des extraits authentiques de ces Liturgies originales, (h) afin que l'on n^
pût davantage révoquer en doute la vérité de la croyance des Grecs. Aulli
Claude même, fi l'on s'en rapporte au P. Simon, avoua firanchcment à fes
amis, qu'il avoit écrit avec trop de précipitation fur des matieres qu'il n'avoit
pas a'iTes étudiées. Alix difoit, queltjuefois en raillant de lui, qu'il aniùit éti
dTforienti. Enfin le P. Simon ne négligea aucune précaution pour empêcher
de nouveaux doutes, & les fubtilités ordinaires de ceux qui ont vieilli dans
leurs opinions. Cependant que ne chicane t'on pas! Plufieurs Proteftans ne fc
font point avoués vaincus : on s'eft même infcrit en faux contre ces originaux.
Te vais terminer cette addition par quelques particularités que Wheler Voyac
eur Antrlois me fournit fur la croyance des Grecs modernes. Je ne les crois
pasméprr&bles. Les Grecs „(c) nous dit-il, croyent conftamment la T r a r f u l^
, ftantiation à Zante & [d) C o r f o u , quoiqu'ils foient ennemis declares de
" l'Eglife Romaine & du Pape fut les articles de rinfeillibilité de l'Eglife & de
" „ la
S L e L c t o remiîî^OT'dSTfifa^^ fuivantes l'aragc qu'on fait du SiiadIA Litargh, du
' f e ) Vo'yaees de Whcler Tome premier p. 15p. Edit, de i<!8(!. _ , „ ,
(4 Cela ne contredit point à la Relation de C M , , cet Aichcve<iue ne mant pas que les Grecs de
Corfou croyent la Tranl^ubftantiition.
R E L I G I O N DES G R E C S . 65
, , 1,1 Proce{Tion da Saine Efpric. A Tinc ils font beaucoup plus de la Reli-
„ gion Romaine, quoique les Grecs s'y fervent de leur propre Liturgie, ôc
„ qu'ils y obfêrvcnc leurs ceremonies: mais ils font gouvernes par un Evcque
, , Latin. A Micone ils ont un Evêque Grec & (ont fujets au Patriarche.
„ L'Evcque de ce lieu vint avec nous à Conftantinople, mais je ne pus m'en-
„ tretenir beaucoup avec lui ne {âchant pas (à langue Il menoit avec lui
„ un Prêtre qui parloit Italien, avec qui je difcourois quelquefois. Il parloic
„ comme s'il n-avoit jamais entendu parler de cette Dodrine (de la Tran-
„ fiibflantiation) finon (a) qu'il croyoit que le pain efl: réellement changé au
„ corps de Chrill par la conlécration, & qu'il îèmbloit abfolument l'entendre
„ en un fëns myftique & (pirituel Jai converfé avec l'Archevêque à Aj
, t h e n e s . . . . Il m'aflèura qu'il étoit prélent à Conftantinopie lorfque le Pa-
„ triarche figna l'écrit du Marquis de Nointel , qu'il ctoit un des mem-
„ bres de l'affemblée, & qu'il ctoit du iêntimenc de cet écrit, où l'article de
j , la Tranfubilantiation eft exprimé par le mot fiira<7icä7is ^ quoique je n'aye
3, pû trouver que ce mot eut jamais été connu {h) jufqu'alors dans l'Eglife
j , Grecque. Je lui demandai s'il ne l'entendoit pas fpirituellementj il me rej
, pondit que non, mais qu'il l'entendoit (^a/^arixas corporellemenc j c'ell-à di-
3, re, que Chrift eft corporellement dans le Sacrement
„ L'Evêque de Salone, avec qui je m'entretins fouvent fur ce fujet, paroiflbit
fouhaiter, lorfque je lui dis que j'étois Anglican, de connoitre la
„ croyance de nos Edifes. Je l'en informai le mieux que je pus. (c) Il me
j , dit qu'ils étoient dans la même croyance ; car je lui appris que nous
j , croyons les Saintes Ecritures, les fymboles des Apôcrcs, de Nicce & de S.
, , Athanafèj que nos Eglilès font gouvernées par des Evêques ôc par des Ar-
5, chevêques j que notre foi eft conforme à celle des premiers Peres & des
3, quatre Conciles généraux, jufqu'au V . ou VI. fîecle, &c qu'enfin nous n'éj
, tions point de l'Eglife Romaine, (d) Après cela je lui demandai leur opi-
5, nion touchant le Saint Sacrement, & ce qu'ils penfoient du pain & du vin
j , après la confecration. Il me repondit comment l e corps fie le û n g de Jefus
, , Chrift dont je le queftionnois, y pouvoir être, & il me donna cette expli-
„ cation. Comme le folcil eft dans le C i e l , & ne laiffe pas de donner là lu-
„ miere & fà chaleur à toute la terre ^ ainfi quoiq^ue Chrift (bit dans les
, , CieuXj il ne laiffe pas d'être dans le Sacrement par la puiflance divine & par
j , fon influence. Je lui repartis que c'eft ce que nous croyons, c'eft-à-dire, que
„ Chrift eft dans le Sacrement d'une maniéré fpirituelle. Il me dit que l'Eglife
j . Grecque croyoit la même chofe Cétoit là le fentiment univerfel du
„ Couvent de St. Luc en Bcocie & d'un hermite qui vivoic à un quart de
„ lieue
(a) Cette efpôce de contradiftion prouve combien peu le Clergé Grec eli au fait de ces queftions.
(ù) On a vû qu'il l'avoic été auparavant. Quand on ruppoferoit que cek eft faux, il fe trouveroit
qu'on auroit dit la même chofc en d'autres termes, ainfi qu'il a été remarqué déjà.
(c) Si Wheler ne lui apprit que ce qu'il rapporte ici en détail, un Catholique pouvoir aufli répondi-ff
à l'Anglois, comme ce Prélat Grec, je fuis dt votre croyance. Cela eft aifé à dire en gros : dans le détail
on n'cft plus d'accord.
{d) C'eft ici la pien-e de touche. Au refte la réponfe de l'Evèque ne decide rien. Le Catliolique dii-a
que Jcfus Chrift eft également dans les C i e u x , & dans le Sacrement par fa toute puiflance, par fon influence
&c. Il agit fpiritucllement fur nous, & cependant ilpeut-ctreauflîenmême tems corporellement dans
VEuchariftie. La plupart de ceux qui queftionnent ainfi de vive voix ceux qu'ils efperent de trouver favorables
à leurs opinions manquent ,rai cment d'accorder les réponfes à leurs propres piejugés : & le pis eft
que manquant fouvent eux même de bonne f o i , ils ajoutent ou diminuent autant qu'ils le croyent néceflaire,
pour prévenir ceux qu'ils queftionnent. J'ofe dire encore que la force des préjugés nous fait
tomber dans ce défaut malgré nous & fans y penfer.
Tome III. Part, I. R