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me force qu'auparavant: Il en ell ainfi de la vérité cachée dans les nuages de
l'erreur.
CROYANCE Generale DOGMES des GRECS.
J e n'ni jamais mieux reconnu qu'en cette occafion, combien, il eft dangereux
de courir de livre en livre pour travailler à s'éclaircir fur une matière,
çjuànd on mancjue ou de capacité, ou de tems, ou de moyens pour aller aux
fburces. Pour bien juger de la véritable croyance des Grecs, il faudroit les confulter
eux mêmes, les examiner chez eux & lire leurs propres Auteurs avec cette
{implicite de coeur & de jugement, qui ne iàuroit s'accorder avec les préjugés
que les controverfes tâchent de nous infpirer. Les deux derniers ficcles nous
ont produit une infinité de livres fur cette croyance ; toutes les controverfcs en
ont traité comme d'un point capital, qui interefibit les Catholiques & les Proteftans
: mais ces controverfes, où chacun foit de fon mieux pour parer les
coups de fbn ennemi & lui en porter à fbn tour, ont étrangement obfcurci
cette croyance & les termes dont les Grecs fe fervent pour l'exprimer. On a
même réduit ceux-ci à ne point s'entendre eux mêmes ^ en force que pour s'expliquer
ils ont appelle à leurs fecours des idées & des expreflîons plus obfcures,
que les idées & les expreffions employées auparavant. Si dans une matiere fiembaraffce
de (ùbtilités, de detours & d'explications forcées, on ne cherche à s'éclaircir
que par le moyen de certains Auteurs copißes & comftîateurs, plus hardis
d'ordinaire 5c plus decifîfs que les Auteurs originaux, on ne prendra certainement
que de trcs ftufTes idées des chofes.
Suivant ces principes je vais eflayer d'écarter toutes les idées acceflbires, qui
nous cachent la véritable croyance des Grecs & donner une abrégé Hiftorique
de cette croyance, le plus fimple &:le plus exad qu'il Ibit poirible,ßns m'embarafler
d'aucune critique, ni furcharger cette matiere de paflages équivoques Se
de citations. J e n'en rapporterai qu'autant que cela fera neceflaire çour juftifierle
petit Ouvrage {a), quej'infere dans ces DilTertations, ou pour*{uppléer à (es
omifïîons. Je iiT^uis' rién ïàire de plus utile au Lecteur qiie de decompofêr ce
livre fi juftement eftimé des connoifleius & d'en employer les parties (elon que
je le trouverai neceffaire. C'efl: honorer un Auteur & lui rendre la julHce qu'il
mérité, que de le reffufciter fous une nouvelle forme, fans l'alterer ni le corrompre
dans (es parties. En cet état il peut fè reconnoitre encore ; il ne peut Ce
plaindre qu'on £iffe un mauvais ulàge du (avoir dont il eft orné, & qu'on le
défiguré en le dépouillant.
„ Depuis que l'Eglife Grecque eft tombée dans le pitoyable état où nous la
„ voyons, les Latins leur ont fait plufieurs infiiltes ûns fujet, èc les Million-
, , naires les ont fouvent traités d'Heretiqùes fans aucun fondement. Mais en-
„ fin il s'eft trouvé à Rome fous le Pape Urbain VIII. des perfonnes doc-
„ tes, qui (e font apperçus de l'ignorance de quelques Theologiens Latins,
„ qui condamnoient d'Herefie ce qu'ils n'avoient point appris dans leurs Eco-
„ les. Cela a déjà été obfervé par l'Auteur qui a fait imprimer un Voyage du
„ Mont
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„ Mont Liban avec des remarques aflez étendues, où il cclaircic la Théolo-
„ gie des Orientaux. Cet Auteur prétend (a) que les Latins accu(ênt fouvenc
„ îans aucune raifon les Grecs d'innovation , &c que fî l'on a recours à la
„ Théologie dans {â fource, l'on trouvera que les Grecs fo font moins éloignés
„ de l'Antiquité {h), que n'ont fait les Latins.
„ Nous avons vu depuis peu de favans Ouvrage fur cette matiere, qui fem-
„ blc avoir été épuifee par (c) l'Auteur de la Perpétuité, lequel a refuté foli-
„ dement ce qui avoit été avancé fur ce fujet par les plus habiles Proteftans
, , de France. Il me (emble néanmoins, que {d} l'Auteur des Notes fur Ga-
„ briël de Philadelphie, a le plus approché de la vérité, en gardant le milieu
,, entre les deux partis, & en diftinguant les Grecs nouveaux qui ont lu les
j . Latins, ou ont étudié dans leurs Ecoles, d'avec ceux qui n'ont eu aucun
, , commerce avec les mêmes Latins : & il tombe d'accord, que les premiers
„ font plus conformes aux Latins que les féconds, au moins dans ce qui re-
„ garde les façons de s'exprimer. L'Auteur des Remarques for le Voyage du
„ Mont Liban, a encore poulfé plus avant ce (èntiment. Car il affirme que
„ les Grecs d'aujourd'hui ne font pour l'ordinaire que copier les livres des La-
„ tins, ne fuivant pas toujours lesfentïmens de leurs Peres; & déplus, qu'ayant
„ l'elprit peu élevé au dellus des traditions populaires, ils ne prennent pas la
„ peine de puifer la Théologie dans fon origine, il ajoute même, que les
„ Ouvrages de Gabriel Archevêque de Philadelphie, quoi qu'il foit du nom-
„ bre de ceux qui ne font pas reunis avec l'Egife Latine, ne font autre chofc
„ qu'un melange de la Théologie des Grecs ôc des Latins ; ce qui doit être
„ entendu principalement de la méthode & des expreffions. Le P, Morin a
j , été auflî de ce fentiment, quand il parle dans (es Ouvrages de la Pénitence
„ & des Ordinations, de cet Archevêque de Philadelphie.
„ Si l'on fuit ce principe, qui eft aflèz bien appuyé dans ces deux Auteurs,
„ l'on découvrira plus facilement quelle eft la créance des Grecs, & il {era ai-
3, fé de concilier les opinions différentes de ceux qui ont écrit fur cette matie-
„ re. J'ai crû que je ne pouvois mieux faire connoître la créance des Grecs
„ d'aujourd'hui, qu'en produifânt le Catalogue que Caucus, Archevêque de
„ Corfou, a fait des erreurs qu'il leur attribue j & j'ajouterai en même tems
„ les reflexions néceflaires pour diftinguer ce qui eft vrai d'avec ce qui eft
„ faux dans cette matiere, qui a été traitée différemment par divers Auteurs.
„ (e) Caucus, Seigneur Venitien & Archevêque de Corfou , dans le livre
„ qu'il a écrit touchant les erreurs des nouveaux Grecs, adrefle au Pape Gré-
„ goire X l I I . remarque les erreurs fuivantes (ƒ).
„ L Ils rebaptifent tous les Latins qui fe rangent à leur Communion.
„ IL ils different le Baptême des enfàns jufqu'à trois, quatre, cinq , fix,
„ dix & dix-huit ans.
„ III. De fept Sacremens de l'Eglife ils ne reçoivent point la Confirmation,
,, ni l'Extrême-On<^ion.
(a) „ IV. Ils Voy. Remarques du P. Simon fur./f Fbyaae du Mont-Lihan par D.mdini pas: 20?. &fuiv. & 120.
& fuiv. Edit, de 16S55. i-o i 539-
( i j Voy. Ibid. les Remartjues Ân P. Simon.
(c) Arnaud Docteur de Sorbonne. (d) Le P. Simon hii-même, qui pubUa en 1 6 7 1 . & 1681, les Ouvrages de Gabriel Archevêque de Philadelphie avec des Notes, fous le titre de Fides Eccleßa Orienialis &c. (f) Caucus in Hiß. de Gr-cc. rccentiornm Htrefibtis. Ce livre n'a jamais été imprimé.
( ƒ ) Ces Articles font rapporte's dans les Monumcns antenti^ues de la Religion des Grecs, imprimé in
(rf) Hißoire Critlejuc dt la créance ^ dei cout/mis des Nations du Levant., par !e Sieur de /I^p»» à Francfort
1684. Plufieurs années après le libraire voulant fe defaire de ce ciui lui reftoit d'exemplaires, par
le moyen d'un tour du métier dis coutumes ^ de, sil ac feurbfetimtuéole ntitiree sfu idvaencs a uC prhe'creédetnit.e Hnsiß Ooririeen Ctariutxiq puaer dReisc hDaorgdm Siems,o n à Trévoux, chez Louis Gancau
1 7 1 1 . Louis Ganeau eft un libraire fupofe'.
en 1708. à la Haye, avec pluGeurs fauiTes glofes de la façon de l'Auteur de ce Hwe & des alterations
confidcrables. Tome III. Part. 1. H
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