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278 D I S S E R T A T I O N S SUR LA
cft aqtorifc à croire, ou à ne pas croire ce cjuc le Pafcur lui a dit: s'il decide
pour la negative, il [e juftifie en dilânt, „ { a ) qu'on ne doit ni croire de
„ foi divine, ni pratiquer làns s'en informer plus avant tout ce ciue difent les
„ Paftcurs. . . . que leur autorité, de quelque manière qu'on les confidcre
„ feparement ou conjointement, ou tous enfemble,ou le pltis grand nombre,
„ n'ell point fans bornes ou fans mefures, à l'cgard des chofes de la f o i , du
„ culte & des regies générales des moeurs. "
Ces principes, à les preffer d'une certaine façon, femblent tendre à introduire
une efpèce d'Anarchie & de libertinage dans l'Eglife. Ils mettent
à peu près de pair le moindre Laïque & le corps réuni des Miniftres du
Chriftianifme, ils autorifent les Schilmes & les Seûes particulières. Ils dctruifenr
la certitude & l'uniformité de la foi, qui font la bafe de l'union
des fiddles. 'Voilà en peu de mots quelques objeftions capitales, que l'on
fait contre ces principes. Il ne nous appartient ni de les refuter ni de les
défendre. On a écrit pour & contre ces principes (h) une infinité d'Ouvrages
depuis les Schifmes de Luther & de Calvin. Sur le droit de l'examen,
on a^ repondu en general aux Proteftans, qu'il eft peu raifonnable d'elperer
de s'éclairer feul & par foi-même, fur tout quand on n'a ni étude, ni loifir,
ni vocation, (c) ni moyens, ni capacité pour cela, dans la ledture d'un Recueil
d'Oii'vrages, làints & inipirés à la vérité, mais quant .aux dogmes généralement
très obicurs , écrits dans des langues éloignées de notre tems,
de nos maniérés & de nos moeurs; où l'on trouve fouvent des allufions peu
intelligibles, & même des contradidions apparentes, qui ont befoin de beaucoup
d'éclairciflemens ; (d) où l'on trouve grand nombre de chofes dont les relations
font inconnues, & qui portent même fur des objets différens, & quelquefois
équivoques; où enfin il n'y a rien d e c b i r , & qui n'ait donné lieu a des
Bibliothèques entieres de Commentaires & d'interprétations, qu'une fuite excellente
de devoirs moraux, d'exemples fublimes de vertu , d'aûes merveilleux
de la puiffance divine, écrits ou didrés par deux excellens Legidateurs &
par des Prophetes infpirés, mais qui ont tous lailfé les myfteres de la Religion
dans une obfcurité impenetrable. Si l'examen doit tomber fur nos devoirs,
& fur ce qui s'y rapporte, il n'y a perfonne qui ne foit en état d'afyofouJir le
/tHide la Bible, & d'être imitateur d e j . C. & des SS. Mais fi l'on appelle à
foi même des dogmes, & des decifions de l'Eglife ftir les chofes qui font de la
f o i ,
(a) Claude Deftnfe de U Reform. Ch. 7. pr. p.
(b) Dans ces derniers tems Arnaud, Nicole, Claude, Pajon & Jurieu ont beaucoup écrit fur cette
matiere.
(c) Par exemple, quel examen auroit on pû attendre de la part des Américains? Il faut admettre néceflairemenc
pour eux une grace particulière & cachée, par laquelle Dieu a fauve ceux qui ont été fiddles
aux devoirs de h Religion naturelle. Il faut au moins les regarder comme des membres de cette premiere
B g l i f e , qui a précédé leJudaifme,de laquelle Adam & N o a ont été les Chefs, & qui dans h fuite
des tems s'eft confervé des hdelles dans toutes les parties du Paganifmc. Ceux qui n'ont pû conno/trc
m la revelation donnée à M o ï f e , ni celle de J . C. ont pû être fauve par d'autres moyens que la Circoncifion
& le BApiéme. Nous ne fommcs pas moins orgueilleux que les anciens J u i f s . Avant le Chrifiianifme
Dieu avoit éclairé les plus fages d'entre les Payens d'une maniéré extraordinaire. Un Difciple de
Pythagore avoit d i t , i}h'o» ne put aimr Dieu & les richcffes. Democrite a voulu qu'on donnât de fon
abondance aux pauvres. Ciceron & plufieurs autres ont recommandé l'amour du prochain & la charité.
Plufieurs fages du Paganifme ont dit qu'il falloir adorer Dieu en efprit, plufieurs autres ont reconnu la
neceflîté de réconcilier les hommes à Dieu. E n un mot, quoiqu'il foit très vrai que le Chriftianiiinc étoif
nécelTaire pour réunir de tous côtés les hommes i Dieu par J . C. il n'eft pas moins vrai que Dieu
avoit confervé affés de lumiere dans le Paganifme pour y éclairer un certain nombre de fages, qui lui
ont été fidelles par leur perfcverance dans les devoirs de la Religion naturelle.
(d) Voy. Ucb^ Oeuvres divers. Tome I L dans fa Dijfertat. /»r la mmere d'expliquer^ S. Paui
RELIGION DES PROTESTANS.
foi) que deviendra la Chriftianifme au milieu de tant de difficultés, que l'on
pourra (è forger fur chaque point: de croyance ? Chaque nouveau fydeme de
ces examinateurs établira une Egli(ê & trouvera des fidelles, qui ne manqueront
pas de dogmarifer à leur cour. Pour éviter ce defôrdre, n'ell ce pas plutôt
dit-on, à une allèmblée générale ôc libre, repré(ëntativede l'Eglilêuniverfelleque
doit appartenir {a) le droit de fixer ce que l'on doit croire & pratiquer, afin
qu'il n'y ait point de divifion? Il (ëmble au/Iî que le corps de tEglife reffemble
en partie au corps politique, dms lequel on ne fouffre ni cabales, ni incrigiies,ni
Ibcietés fcparces, ni reglemens contraires aux reglemens qui font établis. La comparaifon
de l'une à l'autre (èroit complecte, fl dans l'une comme dans l'autre il ctoit
permis de fe retirer, & s'iln'étoit pas plus dangereux de rifquer (on ame dans la
retraite qu'ill'ert derilquer fon corps en fè retirant d'un païs. On trahit (a conicience,
dit-on, en vivant au milieu des abus & en fài(ânc(^)profèflion d'une fbiqui
n'ell qu'ex terieure: mais julqu'où vont les abus î quels font ces abus? ôc en quoi
confiftent ils? ne peut on (c) pas éviter d'y participer, & (è taire? quels (ônc
les abus qui peuvent blelTer véritablement la confcience ? vérifiera t'on jamais
(ans une vocation fuperieure,s'il y a des abus damnables dans cette SocieréChretienne
qu'on a quittée ? Doit on appeller abus des Cultes bornés en cfFet,ou relatifs a
l'Etre fuprêmeî ne fè fait on pas des illufions, &c ne prend on pas des préjugés
de coutume ôc d'éducation contre ce qu'on appelle abus î doit on manquer
de charité envers ceux qui rejettent les conféquences tirées de quelques pratiques
î Eft on obligé de declamer publiquement & de lever l'étendart contre
l'Eglife, quelle qu'elle foit, quand nous ne fbmmes obligés qu'à un filence refpedueux,
& que notre foi peut fubfifter au miheu des ulages, (on va plus loin)
au milieu des cultes qui nous deplaxfent, & que nous rejettons intérieurement?
Mais fi l'on convient que le coeur d'une Eglife, où l'on reconnoit de la corruption
, ne laiffe pas d'être lain, {4} fi l'on avoue que dans cette corruption
(e) Dieu y conferve fes ^vérités fondamentales, ^ue f a parole y eji reçue ^ p o u r q u o i
quitter
(4) Les Proteftans l'accordent à condition que l'Eglife affemblée (le Concile general) fera libre,'
faine, éclairée, fondée feulement fur l'Ecriture. Mais où trouverés v o u s , difenc-ils en même tems,
un nombre fuffifant d'Evêques & de Dofteurs, 500. par exemple qui foient tous d'un même avis,
qui ne foient ni gagnés, ni intimidés, &c. V o y . ce que dit Pajon fur ces difficultés dans fon Examen
des préjugés. De plus, continue t ' o n , après îe même Pajon, comment pourrai je m'alTurer que l'Eglife
pafle & que par confequent je fuis du fentimenc de l ' E g l i f e ? „ l e Pape, quinze, Cardinaux trente Evê-
„ ques, cinquante Doéteurs -, cent Curés, tous con fuites &: qui me diront tous la même choft, ne me
„ rendront pas plus certain pour cela de la decifion de l'Eglife & c . " Dans toutes ces incertitudes qu'y
8 t'il de plus fur pour le Chrétien, que l'imitation de J . C. & la pratique des devoirs du Chriftianifme,
où l'on ne trouve ni Schifme, ni Herefie.
(h 11 faut citer ici un pafîage remarquable de M. Juritu, q ue je trouve dans lefyfième de C Eglife p ^ . 15 7 .
te fliiv. Il y a deux voyes générales, par lefquelles Dieu fauve des gens dans les Cômmunions qui (ont très
corrompues. . . . La voye de féparation, & la voye de tolerance.... La voye de reparation c'eft quand
Dieu fait la grace à ceux qui font élevés dans les Seftes Idolâtres, (le Paganifme, tel qu'il le décric, &
le Papifme ,k\on fes idées) de (éparer le bon du mauvais, de fe nourrir du fuc de la parole de Dieu,
des vérités fondamentales &c. cette féparation fe ftit par une connoiflance diftinéte, ou par une heureu-
Te ignorance. . . . Je laifle la fuite de ce paffage, ou l'on a raifon de foutenir, que rentrer dans une
communion, dont on reconnoit Us erreurs, & faire profefion de les croire eft un état de damnation.
(c) Jljuffît à une con/ciencc humble de garder fa propre foi, fans fi mêler de réfuter U croyance des anires
Scc. pair, de Phoebadius.
(«/) V o y . Jurieu vrai fyfteme de l'Eglife pag. 1 fO.
(c) Voyés aufTi un lonq palfage, ou Ctaucte convient qu'au nùlieu de l'Eglife corrompue, Dieu
s'étoit conl'ivvé un nombre coa/îdertd'le de vrais fidelles, {jai gardoienr leur foi ^ leur confcienct pure, . . .
fe contentant d<.-s principes de la Religion Chrétienne, &c. Ce paflage fe trouve p. 1 1 7 . 1 1 8 . 1 1 9 . de la
Défenfe de la Réf. Tome I I . Edit, de i(S8?. Il montre au moins, qu'il eft audi poffible de fe fauver
dans une E g l i f e , où il v a des abus, qu'il l'eft de vivre en lionnète homme & en bon citoyen dans un
E t a t , où l'on recon-ioit des defordres. D.^ là il fuivra, dira-t'on, qu'il ne faut pas faire de Schifme &c.
V o y . Ibid, un autre pallage remarquable au commencement de b p. 1 1 5 .
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