
3 4 0 D I S S E R T A T I O N S SUR LA
elle n'efl pas fuivie de fon effet, c'eft la faute du pécheur. Les Luthériens raifonnables
avouent c|ue ce fylHme ell plein de difficultés. Avouons aufli qu'il eft
plein de contradidions, & pour ne rien garder fur le coeur, avouons enfin
que tous les Théologiens du Cbriftianifme auroient bien dû nous laifler la
permifîion de nous (auver (ans leur ob(cur & inutile verbiage touchant le
Duvet ^ léleBion, la Grace e^cace, particulière y mt'verfeUe y irrefiJjîbJe, amtjjtble,
inamïjjîhle, f u j î f a n f e , l e fou-voïr prochain &c. Les L u t h e r i e n s n e r e c o n n o i f î e nt
que deux Sacremens j le Baptême & la Cene. Ils rejettent la Tranfubftantiation
, la Mede , 1 elevation & l'adoration du Sacrement, les ceremonies
6c tout le culte extérieur que l'Eglife Romaine obferve à 1 égard du corps
2c du fing de J. C. mais ils croyent la {a) prclencc réelle de l'humanité de J.
C. a^ecy
(a) „ Quant à la C e n e , dit M . Maichd en propres termes dans l'écrif dont j'ai parlé , les Lurhe-
„ riensj comme tout le monde fait, dcfendent la Pre'fence re'elle, c'eft-à-dire, que chaque Commu-
, , niant reçoit avec les fymbolcs du pain & du vin le propre & veritable Corps & Sang de J . C.
,, Ainfi cc n'eft pas feulement aux vrais parcicipans qu'ils reP-raignent cette Préfence réelle j ils l'éten-
„ dent même j u f q u ' a u x indignes". Après cela il fe plaint d'un auteur moderne, qui n'a pas affes bien
rapporte la croyance d i s Lutheriens, quand il a d i t , qu'ils conviennent avec les Peres que les médians
ne mangent point la chair & ne boivent point le Sang de J . C. encore qu'ils en prennent le Sacrement
à leur'condamnation. „ Mais continue M. Maichel, il ferable que ce favant homme depeint la
„ croyance d:s Lutheriens, non pas telle qu'elle e f t , mais telle qu'il voudroit qu'elle f u t . Pour voir
„ clairement le contraire de ce qu'il d i t , on n'a qu'à confultcr les livres fymboliqiies , aulTi bien que
„ ceux que des D o f t e u r s particuliers ont publiés fur ce fujet. AuITi les Reformés dans leurs S y f t è -
„ mes Theologiques ont bien fouvent reproché ce fentiment aux Lutheriens j de forte que pour le
„ fait il n ' y eft point de doute que ce ne foit la croyance de cette Religion. Il faut pourtant obfer-
„ ver, que cette Préfence réelle ne s'e'tend que j u f q u ' à l'ufage de ce Sacrement, & que pour fa ma-
„ niere les Lutheriens fouriennent qu'elle ne foit ni p h y f i q u e , ni lodale, ni une prefence charnelle du
„ Corps de J . C. mds facramencale & incomprehenfible, dont il n ' y ait point de pareille dans la natu-
„ re. Ils fe fondent en cela fur les pai-oles de l ' I n f t i t u t i o n , ceci eft mon Co>ps. D'autres ont auflî mis
„ en ufage \'Vbi<^iiiié Corps de J . C. qu'ils regardent comme une fuite de l'union hypoftatique des
„ deux Natures en J . C . " Tels font les fentimens Lutheriens felon M . MakhcL De peur d ' y alterer
la moindre c h o f e , je n'ai rien voulu changer au François de ce Luthérien. Laiflbns cependant aux lect
c u n la liberté de comparer 8c d'accorder ceci a v e c ' t ô u t ce que j'ai dit c i - d e v a n t , & de juger par
eux-mêmes, fi une P> efer.ce rtdU pnr Lie]>nlle chaque communiant reçoit le propre f^ véritable Corps
S.mg de J . C i , préfence qui n'cft pouitant ni phiJÏ!jiie, ni locale, m charnelle, mais ficrameri'
taie & incomprébenjible, dont il n'y ait point de pardlle dans la N.ttHre, fi dis-je une telle Préfence eft beaucoup
plus claire, mieux fondée, plus digne de la Religion Chrétienne que la T r a n f u b f t a n t i a t i o n , à laquelle
par parenthefe, il convient auftl d ' ê t r e incompréhenfible & de n'avoir pas fa pareille dans la Nature.
Appliquons hardiment à tous ces fyftèmes cc que nous avons dit fur la Grace & fur b J u f t i f i c a t i o n . Si
les ecclefiaftiques vouloient nous permettre de penfer & de parler librement, on pourroit étendre beaucoup
plus loin ces paroles, que M . Maichel n'avance qu'en faveur de la reunion qu'il fouhaiteroit entre les
Lutheriens & les Reforme^. ,, Il femble que fi l'on vouloir bien s'entendre & developer les termes,
„ ambigus dont cette queftion a é t é embaralfée, on pourroit facilement concilier à cet égard les feiiti-
„ mens des Lutheriens & des Reformes ; ce q u ' o n a déjà fait v o i r . " E n f i n voici ce que M . i W w W a j o u -
te f u r la bonne intelligence des i-utheriens & des Reformés contre les Romains f u r i e C u i t - R . - l i g i e ux
de l ' E u c h a r i f t i e : j, il eft digne d e remarque, que les Lutheriens, q u o i q u e reconnoifTant la Préfence'léel-
„ le d u Corps de T. C . condamnent également avec les Reformés tout le Culte Religieux que l ' E -
„ glife Romaine adrefie au Sacrement: ce qui a é t é fans d o u t e une des caufes principales pourquoi les
„ Reformés dans u n Synode de Charenton ont fait un canon exprès pour admettre les Lutheriens
„ comme tels veut aire aparemment comme Reformés) à leur Communion, voyant que le Préfence
„ réelle n'entniine aucune dangereufe confequence après elle dans lo C u l t e , qui fait le principal dans la
„ Religion Chrétienne , & auquel il faut avoir u n j u f t e égard dans le jugement q u ' o n fait fur l'impnrtance
„ des Dogmes & des controverfes " . Mais le Catholique Romain pourra répondre que le Luthérien manque
de refped à J . C . en ce qu'il n'adore pas fon H u m a n i t é devenue p a n i c i p a n t e d e s a t t r i b u t s d e la D i v i n i t é dans
la Préfence réelle & l ' U b i q u i t é . Te renvoye pour les autres objedions à ce qui a été deja dit plus haut. A
l'égard des avances que les Reformés ont faites aux Lutheriens, outre que ceux-ci les ont mtprifécs, les
Catholiques veulent que la politique y ait eu beaucoup de part & que l'on n ' y ait travaillé q u ' à d e f l c i n de
fe r e u n i r p l u s f o r t e m e n t c o n t r e Rome l'ennemi commun. Au refte après avoir bien l û & relu ce q u i a été écrit
pour & contre ces opinions, on ne fauroit n i e r , ce me femble, q u e Luther n'ait admis la Préfence réelle
par la force de ces paroles, Ceci eji mon Corps : mais dans la fuite on a dit que J . C. n'étoit dans l ' E u -
chariftie que par l'ufage, c'eft-à-dire par la Communionj pour (âuver à ce que je crois, des contradictiops
qui pouvoient rcfulter de la d o f t r i n e de Luther. Outre que ce fentiment difpenfe bien mieux
de l'adoration, de l'élévation &c. Les Elemens vifAles, dit M. Pfaffius, quoique confkcre's, ne font point
te SMcremm de l'EuchariJîic, jf/^u'à ce fion man^e le pain ^ boive le vin Scc.
RELIGION DES PROTESTANS. 341
c . fvec , liims Se fous le pain & le vin de la Communion, & avancent pout
la défcnfc de leur (<i) Uhifùté, que toutes les perfeftions de la divinité de J . C.
ont été communiquées à fon humanité, lis rejettent le culte des Saints & des
Reliques. Nous devons, difcnt-ils, imiter les Saints & nous les propofer pour
niodelles, mais nous ne devons point les invoquer, ni attendre aucune verta
de leurs Reliques &c. Ils comdamnent les peines & les fatisfadions humaines :
voeux, pèlerinages, neuvailies, macerations,oeuvres de lûrerogation,c'eft-à-dire,
ces oeuvres qui vont au delà de ce qu'on doit taire pat devoir 6dc. Us rejettent
les diiïiniftions des viandes Scie Carême, les voeux monalHques & les Couvens,
le Célibat des EcclcfiaiUques, le férvice en langvie inconnue au peuple & generalement
toutes les ceremonies qui font obfervées dans l'Eglife Catliolique. Voilà
principalement ce qui diftingue la Rehgion des Lutheriens de celle de l'Eglife
Romaine. Voyons leurs ufages & leur difcipline.
iw CEREMONIES ^/w LUTHERIENS.
Je commence par la dédicacé des Eglifcs, telle qu'on la fiiit en Saxe. On
s'aiîemble Pafteurs & fîdclles à la maifou du Curé, ou même près de
l'Eglilè qui doit être confâcrée, & Ton s'arrange enfuice deux à deux pour
Eire une fois, quelquefois trois la Proceflîon tout autour en chantant des
hymnes des cantiques. Apres cette devotion préliminaire on entre dans
l'Églifê, & l'on y chante encore &l'on y écoute des ledures fàintes, & un prêche
propre à lacercmonie du jour. Si le {h) revenu de l'Eglife le permet, ou fî
les fîdclles font afles riches, on prie le de la capitale d'afliller à la
ceremonie, de benic l'Eglife, de la confacrer par un prêche folennel de (à faç
o n : & pour lors on lut fait un préfènt convenable & un regal. , (ç) Mon auteur
raporte enfuiceladédicace d'une Eglife du faubourg de Dresde .appelle Fr^c/«?-
Yicjîat y qui fut f u t e en 1730. La procefiion partit de l'endroit, où fê faifoic
auparavant "le fervice Luthérien, Les Ecudians 6c les Ecoliers alloient devant-en
chantant. Suivoient après celui que les Lutheriens nomment furintendant ^^
portant la Bible, le Pallcur ordinaire portant le calice & la patcne, deux Diacres,
dont l'un portoit le tronc, l'autre le livre de la Difcipline. . Lin grand
nombre de fidelles Lutheriens de tout age & de tout (èxe achevoit de former
cette
(a) Voici cc que dit M . M^ichel ,ifur la communication des Idiomes, qui eft un autre dogme coiifiderablc,
qui fait une différence de la croyance dc-s Lutheriens de celle des Reformés. Ici les L u -
• J, theriens fbutiennent, que la Nature Divine en vertu de l ' U n i o n H y p o f t a t i q u e a veritablemi.'Dt.,S;i
„ réellement communiqué fes attributs & fes propriétés la Nature humaine, de forte que càis^ci e il
„ au III toute prc/ènte, loific piiijfwt! &'c. pour ce qui eft de certains attribut«, qui fettiblent d é t r u i r e la
„ vérité de la Natme humaine, coitime e f t , par exemple, Vmmcnfitéi X'infinité-, \éurniti,\ les L u t h e -
„ riens d i f e n t , que ces attributs ne conviennent que medi,uemcnt Se indire^ement à la N a t u r e humaine i
„ de foite que quoique je ne piiilTe d i r e , le Corps de J . C. eji immenjé, infini & tternil, cette propo-'
„ fition eft pourtant très vraye, le fan^ de J . C. eft d'un prix infini^ le mérirt de ce dnirt médiateur eji
,, d'une valeur immoifc étemelle-, & cela à caufe do l ' U n i o n H y p o f t a t i q u e , par laquelle il n ' y i
„ qu'une feule perionne en J. C. Cette dei'niere vérité ne leur cft pas conteftée par les R e f o i m c s,
„ quoi qu'ils ne veulent pas Vcconnoifre pour h même- raifon l.v commUniration des /dio>t>es dans lépfè^
„ micr fens: en quoi les Lutheriens oppofent que la lome préfence. Se les autres attributs ne contienj
, ncin rien qui ne puiffe véritablement convenir \ la Nature humaine, parce que l'étendue n'étant i
J, leur avis q u ' u n e fimple alïcclion ou proprierc naturelle d u Corps, la toute préfence par conféquen-
„ ce peut-être communiquée .î la Natm-c h u m a i n e , fans que .cela détiuife l'efFence. & la vérité ;d6 la
, , Nature humaine en J . C . " Reiïurqués que l'on trouve ici quelque chofe de favorable à la Tran^
)ubftantiation.
{b) Kiriben ^Lranum. •
Cl.-) Iliftoire des Ceremonies Ecclejîafiiqui} de Saxe en Alleman impr. en 1751. . .- .
Tome m . ?art, IL Rrrr