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36 D I S S E R T A T I O N SUR LA
„ dans l'Eglife d'Occident (a) Metrophanes Critopuk affiire, que l'Eglife O-
„ ricntale ne reconnoît point d'antte Chef cjue J . C. lequel a les qualités de
„ Chef de l'Eglife; qu'entre les Patriarches il n'y a aucune dilférencc, fi ce
„ n'eft de Siege. Le Patriarche de Conftantinople s'allîed le premier ; celui
„ d'Alexandrie le fécond; celui d'Antioche le troifième; & celui de Jerufalem
„ le quatrième. Ils n'ont aucune fuperiorité les uns fur les autres. Chacun
, , efl; maître chez foi, & s'ils fe trouvent tous enfemble dans un même lieu,
„ ils fe baifent les mains. De forte qu'aucun d'eux ne prend la quahte de Chef
„ de l'Eglife Catholique, comme remarque le même Critopule; & par-
„ là il veut condamner le Pape, qui prend ces qualitcz. Qiiant à ce que
„ Leo Allatius ajoute, {h) que Caucus impofe aux Grecs, quand il dit
„ qu'ils excommunient le Pape & les Evêques Latins le Jeudi Saint ; cela n'a
„ pas feulement été obfervé par Caucus dans Corfou, mais par plufieurs
„ Voyageurs en différens lieux. Le Jefuite Dandini, qui a fait un 'Voyage au
„ Mont Liban en qualité de Nonce fous Clement VIIL dans k defcription
„ qu'il fait de l'Ifle de Candie, parle des Grecs en ces termes, (c) famou hkn
„ des chofes i dire, fi je uoulois rapporter toutes les filetez des Frêlats é" des
„ Prêtres, & des autres Eccléfinpques de cette Nation, leur féparalion de l'Eglife
„ Latine, les malediBions (§• les excmmmicatims qu'ils fulminent contre elle dans
„ les jours les plus faints, & lors que mas prions Dieu pour leur coufer-
„ fion (d).
En neuvième lieu, on croira facilement, que les Grecs mettent le Sous-
„ diaconat au nombre des Ordres moins principaux, & qui ne font point ûcrez,
pour parler dans les termes des Latins, puis qu'il n'y a pas fort long-
„ tems que les Latins mêmes en ont fait un Ordre facré.
„ En dixième lieu, on peut voir dans les livres des Ecrivains Grecs, que
„ de ne reconnoitre que fept Conciles Généraux n'eft point une chofe parti-
„ ' culiere aux Grecs de Corfou. Il femble même qu'on auroit mauvaife grace,
de les obliger à recevoir les Conciles Latins, où ils n'ont point eu de part,
„ non plus que les autres, où ils témoignent n'avoir été préiens que par force,
&c pliicôt pour les intérêts de l'Etat, que pour ceux de la Religion. On
„ les
M Mimfh. Crittp. in Efit. DtBr. Etc. OriM.
(i) LtfAllitt. JeOinM- ^"''f- & Orimt.
(c) Girolamo Dandoii in Mlf cap.
\d) A ce qui a été rapporté par le P. Simm, au fujet de l'excommunication, l'on peut aiouter ce
qui fuit tiré de \'Etia ties Eglifts Grecijue, Armwicnc & Mtroniu, par de ta Croix imprinaée à Paris en
ifiQï. U cérmome dt feu faim efi precede'e d'une aatre, qm eftttfet de ta haine mmclle de l Eglife GrecejHe
^ de 'fes Patriarcl^e! contre la Romaine & le Pape, que le Patriarche (de Jeriefalem) revèiit pontifkalemcnt excommtimie
péliquement a U pme du faim fepulchre en des termes injurieux & fcandateux. Ula ejlfun/i d'une
aSlion puerile !ir indecente, tjui marmite néanmoins la grandeur de leur .inimgjiié. Le Patriarcloe pUnte un clou en
terre it coups de marteau en figne de malédiBion, il excommunie ceux ejsti tarracheront, fous des peines fpirituelles
& temporelles, d'amende de cirnj cms coups de bâton. L'on voit ejuanrité de ces doux devane la
forte du faint fipulcre, auxquels les Crées n'oferoient toucher, & Us Latins les j laijfene afin d'hiter les querelies.
Je vais joindre à cette Excommunication une autre ceremonic qui lui rcffemble & peur-bien
aller de pair avec un Anatlieme complet. Je le tire de l'abjuration que fit à Jerufalem un certain Paiiîus
Liearidius des Dogmes de l'Eglife Latine, lorfqu'il fut inftallé Archeveque de Gaza en l'année
1552. Le Patriarche de Jerufalem qui inftalla ce Paifius étoit atTis fur une efpèce do throne élevé. Les
Métropolitains, les Evêques & le refte du Clergé étoienr placés chacun dans fon rang au-de!fous du
Patriarche. Pendant l'office Paifius recita la Confeffion de Fol de l'Eglife Grecque 1 mais avant fa confccration,
il foula aux pieds deux ou trois fois un tableau dans lequel étoit repréfentée une ville aflife
fur fept montagnes. Au defliis de cette ville on voyoit un Aigle à deux têtes. Ceux qui alfifterent
à cette cérémonie comprirent fort bien que le Grec avoir foulé aux pieds la Ville & l'Eglife de Rome,
mais Paifius, pour éloigner une application fi odieufe, foutintque cette ceremonie fignifioit qu'un Evèque
doit fouler aux pieds la gloire & la vanité du monde repréfentées par la villi aflife fur fept montagnes.
Rien n'eft plus force que cette explication.
R E L I G I O N DES GRECS. 37
„ les fouffre dans les Etats de la République de Venife avec cette croyance.
„ Enfin , pour ce qui regarde les jours de fête , de jeiiHe , & plufieurs
, autres choies de Difcipline, il eft certain que l'Eglife Grecque ne convient
", point en cela avec la Latine ; & Caucus a eu raifon de dire, que les Grecs
'„ ne les reçoivent p o i n t , non plus qu'une partie des Saints de l'Eglife Romaine,
dont ils fe mocquent cjuand ils les voyent dans les temples , com-
„ me l'on peut voir dans l'Hiftoire du Concile de Florence , compofée pat
„ Syropulus, où il dit, §uand j'entre dans quelque Eglife des Latins , ;e ne fa-
„ he amm des Saints que j'y mi, parce que je n'en cmnoi pas un. fat meine
„ de la peine à y recmmitre Jefus Chrijl que je n'adure point mft, farce que je
„ ne fai de quelle maniéré ils le repréfentent.
„ Je croi que cela doit fuffire pour juftifîer les propofitions de Caucus tou-
„ chant ce qu'il attribue aux Grecs : & fi cet Auteur a quelquefois pris plai-
„ fît à exagerer leurs erreurs, & à leur impofer, l'on peut audi dire, que Leo
„ Allatius n'a pas toujours gardé les regies de la modération dans leur dcfenfe.
J'avoue que fa voye de concilier les deux Eglifes, laquelle il a fui-
" vie, fera plus efficace pour reunir cette Eglife avec l'Eglife Romaine, que
„ ce qui a été pratique par les Miflîonnaires qui ont augmenté leurs erreurs,
„ & qui continuent tous les jours de les augmenter , au lieu de les diminuer:
mais cela n'empêchera p.as, qu'on ne connoifl'e toujours les véritables
fentimensdes Grecs, quand on voudra fe défaire des préjugés ordinaires,
"„ &c qu'on faura diftinguer ceux qui font latinifés d'avec ceux qui ne le font
„ point. ^
„ Nous avons oublié de marquer ce qui regarde leur creance touchant le
Purgatoire, l'Enfer & le Paradis, {a) Caucus alErme, auffi bien que pluj
, fleurs autres Ecrivains, que les Grecs nient le Purgatou'e, & que cepen-
„ dant ils font des prieres pour les morts : ce qu'il faut entendre par rapport
à l'opinion des Latins, qui établiffent d'ordinaire un lieu de Purgatoire ôc
„ i l opinion et
„ un feu qui tourmente les ames,
Mais les Grecs nient l'un & l'autre.
„ quoi qu'ils reconnoiffent comme un certain état de Purgatoire : & c'eft
,, pour cela qu'ils prient Dieu pour les morts. Il eft certain que la prière
„ pouE
(a) CaiicUS, iiid. ac fupràs
( / ) On peut comparer à tout ce détail du Pere Simon ce que j'extrais ici en abrège de 1 Ouvrajje
du Chevalier Ricaut fur l'Etai de l'Eglife Grecque, Ch. XIV. „ :1s font , dir-il , deux clalfes de
ceux qui vont en Enfer: les uns finilTant leur vie fous le poids de la colere de Dieu, y font audi-
" tôt accablés de peines dont ils ne fauroient êti« délivrés dans toute réternité. Les autres defcendent
" dans.l'Enfer; mais fans y foulFrir ces . . . peines . . . dont les damnés font accablft à perpétuité.
L'Eglife (Grecque) fuppofe (de ceux-ci) qu'ils font mom avec des difpohtions a la repentan-
" ce . . . & que ces difpofitions ont été fortifiées en eux par le fecours faluraire de la Confelïïon &
" de l'abfolution . . . " Quoi que la grace n'ait pas achevé d'operer en eux , puis que ces bonnes
difpofitions n'ont pas été fuivics des bonnes ceuvres , cependant les prieres de l'Eglife , les interceOlons
des vivans, leurs aumônes & leurs offrandes peuvent rendre ces difpofitions efficaces & méritoires.
„ C'eft-li, continue l'Auteur Anglois , le feus de cette priere : fass Seigneur que fon ante repofe
„ dans le féjiur de la lumiere, de la coisfolation dr de la tranejuillUi , d'où ia trifieffl & la douleur font
„ Innnies ifc. Du rcftc les Grecs ne regardent ce lieu ni comme un Limbe, m comme un Purgatoire
des ames. Toute leur peine s'y reduit'à être privées pour un tems fini de la préfence de Dieu. &c. "
Ils croyent qu'après la mort l'ame ne fauroit fe procurer du foulagement par elle même, & qu'il ne
lui refte, ainfi qu'on vient de le dite, d'autre «ITource que les prieres des Fidelles qui font fur la terre.
Mais ni les décifions des Patriarches & des Evêques , ni les Indulgences & les pardons n'ont la
vertu de tirer l'ame de fa prifon. , . , ,,
„ Voilà les Clefs, ajoute Ricaut en parlant de ces prieres&c, qui font capables d ouvrir le ciel ( i ces
; , ames) encore les Grecs ne veulent ils pas que cela arrive avant le dernier jour . . . . . ils tienne it que
„ comme les Bien-heureux ne reçoivent la plénitude de leur gloire . . . . qu'aptes le jour du juge-
„ ment , les damnés ne reçoivent non plus qu'alors la plemtude de leurs fouffrances.
Totne IIL Part. I. K