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„ gion exempte d'erreur ". Il ramené à l'Ecriture toute fimple celui qu'il (iipofe
ainfi dépouillé de tous préjugés. Le P. Sitrni croit auffi que l'ouvrage
de d'Huiffeau étoit celui de prefque toute l'Ecole de Saumur. Il avoit communiqué
fou delTcin à pludeurs Miniftres de Province qui l'avoient aprouvé:
mais il {a} fut abandonné à la rigueur du Synode, qui le dcpofa au mois de
Septembre de l'année 1670.
Avant lui La MHktiere s'étoit vû expofé à la néceffite de changer de Religion
, pour le fervice qu'il avoit voulu rendre aux deux partis, en cherchanc
a les reconcilier. Les Théologiens 'de Charenton le rendirent odieux : il fut excommunié.
T'ai lu aufli dans l'Apologie de la Reunion du Chrijfianifmej que le lavant
Samuel Petit avoit aulfi conçu le projet de concilier les Religions. Le
Miniftre Alex. d'Yze fut plus heureux que d'Huiffeau. Après avoit public en
11Î77. un ouvrage intitulé, Propojitions moyens pour far-nenir à h remim
des deux Religims en France, il manqua (èiilement d'être depofé, parce que le
Synode n'ofa l'entreprendre. On fe contenta de le fufpendre en quelque façon
& pro forma. Du relie l'ouvrage de d'Yze ne plût à aucun des deux partis. On
peut voir dans le Didionnaire de Bayle ce qui en fut caulè & ce que c'étoit que
ce livre.
Il paroit auffi par les extraits que le P. Simon a donné (h) d'un Synode tenu
p.ar les Reformés de Pologne en i<î45. qu'en plufieurs chofès ils ont voulu
(è raprocher des Catholiques : comme par exemple fur l'Euchariftie : il eft
vrai pourtant que le fentiment de ces Polonois touchant cet article paroit favorifer
également le Lutlieranilme.
Je crois pouvoir mettre au rang des Conciliateurs Fotbefius celebre Théo^
logien d'EcolTe. (c) Il efl un de ceux qui ont montré le plus de moderation
parmi les Théologiens Proteflans. H n'a pas craint de juftifier les Catholiques
Romains de l'idolâtrie qu'on leur attribue dans l'adoration de l'Euchariflie,
& il convient de bonne foi que la plus grande partie des dilputes de Religion
confifle plutôt dans les mots que dans les cliofes mêmes.
On trouve dans le mois d'Avril 1684. de la Republique des Lettres un pro^
jet de reunion propofé aux Ptoteftans par Spinola Evêque de Tina en Croatie.
Mais les Proteflans doutèrent generalement de la fincerité de ce projet, que
l'on crut n'être qu'un manege de politique. On peut voir dans la Republique
de Bayle quelques reflexions auxquelles le projet donna lieu. Un certain
Prutorius PrulTien, publia l'année d'après un autre projet de reunion, qui.fuivant
ce qu'on peut juger de l'extrait du même B.iyle, n'étoit recommandable
en rien,puis qu'il lui manquoit l'autorité des Souverains, & à fon auteur les
qualités qui forment un auteur habile & judicieux.
^ J'aurois diî parler de Baudius,puis que felon fôn propre aveu {d) il s'étoit en.
tête du même projet. Auroit il été plus heureux en Hollande, que les autres
pacificateurs en France, en Suede & ailleurs! Non, s'il eft permis d'en juger
par les triftes fuites (e) d'un pareil projet conçu par un Miniftre des Memnonitcs
en Hollande.
_ (4) Selon l'Auteur de VExamen dn livre de la Réunion Src. D'Huiïïèju étoit un Dcïfte & un difciple
d'Hobbcs.: & cela parce qu'il ramène le Chretien aux premieres vcrite's, commc elles font ^nonc^es
dans l'Ecriture, que pour le refte il panche vers la tolerance &c.
ib) Lettres Choifies Tom. I I I . Lett. V L le P. Simon dit que ce Synode a été imprime h Berlin en
1^50.
( 0 Surtout dans l'ouvrage intitulé Confidemiones modefta ^ pAcifica comovtrJîarHm axihU en i 5 î 8.
{d) V o y . le Diaionnaire de Baylç article de BauHus.
(0 Voy. Lett. XVL entre les Oiuvres divcr/es de Leck^Tom.lh
R E L I G I O N DES PROTESTANS. ^it
Je finis par Poiret la petite lifte que je donne ici de ceux qui ont cfîàye de
parvenir à une reunion. Cet Auteur publia eu 1^87. !a paix des bonnes ames
dans tous kl partis du Chripanifme fllr lei malieres de Re/iffon , té" pàrtimlierement
fur TEmharijîie, Les bonnes ames félon cet auteur font ceux qui ne s'arrêtent
qu'à l'elTentiel de la Religion Chrétienne, fans s'embaraffèr de ce que les
Controvetfes attaquent, qui felon lui n'eft qu'un acceffoite du Chriftianilme.
Dans cet acceflbire les uns peuvent éviter l'abus, & les autres trouver de l'utilité,
chacun fuivant la portée, ou l'état de là confciencc. Il eft même poffible
que les gens fâges & éclairés falTent un bon ufage de cet acceflbire par condef^
cend.ance pour la conicience d'autfui, fuiVant le précepte de St. Paul, de fe
faire tout à tous, & fuivant la grande maxime du ChriftianiGne, qui veut qu'on
ne fcandalife perfbnne, & qu'on fuporte la foiblefle de ceux qui font encore
enfans dans la foi. Il tâche auffi de concilier les fèntimens des Cathohques^ des
Luthetiens & des Evangeliques ou Reformes fur l'Euchariftie, ou de montrer
tout au moins qu'ils peuvent avoir tous raifbn dans leur croyance & dans leur
pratique. Sur ce dernier article je fuis perfuadé que la tolerance feroit très-poP
îible,' s'il plaifoit aux Théologiens des trois partis de ne pas forcer les confciences,
& s'ils cvitoient d'y jetter le trouble par leurs controverlês dans les accef^
foites. Voici mon idée. Le Catholique n'eft pas idolâtre dans le Culte de l'Euchariftie
.parce qu'il y adore J . C. comme Fils de Dieu, fécondé perfbnne de la
Trinité. Le Lutherien ne féroit pas idolâtre, parce qu'il adoreroit J. C. réellement
prélènt aux efpcces du p.ain Sz du vin. Le Calvinifte ne fèroit pas idolâtre,
par ce qu'il adoreroit J . C. préfent en efprit & par fâ Divinité aux efpèces
de la Communion. Mais en même tems, je fuppofe que la conicience eft
petfuadée ; fans quoi je fôutiens que le Calvinifte & le Lutherien qui communient
dans une Eglifê Romaine font véritablement idolâtres, tandis que le Catholique
ne l'eft pas.
Quoi qu'il en fôit, le vrai moyen de faire de bons Chrétiens, c'eft de reduite
au moins pour fôi-même le Cliriftianifme à fà véritable fimplicité. Pour le
leduire à fà véritable fimplicité, il faut s'arrêter aux devoirs que l'Evangile iious
prefcrit, fans trop s'embarafTer de ce qui fera éternellement l'objet des controverfe
Theologiques. Ne nous embarafTons donc point de tant de difputes, & pour achever
de faire notre devoir,plaignons & fùpportons charitablement ceux qui ne penfênt
pas comme nous en matiere de Religion. Ils feront traités felon leurs lumières
: mais le plus fort attachement à l'Eglife ne fàuvera pas un dévot volontairement
ignorant, de mauvaifè foi, cruel 8c perfecuteur.
t i l i i. DISIÊÊ