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220 III. D I S S E R T A T I O N SUR LA
dc la confecrarion des Evêques, telle que la fàifoit autrefois le Patriarche de la
petite Armenie. Il impofoit fur la tête du poftulant la main droite de St. Grégoire
l'illminatmr, qui vivoit au commencement du quatrième fiecle. Cette
Relique efl: aujourd'hui dans le Monaftere A'îtefmjinzm. L'impofition dont je
parle étoit une pieafe charlalmerie du Patriarche, par le moyen de laquelle il
attiroit chez lui la plus grande partie des conféctations , & trouvoit ainfi les
fonds dont il avoir befoin pour payer le Tribut au Roi de Perfe.
J'ai dit que les VertaUets vivent dans le Célibat : cependant les Curés Se les
Prêtres feculicrs fe marient, mais ne pouvant paflèr aux fécondés noces, ils fê
choifîlTent prudemment pour femmes des filles jeunes & vigoureuies. Les
Prêtres couchent dans l'Eglilê, la veille du jour qu'ils doivent s'approcher de l'Autel:
& fi l'Eglife a plufieurs Prêttes,rhebdomadaire y pafle toutes les nuits de la femaine.
Chaque Eglife particulière a fon Conleil qui a droit d'élire l'Evêque, Se
l'élu va fe faire facrer par le grand Patriarche , ce qui n'empêche pas que
ce Confeil ne s'attribue le droit de le deftititer, fi l'on n'en eft pas content. Les
Evêques font leur refîdence dans les Couvens & y vivent en communauté avec
les Moines. Les Aumônes, les Ordinations & les fécondés Noces produilènt
leurs revenus. Pour marque de leur dignité ils ont la mitre, l'anneau & la
crofle.
Si plufieurs Prêtres deffervent une même Egli(è, la Paroiflè fè partage entr'eux.
Pour aipirer à cettePrctriiè il ne f a u t , d i t - o n , que (avoir lire le Miflèl
qui efl: en Arménien littéral, c'efi: à-dire en Arménien non vulgaire. En un
mot, il n'y a rien d'outré dans les Relations, qui nous diiènt qu'en Arménie
comme generalement dans tout l'Orient, pottr f e fake homue d^Eglife, il ft^t
d'être ignorafit. La préparation de celui qui doit recevoir l'Ordre de Prêtriiê fê
termine à demeurer quarante jours dans l'Eglife : le quarantième jour on dit la
Melle. Elle eft fuivie d'un grand feftin. La femme du nouveau Prêtre
(on l'appelle Papadie) afïïfle au feftin afïîfê fîir un efcabeau, les' yeux
bandés, les oreilles bouchées, ^la bouche fermée , ( « ) pour marquer
la retenue qu'elle doit avoir à l'égard des fondions facrées auxquelles
fon mari va être employé. Pourquoi choifir la femme pour en faire l'objet
d'une ceremonie qui marque expreft'ement le devoir du Prêtre ! C'eft lui qui
doit avoir de la retenue en tout ce qui concerne l'Autel. Les anciens
Payens la recommandoient à leurs Prêtres, & quelques (J) Heretiques, à l'imitation
des Payens, fè la recommandoient entr'eux. Ajoutons ces particularités
pour achever de montrer comment les Prêtres s'acquittent de leurs fonctions
paftorales. Ils ont le Bréviaire au Choeur, Se hors de là le Pfeautier,
dont ils doivent reciter tous les jours quelque partie. Le P. Monter dit,
„ que dans le cours de l'année les Prêtres ne vont à l'Eglife que le matin pour
„ les Matines, & le fôir pour les Vêpres". Pendant le Carême ils y vont
encore à midi. On s'affemble ordinairement dès les deux heures du matin,
four commencer, dit le P. le Brm, ou pour fuir même , la Liturgie m foleil lenimt,
en moi ils ont conferve l'ufage de l a f h s haute antiquité. Si l'on veut un
plus grand détail, il faut confulter les Auteurs que j'indique (c) au bas de
la page.
Les
(a) Le P. Manier ubi fup.
(,b) Bajilidss ordonnoit le filence à fes feflareurs; & le leur recommandoit par cette maxime ; penetrêi
les autres, mais ne vous l a i f f é s jamais peuetrer. Omnes cognofce, te fiemo copofcat.
Ce) Le P. te Brun dans fes lÀiftrgiei. Le P. Monter ReUthn de l'Armenie. Tcmiefert Voyage au
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Les enlâns deftinés à la Prêtrilè font ordonnés dès l'âge de dix ou douze ans:
après avoir achevé d'apprendre à lire , leur Maitre les préfente à l'Evêque.
L'Ordination faite, ils font un fejour de deux ou trois jours dans l'Eglife mns
en fbrtir. Pendant cette retraite on les fait lire, &; le refte du rems ils s'y amufènt
comme des enfins. Les jours de cette retraite étant expirés, on leur
ôte le furplis dont on les avoit revêtus, les Prêtres les rendent aux parens,
qui font un feftin Se payent à l'Evêque douze fols pour l'Ordination de
chaque enfant.
J e dois dire quelque chofè de la dévotion des Arméniens & de la décence
qu'ils obfervent dans les Eglifes. Je commence par les pelerinages de
leurs dévots à (a) ïtchmiaxin Se à Virap, deux endroits qui valent pour eux Noire
Dame de Lorette , Saint Jaques en Galice Se tout ce que nous avons de plus
rare Se de plus édifiant en matiere de pelerinage. On dit même qu'ils préfèrent
les deux pelerinages â'iîchmiasin Se de Firap à celui de Jerufalem. Le pelerin
fe prépare à cette fainte vifitation pendant fept ans , & jeune quarante
jours par année, fans préjudice aux autres jeûnes qne l'Eglilè Arménienne ordonne
, dont je parlerai tout à l'heure. A ces pelerinages font attachés des avantages
efTentiels, pourvu que la préparation fôit bien faite. Ces avantages font
un efpri é de taalle ns extraord.ina. ir.es,. beaucoup d'agilité , d'-e xcel.l.e ntes difpofitions
à bien chanter Se à bien danfer, des amis finceres, une belle femme.
Qtii pourroit s'imaginer que les Saints d'Armenie s'ainufent à procurer des
biens aufli peu dignes d'un fidelle, que le font la danfè, la mufique, l'agilité;
mais les dévots. Se furtout les ignorans, attendent tout des bontés du Ciel.
Il ne faut pas oublier pourtant, que les Arméniens n'oferoient demander
des richefïès à leurs Saints. . . . ^ .
Entrant dans l'Eglife les hommes & les femmes quittent leurs fouliers à l i
porte. On y a même des armoires pour les ferrer pendant les exercices de devotion.
Ils font aufïï en entrant le figne de la Croix trois fois, mais à la f i -
^on des Latins. Ainfi le rapporte le P. le Brun. Les hommes fe découvrent
la tête. Le Clergé eft aufli au choeur fans fouliers, mais ceux qui font dans
le Sanduaire prennent des pantoufles noires. Pendant la Meflè fie l'Office, oii
eft toujours ou debout ou aflrs à terre, les hommes croifânt les jambes , les
femmes fur les talons. . A tout ce détiiil d'ufàges, qui conftituent au moins en
partie l'extericur de la devotion, il faut ajouter, qu'il y a toujours beaucoup de
monde dans les Eglifes, que l'on y eft long tems, & comme je l'ai déjà dit,
1 de fôi '
que l'on s'y rend de fort bonne heure. Le P. Manier témoigne qu'il fut édifié
de 1 a modeftie tie qu
qu'ils obfervent dans les exercices de pieté , Se le Cheval. Ritems,
caut dit qu'il le fut de leur zèle. Toutes ces attentions redoublent en certains
comme par exemple, pendant la Semaine Sainte.
PafTons aux jeûnes: [h) ils font beaucoup plus rigoureux que chez les Grecsi'
Se rien ne peut en difpenfër. Dans les quarante jours du Carême qui precede
Pâques, il n'eft permis de manger que des racines, des herbes ou des legumes
, & beaucoup moins qu'il n'en faut pour contenter fon appétit. Tournefort
nous dit pourtant, que pendant le grand Carême, les Arméniens peuvent
manger du poiflbn le Dimanche : mais cela eft il bien cxad ? A cctt£ niorcifîcatioa
(4) Voy. en le détail dans Ricaui Etat de l'Eglife Arménienne^ Trois Saints diftingués d'Armenïfi
font enterrés près à.'Itchmiaun. riraji dans h Province à'jirdasbat eft un lieu oii Sixaz.Saveriah, un
ile ces Saints, a beaucoup foufFerc.
{b) Ricant, le P. Moniert Tonmefort, le P. li Srtit. •
Tome ni. Part. l . Kkk
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