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230 III. D I S S E R T A T I O N SUR LA
l e dois remarquer quelques ufages fmguliers des mariages des Armeniens de
Julfa- Le jour des Noces, le marié met un cierge à la main de chacun des
conviés. De jeunes filles chargées d'habits, & d'autres préfens, & fuivies de
quelques femmes entrent en danÊnt au fon des tambours & des haut-bois, ôc
attachent une croix de fatin verd brodé fur. l'eftomac du marié. On préfente
au Prêtre les habits d u marié & de la mariée, qui s'en revêtent auffi-tôt. Le
marié revêtu de fes habits nuptiaux Ce rend avec fes principaux amis auprès de
la mariée, y fait & reçoit des complimens. Alors les.mêmes jeunes filles lui
attachent une fécondé croix de Citin rouge fur la premiere. Les femmes apportent
un mouchoir qu'elles lui font prendre par un b o u t , donnant l'autre à la
mariée. C'cft en fe tenant ainfi que le marié & la mariée fè rendent a
l'Egliie. Avant la l e û u r e du. formulaire du Mariage & après l'interrogation du
Prêtre , u n garçon de la noce, (Paranymphe) leur tient les mains & les têtes
jointes avec un mouchoir. Enfuite on les couvre d'une, croix, dont ils reftent
couverts jufqu'à la fin de la leûure du formulaire Se des prieres.
Après la Benediaion du Mariage, le? maries font reconduits chez les parens
de la mariée dans le même ordre Se avec la même ceremonie, à quoi
l ' on ajoute les félicitations & les marques ordinaires de joye. Le P. Mcxicr
dit que le marié voit pour la premiere fois la mariée à l'Eglife. Tmrnefcrt renvoyé
cela plus loin. La noce finie, „ le mari fe couche le premier, après a-
„ voir été dechauffé par fa f e m m e , qui eft chargée du foin d'éteindre la chan-
„ delle, & qui ne quitte fon voile que pour entrer dans le ht. . . . On dit
„ qu'il y a des. Armeniens qui ne connoitroient pas leurs femmes, s'ils les
5, trouvoient couchées avec un autre homme. Tous les foirs elles éteignem
„ la chandelle avant que de (è f^év^ilcr, Sc U plûpaiL ne découvrent poitij
„ leur vifige pendant le j o u r ."
RicMt dit, que le Lundi matin eft ordinairement le tems quç les Armeniens
folennifent les Noces. „ La fête commence le Dimanche au foir & du-
„ re trois o u quatre jours avec de grandes rejouïflànces. La mariée eft prefque
„ toujours affife pendant ce rems-là dans une chaife, où on l'empêche de s'en-
„ dormir. L'Epoux. . . . n'a la hbertc de confommer fon mariage que le
„ Mercredi ou le Jeudi au matin. " Quel peut-être le but d'un ufage qui par
fa bizarrerie n e laiflè pas d'être (a) une efpèce de fuplice pour la mariée? Après
cette confommation fi ridiculement éloignée de la benediftion qui l'autorif
e , o n expofe gravement aux yeux du public les marques (h) mn mcmteßMs de
la virginité de l'Epoulè.
Tourmfan affure q u e pendant ces fêtes les hommes ne font point mêlés avec
les femmes. Celles-ci fe divertilfent entre elles, & après s'être dévoilées, difent
de bons mots & boivent gayement.
. Non feulement l'Eglife Arménienne trouve bon que les Prêtres féculiers fe
m a r i e n t ; elle les oblige au mariage, & c'eft Ricaut qui le dit ainfi, ajoutant
même quelle ne dmne pint l'Ordre Je Pre'trife qu'on n'ait une femme. L'Evêque
n'a pas la liberté de fe m a r i e r , parce qu'il eft Prêtre regulier. Un Prêtre
f e c u l i e r , q u i après la mort de fa femme pafferoit aux fécondés Noces, fcroit dégradé
M De! Peres de l'EgUfc ont crû que les filles fouhsitoient plus ardemment les phifitï du maiijge
que les femmes. Selon ces SS. hommes l'imagination les repréfente aux filles beaucoup plus grans qu'ils ne
lom. D'autres décident pour les femqies, parce qu'elles favent déjà ce que c'elK
r») On peut voir dans les Auteurs qui ont écrit de la v / r r M t des filles combien les fones de cette
virgmite font equivoques.
R E L I G I O N DES GRECS. 231
gti)d.c fins p.nftèr pourtant pour concubinaire. Il feroit fimplement déclaré Laïque.
Je viens .à l'Extrêrae-Onclion &: aux funérailles, il n'eft pas neceflàire de re-'
pepr ici, que ce Sacrement .appellé chez les Latins Extreme Ont^lion, & connu
autrefois plus particulièrement chez eux fous le n om d'Huile des Inßrmeiy
nom qu'il conferve ericoc'e aujourd'hui; il n'eft p.is dis-je necellaire de repeter,
que les Grecs, l'adnliuiftrent indifféremment & aux {âins, & aux malades. Les
Voyageurs judicieux, & qui ne (è font pas laillés prévenir a cet elprit de parti
qui ne permet ni de .voir ni de comprendre, nous aflurent que les Armeniens
(ijoivreunis) comptent audi cette O n a i o n pour un Sacrement. Cependant ils la
pratiquent de la maniéré la, plus abfurde, ne la donnant qu'après la m o r t . Se
d'ordinaire feulement aux Prêtres. Quand un d'eutr'eux vient de m o u r i r , on en
â'i^erttt un autre, qui aporte le Chrême Se fait toutes les Onctions fur ce Prêtre
rpjpçt, en difint ces paroles; „ e n oignant la m a i n , que la main de ce Prêtre foie
b é n i t e , ointe & fandifiée par ce figue de la fainte C r o i x , par cet Evangile Se
i , PM le 6 i n t Chrême au n om .&c. S i d e m ê m e p o u r l e r e f t e d e s o n a i o u s . " Pour
ce.t[iji.eft-des Laïques','auxquels;on ne donne que rarement l ' O n a i o n , Ricrfa^
d i t , que l'ufigeordinaire eft de les laver après leur m o r t , à la maniéré des Turcs Si
de t o u s les Orientaux. N e pourroit on .pas mettre auffi l'ufage f u i v a n t a u r a n g des
Q.naipns î C'eft le P. Mmier qui nous le décrit. „ Les Armeniens, dit-il, ont
,, pour pratique de laver les pieds de tous ceux .qui font à l'Eglife. Après les
, , avoir lavés , les Prêtres les oignent de beure, en memoire du parfum que
„ la femme péchereffe repandit fiir les pieds du Sauveur. (Ils (è fervent de beuf
„ te, faute d'huile quii eft rare dans le pais. ) L'Evêque le bénit dev.int que
„ de commencer le lavemeoc d ö pieds, 6c dit en le benifïàjit; Seigneur fane-
„ tifié» ce W t e , - afin q»>iirfoit un xem,Af. contre toutes Ics maladies, qu'il
„ donne la fantc à l'ame,-& au;corps de ceux qui en reçoivent l ' O n a i o n ."
Selon la Rubrique des Armeniens, ajoute le P. Mmier, cette pratique eft
tecommandce par les Apôtres.
{a) Locfqu'un enfant meurt au deflbus de neuf a n s , le pere ou le plus proçhe
parent f l i t prier Dieu pendant huit jours pour l'ame du m o r t , & tout ce
fems-là défrayé le Prêtre auquel cette devotion eft commiiè. Au neuvième
jour on fait le fervice folennel pour l'ame. Ricaul ajoute, „ que ceux qui ont
„ de la pieté Se des moyens ont un jour choifi pour celebrer la memoire de
„ leurs parens, & pour faire dire alors tous les Offices néceffaires. 11 dit a uf
„ Cl, que la coutume eft univerfelle parmi ce peuple d'aller le Lundi de Pâques
„ vifiter les tombeaux des morts. " Alors les hommes crient & gemiffent, mais
les femmes h u r l e n t , & cela s'appelle, ainfi que chez n o u s , marquer fon deuil Se
ion affliaion. Car quoi qu'il foit generalement vrai qu'une violente afHiftion
arrête l ' a a i o n de l'ame & (h) fufpend le méchanifme du corps; il ne l'eft pas
« l o i n s , que le temperament, l'exemple, limitation Se la bienfeance ont fait
des exceptions infinies , enfuite delquelles tous les peuples fe font accordés à
convertir le deuil en céi^monie. Ainfi il e f t arrêté que c h a c u n , au milieu de
la douleur qui l'occupe intérieurement, obfervera dans l'exterieUr tufige national
de la douhur, s'il eft permis de s'exprimer de la forte. Je reprens Ricaut. (c)
Après ces gcmiffemens des hommes Se ces hurlemens des femmes, „ la Scene
„ chan-
{a) Tiré de Ricanl ubi fup.
(é) 1» vitllK calor eß ßnt ftttgHine, /koti'w.i tnajlis
StMt immolagenh: nihil eß in imagine utvi ^jrc, Ovid. L. V I I . parlant deM'ûif.
fc) RiCAHi attribue l'origine de cette coutume aux alTcmbléoî des anciens fidelles fur les tombeaux des
Martyrs.
M m m 2.